Eliane

Premier entretien

Donc lire des ouvrages sur la pédagogie, bon ben j’en ai lu quelques uns... mais j’ai pas le temps, j’ai pas le temps. Des années où on a 30 élèves, si on veut diversifier, faire attention à ce que tout le monde et chacun ait pris son content dans la journée, qu’on ait oublié personne, c’est... bon les soirées sont pas extensibles. Et je trouve que c’est ... c’est un peu quelques fois des regrets justement, les regrets que j’ai c’est d’avoir laissé certains gamins en cours de route. Moi je trouve que pour un instit, c’est la pire des choses quoi. Parce que quand on n’a pas réussi, on se dit bon c’est peut-être pas forcément de notre faute, mais on se dit... Y a des gamins, bon, ils peuvent pas plus, ils peuvent pas plus. Mais si on avait eu le temps, les moyens, la façon de s’y prendre avec lui, peut-être que justement on aurait pu en tirer davantage. Et moi j’ai eu des des gamins... Alors c’est un peu décevant. Et c’est vrai que, bon ben vous disiez que, à S. il y a des cas difficiles, on appelle au secours, bon ils arrivent. Mais on appelle au secours ils arrivent pas toujours tout de suite. Les psychologues, y en a un pour, pour... alors ils vont dans les endroits un peu, où il y a vraiment problème. C’est sûr que S. la population scolaire est très différente de la population de SC. Mais ça veut pas dire qu’à SC. on ait pas eu des gosses à problèmes. C’est vrai que aussi, moi je les ai bon maintenant mais quand on les a plus grands, quand ils arrivent au CM1-CM2 ça fait un peu tard. Il faudrait que ce soit aussi en maternelle qu’il y ait vraiment... Justement je crois que c’est le rôle de la maternelle de se pencher sur les enfants, l’enfant tout seul en tant qu’individu, ses réactions, son comportement. Et c’est vraiment aux maternelles enfin je crois parce que s’il y a des choses qu’on prend pas à la base, après quelquefois c’est presque un peu tard.

