Au cours de l’année 1981-1982, dans le cadre d’une expérience tentée dans trois académies dont celle de Lyon, Albert Moyne, alors détaché au CRDP, avec ses collègues, élabore un projet de formation des enseignants du second degré qui soit
“ une véritable formation continue des enseignants en pédagogie238 ”.
Ce programme est construit à partir d’une analyse
‘“ des besoins concrets des enseignants dans leur classe ” (et est) “ conçu dans un esprit d’aide à des enseignants par d’autres enseignants ”’c’est-à-dire par des pairs, et non par des supérieurs hiérachiques. En outre, il se situe à cheval sur les temps professionnel et personnel, avec un mecredi au milieu, et commence au printemps 1982.
Cette formation comprend plusieurs “ entrées ” progressives (deux niveaux d’approfondissement I et II) : à partir de la pratique professionnelle, les stagiaires choisissent en fonction de leur sensibilité : “ Analyse par objectifs et évaluation ”, “ Animation de la classe ”, “ Travail de groupe ” ou “ Entretien d’aide à l’élève ” avant d’aborder d’autres thèmes (niveau III) : “ La relation éducative ”, “ Rythmes professionnels et personnels ”, “ la créativité en pédagogie ” . Hormis le premier thème du premier niveau, dont l’approfondissement est surtout théorique et pratique, les autres le sont
‘“ dans un sens psychosociologique ” avec “ une réflexion sur les attitudes, le transfert à la classe ou à l’équipe pédagogique ” ’du vécu du stage. Par souci de “ sécurité ”, les stages de niveau III, en raison de l’implication personnelle ne sont envisagés qu’après au moins trois stages de niveau I et un ou deux de niveau II. Mais ce n’est qu’un conseil, pas une obligation. C’est une formation, le plus souvent interdisciplinaire et inter-établissement, centrée sur la personne et le groupe, respectueuse des rythmes de chacun, qui part des pratiques des enseignants, qui leur permet de s’enrichir mutuellement et d’en prendre conscience pour les conduire à une réflexion sur leurs attitudes dans leur vie personnelle et , ce qui nous intéresse particulièrement, professionnelles.
Durant quatre années, dans les trois départements de l’académie (Ain, Loire et Rhône), 1645 personnes suivent un ou plusieurs stages. Une approche qualitative des effets de la formation montre, outre “ des apports de nature intellectuelle ”, “ des retombées pratiques ”, “ des réactions à composantes affectives ” (“ redonne du tonus ”, “ stimulant ”, etc.) ainsi que des “ réactions de prise de conscience ”. Les jugements négatifs ne représentent que 6% des réponses. Au niveau personnel, les personnes sont devenues plus lucides vis-à-vis d’elles-mêmes et de leur entourage, leur désir est de mieux se connaître pour mieux communiquer, avoir de meilleures relations avec leurs élèves et leurs collègues. Les stages ont été vécus comme “ nécessaires et efficaces ” (76%) du point de vue personnel et pédagogique. L’interdisciplinarité leur apparaît riche, ainsi que la méthode : réfléchir, théoriser à partir d’une pratique.
Or, brutalement à la fin de l’année scolaire 1985-1986, alors que les participants sont satisfaits et veulent continuer ce travail, il est supprimé des plans de formation, sans aucune évaluation... qui sera malgré tout financée et réalisée par les concepteurs du projet eux-mêmes
‘“ sur (leurs) deniers, avec l’aide d’un sociologue lyonnais : Roger Daille ”239.’MOYNE (A.), ARTAUD (J.), BARLOW (M.), Formation et transformation de l’enseignant, Vers une pratique renouvelée de la pédagogie, Lyon, Chronique Sociale, 1988, 185 pages.
MOYNE (A.), ARTAUD (J.), BARLOW (M.), Formation et transformation de l’enseignant, Vers une pratique renouvelée de la pédagogie, Lyon, Chronique Sociale, 1988, 185 pages, pp.14, 15, 21, 53, 56, 57.