III. Conclusion

Laurent privilégie l’échange, la discussion, l’écoute dans sa classe. Il termine l’entretien en insistant sur la nécessité de “ donner l’envie de venir à l’école, d’apprendre, envie de lire, envie de voir, envie de faire des choses ”, sur celle de diversifier les approches : “ recommencer un peu différemment avec ceux qui n’ont pas compris, ... rien que pour eux ... L’important c’est de prendre un autre chemin et d’arriver au même résultat ... aller lentement, perdre du temps et que les notions soient bien rentrées pour tout le monde (plutôt) que de laisser des gamins sur la touche au fur et à mesure ... Bon, il faut imaginer ce qu’on lui demande, (faire) manipuler... Au CM 2, l’abstraction c’est pas encore ça, multiplier ses pédagogies ”. Il conclut alors sur la nécessité de s ’adapter au mieux à l’enfant et aussi de “ prendre les parents comme on prend les enfants, de façon positive ... Jongler avec tout ça c’est pas forcément évident, c’est ... c’est ce qui fait justement le sel, le piment de notre métier ”. 

Laurent a raison d’insister sur l’importance du plaisir pour la réussite. Mais, peut-être manque-t-il dans sa classe une écoute plus individualisée de l’enfant qui lui permette de mieux percevoir les désirs profonds de chacun. Ce ne sont pas les raisons objectives que l’on donne qui engagent l’enfant à s’investir dans des exercices de grammaire, d’orthographe ou de conjugaison, ou de mathématiques ..., mais le désir d’écrire, de fabriquer un objet à travers lequel on est reconnu dans ses capacités de création, de réalisation, d’imagination. Pour cela, l’enfant est prêt à fournir un gros effort. En revanche, il peut faire des milliers d’exercices sur le même thème, sans aboutir à intégrer la loi qui y correspond si cela ne correspond pas à son désir. Tenter de faire remarquer qu’en lisant, on acquiert “ beaucoup de notions, plein de choses ” n’est pas efficace. Le problème est peut-être là : lit-on, se cultive-t-on “ pour acquérir de la culture ”, ou pour être, pour vivre, pour comprendre, pour partager des expériences avec d’autres ? Le plaisir nécessaire à l’apprentissage est-il un plaisir “ d’avoir davantage ”, que ce soient des biens matériels ou culturels, ou “ d’être plus ”, davantage ouvert aux autres, aux monde, par différents médiateurs dont la lecture, et aussi la télévision ? Laurent est dynamique mais j’ai eu un peu le sentiment d’être parfois submergée par le flot de ses paroles, reflétant, me semble-t-il, un besoin de s’exprimer et d’être véritablement écouté.