  • C’est sûr, surtout s’ils ont été dégoûtés par une ou 2 années de maternelle

  • Oui. Alors, c’est ça. C’est ça. Moi je trouve que le métier d’instit, d’abord faut faire ce métier parce que, si on aime les gamins, si ... Faut pas faire ce métier déjà pour l’argent (rire) et puis pour recevoir des compliments. Bon par rapport à une secrétaire, par rapport à un PDG d’usine, par rapport à un médecin, par rapport ... On est, on est pas reconnu déjà. Bon, vous l’avez fait, je pense que c’est ça, hein ! Les gosses marchent bien, bon c’est parce qu’ils sont intelligents, les gosses marchent pas, c’est la faute du maître. Alors là il faut un petit peu, il faut banir un petit peu ça et puis... Bon moi j’ai toujours bon mes parents ils étaient instits alors c’est vrai que j’ai toujours vécu dans ce milieu. Ils étaient instits, ils avaient des amis instits. Ça a été vraiment j’ai toujours vu mes parents parler de classe, d’enfants, de soucis d’enseigner. Et mon père aussi était un petit peu il était un peu à la ... On sentait ça fait moins en arrière mais il aurait, il essayait des pédagogies un peu nouvelles quoi. Mais à côté de ça, moi je voulais pas être instit. Non, non, non. Je suis rentrée dans l’enseignement parce que, un peu parce que la vie m’y a forcée. Mais j’y suis pas rentrée en traînant les pieds parce que j’aurais voulu faire autre chose je voulais faire docteur (rire), alors enfin bon, chirurgien au départ. Mais la vie a fait que j’ai fait autre chose, j’ai fait ce métier. Mais en fait je , je m’y suis sentie tout de suite à l’aise parce que j’avais fait des colos, parce que justement je savais ce que c’était que le métier d’instit, j’étais pas, même en étant remplaçante j’étais pas novice dans ce... J’habitais dans une école, donc voir des gamins dans une cour, entendre, je savais ce que c’était. Et puis, voilà. Et puis j’ai fait des remplacements, des remplacements où on était pas très aidé. C’était l’époque, on faisait des remplacements, on avait des devoirs de pédagogie à faire, à rendre, oh, je sais plus un par mois je crois. On avait de temps en temps, une fois par mois, des cours à l’E.N. d’A. ou de B., non d’A. je crois. Et puis ça s’arêtait là. Y avait ce qui s’appelait un conseiller pédagogique, donc il venait voir les remplaçants, il restait une matinée dans notre classe et puis... Ben il nous donnait des petits tuyaux, qui un petit peu nous aidaient. Si, si, il nous aidait. Et puis les instituteurs qu’on remplaçait, certains pas tous mais certains nous aidaient. Ils nous disaient : bon ben tu fais comme ça, tu as ça, ça et ça à faire. Ils nous laissaient leur cahier journal. Et puis on suivait un petit peu ce que faisait l’instit. On avait pas tellement ... et puis sur des remplacements courts et puis étant donné qu’on n’avait pas de formation, on était bien obligé de faire comme l’instit. En fait on suivait ses directives et le conseiller pédagogique généralement allait aussi dans ce sens. Comme il pouvait pas venir voir tout le monde... Moi quand j’étais un peu sur le coin de T., j’en ai vu un, Monsieur R. à l’époque qui était venu me voir à B. Et puis c’est vrai qu’à B. c’était une classe : y avait du CE2 au certificat d’études, y avait 15 ou 20, 18 gamins. Ça tournait tout seul. Et c’était aussi pas les mêmes gamins, les mêmes gamins. Le maître ou la maîtresse, on écrivait au tableau, on expliquait, les gamins faisaient l’exercice, puis ça s’arrêtait là. Mais les élèves du certificat d’études, moi je m’en rappelle. Moi je me dis toujours : bon maintenant ce serait plus possible. Les élèves du certificat d’études vous savez il y avait des.. ça s’appelle des recueils, des recueils de ... Alors, ils avaient leur recueil, y avait 2 problèmes à faire, on faisait la dictée, y avait des questions de grammaire, vocabulaire qui suivaient et puis voilà. Enfin c’était avant 68. C’est vrai qu’après, vers les années 70, j’ai trouvé que les enfants commençaient déjà à changer. Bon je sais pas si c’est 68. Enfin ça se peut bien, les mentalités ont commencé à changer. Et puis, ben après, enfin je suis allée un petit peu partout. En remplacement j’ai fait de la maternelle, donc du primaire, du collège. Après j’ai fait beaucoup de collège. Je suis restée 2 ans en collège où j’enseignais les maths parce que j’avais le droit. Bon j’avais fait une année de fac entre autre où je faisais maths, maths et sciences. Et puis ils nous demandaient dans notre questionnaire ce qu’on préférait. Par contre quand on est rentré dans l’enseignement ils nous demandaient si éventuellement on allait en collège. Donc 2 années de suite, oui à peu près, à SJ. où j’ai enseigné les maths de la 6ème à la 3ème. Mais j’aimais bien, j’aimais bien parce que là il y a des conseillers pédagogiques aussi qui sont venus me voir. Bon c’était aussi mon domaine, j’aimais bien. Bon je sais pas si je réussissais ou si je réussissais pas, parce que c’est pareil, le conseiller pédagogique venait me voir, il regardait ce que je faisais. Il m’a toujours dit oui, c’est enfin je copiais mes souvenirs de prof de maths. En fait, c’était ça. J’avais en terminale un prof de maths que j’adorais, je me souvenais comment il faisait et puis je faisais un peu oui, je faisais un peu comme lui. Alors là je sais pas si