II. D. La pédagogie

Gérard est un des instituteurs qui évoque le plus la pédagogie. Etant en train de modifier sa façon de procéder en français, il explique à ce sujet : “ Avant j’avais ma progression sur l’année. Je faisais ma leçon de grammaire le lundi, ma leçon d’orthographe le mardi, etc., ça tombait comme un cheveu sur la soupe si je faisais un texte ”. En réalité, il ressent une certaine lassitude : “ Je me suis lancé parce que ça faisait huit ans que je travaillais de la même façon, je commençais à m’emmerder ”. Le français est pour lui un problème. Il parvient à faire progresser ses élèves en lecture, en mathématiques mais pas en expression écrite : “ Ceux qui n’y arrivaient pas, ils n’y arrivaient toujours pas ... constat d’échec en expression écrite avec ceux qu’y arrivaient pas ”. Il écoute alors ses collègues, notamment Jean, “ freinetiste endiablé ”, parler de son travail en expression écrite : “ Au début, ça m’a fait peur parce que j’avais l’impression que c’était le bordel ... en fait un bordel très organisé ... Finalement c’est eux (les enfants) qui gèrent leur matinée, à savoir quand ils font ... ils savent qu’il faut le faire mais ils le font quand ils ont le temps et le besoin ... Apparemment ça devait donner des résultats puisqu’il était toujours là, ses élèves s’en sortaient bien au collège ... ” Le travail de Jean intéresse Gérard mais l’insécurise en même temps : “ Ça marchera jamais chez moi, ça marchera jamais ”. Mais l’inspecteur qui vient le voir formule des réflexions incitatrices : “ Vous formez des gamins au boulot, vous faites un journal scolaire, vous faites la correspondance scolaire mais tout ça vous le faites en plus de votre travail en français. Vous seriez tellement plus tranquille si ça partait de là ... Vos gamins, ils sont autonomes, je suis sûr qu’ils sont capables de se corriger ... (Quand ils sont en réunion de coopérative) vous partez avec une feuille et un crayon ... et puis vous leur foutez la paix parce que vous avez toujours le bec ouvert, ils peuvent pas en placer une ! ”