IV. B. 1. Les principes

Deux principes fondent les stages. Le premier est celui d’interdisciplinarité : il s’agit d’

‘“ élaborer ensemble ... un ‘’langage commun’’ et fonder une pratique pédagogique intégrant les diverses dimensions de la formation 228”.’

Le second concerne l’auto-formation : avec leurs compétences diverses et variées, les stagiaires se font formateurs les uns des autres, soutenus par des intervenants extérieurs qualifiés, le but étant

‘“ de permettre une conversion fondamentale des enseignants pour qu’ils admettent qu’ils ne doivent pas attendre l’essentiel de leur formation de l’institution éducative, mais de l’utilisation qu’ils peuvent faire des ressources qu’elle leur procure.229 ”’

Tout d’abord, les premiers stages sont longs (un semestre) mais ils ne semblent pas réellement répondre à la demande (de moins en moins d’inscriptions et des problèmes d’efficacité) et sont progressivement remplacés, à partir de 1974, par des stages courts avec la participation de directeurs d’école normale et d’inspecteurs départementaux de l’éducation nationale, et axés sur un thème défini.

Les formateurs ont élaboré une formation qui s’inspire du principe d’implication : le stage est un

‘“ instrument du changement lui-même ”’

ce qui nécessite des situations où les participants puissent vivre de telles relations pour réfléchir et analyser ce vécu ; un deuxième principe est celui de l’hypothèse d’isomorphisme :

‘“ les formateurs de maîtres forment ceux-ci de la façon dont ils ont été formés eux-mêmes, et [qu]’ensuite c’est de cette même façon que les maîtres éduqueront les enfants. ”230

 

Ces stages courts consistent en deux semaines (parfois trois), séparées par un assez long retour sur le lieu de travail où il est possible d’expérimenter. Même avec un thème qui peut apparaître “ très ponctuel et technique ”, les formateurs veillent à ce que le stage s’inscrive bien dans un processus de formation (et pas seulement d’information). Leur élaboration, surtout pour le premier, n’est pas préparée par les stagiaires mais garde une certaine souplesse, qui permet des aménagements et des constructions lors de la deuxième (et parfois troisième) rencontre. De plus, pour favoriser l’implication, est mis en place,

‘“ lorsque les participants sont en état de l’accepter, un dispositif permanent d’attention aux méthodes de travail et aux démarches de groupe ..., l’analyse de pratique ici, rendue alors possible, mobilise l’intérêt pour l’analyse de leurs pratiques là-bas et réciproquement.231 ”’

Mais ces enseignants se vivent souvent d’abord comme agents de transmission de savoirs, et ils imaginent les stages comme leurs lieux d’acquisition. Ils n’ont pas intégré le fait que l’acte pédagogique lui-même s’inscrit

‘“ dans une situation existentielle irréductible à autre chose qu’à elle-même, situation qui met en présence deux sujets ou deux libertés pour lesquels enseigner et apprendre, écouter quelqu’un et lui répondre relèvent du mode originaire de l’’’être avec autrui’’.232 ”’

La proposition initiale des animateurs est de partir des problèmes et des difficultés déjà rencontrés dans le travail à propos du thème du stage. C’est en fonction de cette recension et des désirs des stagiaires qu’il pourra être fait appel à un spécialiste pour les aider à approfondir leur questionnement (maïeutique socratique en acte) et à en découvrir les réponses. C’est pour cela que sont évités au maximum les exposés magistraux, les conférences ainsi que l’envoi de bibliographie sur le thème, avant la rencontre.

Le stage est aussi le lieu où se vit le rapport à la loi. Dans la mesure où un certain nombre de règles sont en place à l’arrivée des stagiaires, elles sont aussi susceptibles d’être modifiées, mais ces modifications sont le résultat de négociations entre formateurs et stagiaires.

Notes
228.

HONORE (B.) et BRICON (J.) : Former des enseignants : approche psychosociologique et institutionnelle, Toulouse, éd. Privat, 1980, 200 pages, p.50

229.

HONORE (B.) et BRICON (J.) : Former des enseignants : approche psychosociologique et institutionnelle, Toulouse, éd. Privat, 1980, 200 pages, p.51.

230.

HONORE (B.) et BRICON (J.) : Former des enseignants : approche psychosociologique et institutionnelle, Toulouse, éd. Privat, 1980, 200 pages, p. 124.

231.

HONORE (B.) et BRICON (J.) : Former des enseignants : approche psychosociologique et institutionnelle, Toulouse, éd. Privat, 1980, 200 pages, p. 136.

232.

HONORE (B.) et BRICON (J.) : Former des enseignants : approche psychosociologique et institutionnelle, Toulouse, éd. Privat, 1980, 200 pages, p. 139.