j’ai..., si tous les enfants, si tous les enfants comprenaient. J’essayais au maximum parce que, à travers des interrogations, je voyais si les gosses suivaient ou pas et je, enfin bon, j’ai toujours, si, comme j’aimais assez ça, les gamins je demandais s’ils comprenaient, je revenais en arrière si c’était pas compris. Et c’est vrai, aux dires des parents puisque les parents venaient nous voir ; donc quand ils défilaient comme ça, et c’est vrai que les parents, j’ai jamais eu de reproches. Enfin on m’a toujours dit que les gamins m’aimaient bien et puis que le courant passait. Mais y a certainement des méthodes, y avait certainement des méthodes autres et ne les connaissant pas ... Je pense que c’est pareil, quand on est dans ce métier, si on sait pas trop, il vaut mieux, il vaut mieux faire quelque chose qu’on sait bien faire plutôt que... des expériences aussi faut en faire mais faut quand même vérifier que ça a marché, que ça suit derrière. Et puis après j’ai passé mon CAP, et puis... C’était mon CAP. Alors mon CAP je l’ai passé en primaire parce que, donc c’est une maîtresse de CP qui a bien voulu me laisser sa classe pour pouvoir passer mon CAP, parce que j’avais pas le droit de le passer en collège. Alors, dans mes heures creuses de prof de collège, j’allais dans sa classe et je suivais donc ce qu’elle faisait, et puis j’ai préparé mon CAP dans sa classe. J’avais une leçon un peu type, je me souviens que j’avais une leçon de calcul, une leçon de lecture, une leçon d’éducation physique. Alors ça, je l’avais préparé avec elle. Enfin c’était sur la présentation d’un nombre, je ne me souviens plus, en lecture, oui, je sais plus. Enfin bon, tout ça. La partie théorique, c’était ce qui était commun à tous les..., c’était un devoir de pédagogie. Et puis la partie pratique c’était ça. Et puis après, bon ben j’ai eu mon CAP et puis après je suis devenue titulaire. Avant j’ai fait encore... A cette époque y avait des 6ème de, ce qu’on appelait les 6ème de transition. Et après mon CAP je suis allée au collège d’A. et j’étais en 6 ème de transition. Et c’est là où je me suis aperçue que quand même c’était la classe dépotoir. C’était la classe dépotoir. Des gamins ça, ça m’avait vraiment hérissée parce que des gamins soi-disant à problèmes... J’étais pas dans le collège, pas dans les bâtiments du collège mais j’étais dans les bâtiments de l’école primaire, dans une espèce de classe qui était couloir, moitié couloir où les gamins ... Oui, y avait une allée et les tables de chaque côté et tout serrés les uns contre les autres. Et on avait droit à une salle de gym, fallait... il avait fallu que je me batte pour pouvoir avoir la salle de gym. Et puis c’était une heure bien précise bon ben évidemment il fallait bien que ça cadre avec les autres mais enfin, c’était pas prévu pour eux. Je me souviens aussi qu’il y avait un gamin que j’avais trouvé, mais très bon. Enfin bon, je me demandais ce qu’il faisait dans cette classe-là, mais il était pénible, il était pénible. Alors on l’avait mis en classe de transition. Enfin bon c’était vraiment, c’était pas une classe faite pour la classe de transition qui aurait due normalement être une classe un peu de passage, de renforcement, enfin pour leur permettre de retrouver le cycle normal. Non, c’étaient des gamins qui étaient là, ben mis sur le côté puis qu’allaient passer après en 5ème de transition, puis après en classe pratique, puis après je sais pas ce qu’ils faisaient après ces gamins. Ils allaient travailler. Et ça, je me souviens que ça m’avait vraiment scandalisée. C’était ... Et pourtant ça m’avait intéressée dans le sens qu’il y avait quelque chose à faire avec ces gamins. Y avait vraiment quelque chose à faire en ayant des moyens. Parce que c’est toujours un petit peu le nerf de la guerre. Si on n’a pas les moyens, des moyens financiers, hein, déjà financiers pour pouvoir, hein quand on quand les gamins... Y a pas de bouquins, y a pas de bibliothèque, y a pas de magnétophone pour pouvoir faire des trucs, enfin quand y a rien, c’est sûr... Et puis y avait pas de formation, pas de formation. Alors... bon ils étaient pas trop nombreux. Moi je me souviens que je faisais un peu de l’enseignement individuel. Mais c’était pareil, c’était très théorique. Je m’étais aperçue que certains étaient pas bons en orthographe, bon je renforçais l’orthographe. Mais avec ce que je savais à cette époque, ben des exercices d’orthographe. Mais y avait certainement autre chose à faire. Maintenant avec le recul, par autre chose on peut, on peut améliorer l’orthographe par autre chose, en faisant autre chose que de l’orthographe. Mais si aussi on n’a pas les moyens, c’est difficile et puis, voilà, pas de formation. Parce que c’est pareil, on mettait . Donc, je sortais, quand j’ai eu mon CAP, j’avais pas de, j’avais pas encore le droit de postuler et puis même si j’avais eu le droit de toutes façons c’est ce que, on met dans ces classes-là ce que les instits un petit peu plus vieux ne veulent plus et voilà ; donc... Et là, j’ai jamais vu personne par exemple. Personne, je m’étais débrouillée avec ce que je savais et je savais pas grand chose et puis ma bonne volonté, quoi. Et puis après, bon ben j’ai eu, après quand j’ai demandé des postes, je suis arrivée à SC.

  • Ca fait combien de temps que vous êtes à SC.

  • 71. Ça fait 26 ans. Oui pendant longtemps, enfin pendant longtemps, de temps en temps je, j’ai eu envie de partir, d’aller voir ailleurs. Mais c’est vrai que, bon SC. ça avait l’avantage pour moi d’être... Et puis faut dire, partir... on a toujours les mêmes gamins. Les gamins, enfin les gamins sont des gamins. Partir dans une autre école, dans un groupe plus grand eh... Je sais pas si c’était vraiment la peur de l’inconnu. C’est peut-être pas forcément la peur de l’inconnu mais euh... Bon SC. ça avait ... Avec G284. on a toujours quand même été une école où on fait des choses ? Où on a fait des ... Parce qu’aller dans un groupe d’A. où justement on sort jamais de sa classe, c’est pas bien euh, c’est pas mieux. Alors, en fait je suis restée à SC et puis finalement il y a toujours moyen de ne pas ronronner dans une classe. Si on a envie, y a toujours moyen de ne pas ronronner dans une classe. Ça c’est un peu notre état de, notre état d’esprit, si on a en vie de ... ben de faire des choses, oui. Voilà.

  • Et, je voudrai vous demander : avec quels gamins vous vous entendez le mieux ? Ce peut être une classe d’âge, ce peut être le style de mômes aussi. Y en a avec qui ça accroche mieux que d’autres.

  • C’est -à-dire que moi au départ je préfère les enfants, même s’ils sont un peu pénibles, turbulents et puis qui ont envie, qui proposent, qui sont volontaires. Même si ça brasse un peu plutôt que des enfants qui ... Enfin déjà c’est plus facile de travailler. C’est plus facile de travailler avec des enfants qui ont envie, qui proposent, que des enfants qui sont euh... ben qui attendent, qui attendent toujours. J’ai pas vraiment d’ a priori. Non c’est... C’est-à-dire les enfants qui attendent, je fais en sorte de les bousculer, de les bousculer pour... ben justement pour qu’ils cherchent, pour qu’ils se bousculent un peu les neurones. Bof, les enfants, non j’ai pas vraiment de ... disons que dans ma carrière, je me souviens pas d’enfants que j’ai vraiment pas, avec qui j’ai vraiment pas accroché. Toujours par un moyen ou par un autre, j’ai essayé de... ben que ça marche, ça marche. Je sais pas dans l’autre sens si ça a toujours accroché. Je sais pas. J’ai jamais eu de parents qui sont venus me dire : bon, ben ça va pas, il faut, il faut... Qu’est-ce qu’il faut faire parce que ça ne va pas. J’ai jamais eu de parents qui sont venus me le dire. Bon c’est vrai qu’il y a toujours des enfants avec qui ça va bien et d’autres ça va moins bien.

  • Et quand ça allait moins bien c’était à quel niveau que vous le ressentiez ? A la fois quand ça allait moins bien et aussi quand ça allait bien, parce que ce qui m’intéresse c’est les 2 côtés.

  • Si quelques fois y a des ... C’est-à-dire au niveau réussite scolaire. Voilà. Parce que nous y a rien à faire. C’est un peu la sanction. Un enfant qui réussit pas... on , bon ben nous c’est notre sanction. On se dit bon y a quelque chose, pourquoi ça ne va pas ? Donc, y a alors on se dit ... quelque fois si ça m’est arrivé de dire : je sais pas par quel moyen rentrer, quel moyen rentrer dans son jeu pour essayer de le faire travailler. Si, l’année dernière, par exemple, j’avais un élève, euh... gentil à côté de ça, gentil, gentil euh et qui euh. Bon il était turbulent, il était ... mais, pas sot mais je savais pas par quel moyen le, arriver à le faire travailler et pour qu’il réussisse. J’ai pas, justement il a été très vite en situation d’échec, en situation d’échec. Enfin par rapport aux autres parce que, ben parce que, ben, j’ai pas trouvé. J’ai essayé, ben j’ai essayé les moyens qui étaient à ma disposition ; bon entre les, entre passer de la pommade, après ben le côté plutôt sévère, sanctions, revenir à des explications, discuter avec lui il était toujours d’accord mais ça s’est arrêté là, quoi.

  • Et vous avez discuté avec le maître ou la maîtresse qui l’avait ...

  • Il arrivait de M. et il venait d’une école privée et . bon, ce que j’avais comme informations, c’était vraiment très,très... Bon y avait pas grand chose. Y a rien qui m’a permis d’accrocher. Bon sa maman est venue me voir et bon, elle constatait comme moi. Elle a dit très peu de chose sur auparavant, très peu aussi. Je pense qu’il y a pas de miracle. C’est pas parce qu’un enfant qui travaille pas bien en école privée va travailler mieux en école publique ou vice-versa. Je pense pas que ... mais c’est vrai que ce genre d’enfant, parce que moi j’essaie quand même dans ma classe de varier dans mon travail, les enfants sont sans arrêt sollicités, je fais en sorte toujours que ça vienne d’eux. Bon le cours magistral, bon de temps en temps il y a un moment où il faut le faire mais c’est court, c’est restreint et c’est je sais pas un petit point précis où il faut quand même qu’il y ait ce cours magistral et j’essaie un petit peu sous forme ludique, sous forme de jeu, sous forme d’échange, que ça... que les enfants... que ça rentre dans leur tête. Et bien lui, ça a pas, ça a jamais... ça a pas marché. Ça a pas marché, bon il avait déjà un an de plus et d’ailleurs il est parti, il est parti en école privée à D. J’ai pas de nouvelles, on n’a pas de nouvelle quand... Les collèges nous renvoient les... quand ils sont en 6ème, nous renvoient leurs bulletins. On sait à peu près ... Au collège de V., le collège de B. maintenant C., B., on a un peu ce qu’ils font, ce qu’ils deviennent mais les écoles privées ne le font pas. C’est un petit peu dommage parce que ça aussi ça peut nous, ça nous aide. Au J(privé), c’est ça, il y a les études, y a peut être plus une aide aux devoirs.

  • Et des gamins avec qui vous avez eu le sentiment que vous aviez fait du bon travail ?

  • Des enfants avec qui j’ai fait du bon travail... euh... oui, ben oui. Je pense que, oui j’ai un exemple. Enfin, c’est un peu difficile parce que, quand on dit qu’on a fait du bon travail, est-ce que c’est nous qui avons fait du bon travail ou c’est l’enfant qui lui ...

  • Peut-être les deux ? Quand je dis ça, c’est plutôt les 2, parce que dire que des gamins quand ils arrivent dans votre classe, vous les sentez... Ça a l’air difficile ou autre, et puis vous vous rendez compte que petit à petit, parce qu’ils sont soutenus, ils accrochent et bon on les voit progresser.

  • Oui, oui, oui. Je vois l’année dernière, j’ai vraiment eu une classe, c’est une bonne classe et, c’est vraiment une classe avec laquelle on a fait des trucs vraiment... bien, une classe qui bon au début de l’année c’est toujours un petit peu... Nous on part au mois de juin avec une classe qu’on connaît bien, qui va bien ; enfin qui va bien, on connaît les enfants et on rattaque au mois de septembre avec une autre classe, et toujours ce mois de septembre on se dit : mais c’est pas possible j’arriverai jamais à ... On a souvenance du mois de juin et donc au mois de septembre c’est un mois difficile, c’est difficile parce qu’on se dit toujours on n’y arrivera pas. Et notamment l’année dernière parce que ça faisait longtemps que j’avais pas eu un CM2 complet. L’année dernière j’avais donc un CM2 entier et ces CM2, ils m’arrivaient de 3 classes différentes, c’est-à-dire... parce que pendant 4 ans, ou 3 ans on avait fait à l’école, on avait 3 CM1-CM2. Je travaillais avec Mr B., Mr H., voilà on travaillait comme ça, on avait 3 CM1-CM2 parce que l’effectif des classes avait pu s’y adapter donc. On les gardait 2 ans. Donc cette année-là, donc l’année dernière j’avais plus que le CM2 parce que.. ben parce que c’était pas possible de faire autrement. Et donc j’avais des CM2 qui m’arrivaient de chez moi, donc, de chez Mr H. et de chez Mr B. Et c’est vrai que, même si on travaillait ensemble, on n’a pas les mêmes méthodes de travail. Donc j’avais des enfants que je connaissais bien qui m’arrivaient, qui étaient avec moi l’année d’avant et puis ces 2 autres groupes, ben que je connaissais un petit peu moins bien, quoi. Et ces enfants, ils... Ça m’a un peu perturbée dans le sens qu’il y avait un groupe qui prédominait pour moi, et puis les 2 autres que... bien il faut quand même qu’ils... qu’ils rentrent dans le..., qu’ils fassent partie du groupe. Et c’est vrai que le mois de septembre j’avais vraiment bataillé ; j’ai dit : jamais. Je me souvenais aussi qu’avant ça allait bien, enfin. Et en fait ça..., je me souviens à la réunion de parents que j’avais eue au... qu’on fait tout de suite là autour du 15-20 septembre, je m’arrache... je leur avais dit : je sais pas si je vais... ça... j’ai de la peine à les mettre un peu comme ça sous mon aile. Enfin, c’est pas que je tiens à ce qu’ils soient sous mon aile mais j’aime bien que ça fasse groupe et puis que moi je sois là un peu à orchestrer, à orchestrer le groupe. Et finalement ça fait, ça a été une classe qui a vraiment... disons fin septembre, autour du 15 octobre, le groupe s’était... la mayonnaise prenait, voilà, la mayonnaise prenait. Et vraiment ça a été une classe... vraiment, qui a vraiment bien bien bien marché, qui après ensuite, enfin les enfants étaient tellement... ils avaient été séparés depuis le CP, ils étaient ensemble à la maternelle et ils se retrouvaient, voilà, en fin de cursus primaire, ils se retrouvaient ensemble et ils étaient vraiment contents de se retrouver. Bon, enfin il y en avait 30, c’était quand même assez important. Et, bon, ça a été une année qui a vraiment bien bien marché. Ils se sont bien entendus, bon on a fait de la correspondance avec le Valais et on a fait du théâtre. Y a eu une atmosphère.. bon c’est toujours pareil, les plus forts, mais jamais de, jamais de ... de compétition, jamais de... enfin de la compétition, oui mais toujours dans l’idée d’aider celui qui réussisait moins bien, oui. Et c’est aussi peut -être pour ça, parce que c’est cette année-là que j’avais ce fameux gamin dont j’ai parlé, dont j’ai pas réussi à trouver l’entrée. Il est arrivé là, à se greffer dessus et lui aussi il a peut-être pas réussi non plus à trouver, à rentrer dans le groupe. Il en a peut -être pas fait, il a peut-être pas fait d’effort lui, et puis le groupe était soudé et c’était plus difficile. Alors voilà. Et c’est vrai que, bon... on a vraiment fait des trucs.. et, même des gosses qui bon, des gamins... je vois le petit L. qui avait un an de plus, qui est pas dans de bonnes conditions de travail, éh bien il s’est accroché, il s’est accroché. Et ce qui m’ennuie maintenant c’est que quand... Et bien il est au collège et puis il est largué. Voilà. Et pour dire il est dans une, je l’avais mis avec Pauline. au collège, il est dans la classe de Pauline et elle est déléguée de classe donc au conseil de classe elle a dit : mais vous savez que L. , il faut pas trop lui en vouloir, il a de la peine, il peut pas bien travailler. L’année dernière il travaillait bien mais la maîtresse... Oui. Et là, bien lui il est largué, et puis il est largué puis je sais pas ce qu’ils feront de lui. Et c’est pas faute d’avoir... d’avoir prévenu, hein ! Je voulais déjà qu’il soit avec Pauline parce que comme ils habitent côte à côte, elle le materne un peu et c’est pas suffisant. C’est ... je sais pas comment on peut dire mais ça fait... ces gamins qui quand ils partent... C’est là où justement moi je trouve que le, qu’au niveau du collège, y a un manque. Manque de prise en charge, hein. ... On nous harcèle j’ai été inspectée et puis c’est pas la première fois que je le dis on nous harcèle, nous au niveau du primaire, dans les cycles, dans les... hein faut, on nous harcèle quand même dans notre pédagogie, faut, faut... c’est bien moi je trouve mais faudrait aussi que ça suive, que les professeurs de 6ème y en a, y en a moi je ... mais c’est pas tous hein ! Les professeurs de 6ème y en a encore beaucoup qui font la classe comme ça se faisait il y a ... comme ça se faisait quand moi j’étais en 6ème. Quand on, y a un professeur de français, je sais plus si c’est... professeur de français, en orthographe il fait des dictées. Alors c’est sûr que... il se contente de faire des dictées. Je dis : c’est pas comme ça, hein ! Si, si on fait des dictées, et puis on met des zéros, puis on fait des dictées puis on met des zéros, et bien c’est... Voilà.

  • Et vous parliez de correspondance. Y a longtemps que vous en faites ? Est-ce que vous, qu’est-ce que vous faites ? Je sais pas, votre classe elle est fondée sur la correspondance ?

  • Euh. Y a pas longtemps que je le fais. Je corresponds avec une classe du Valais et bon ça s’est fait, ça s’est fait... Au départ c’est une initiative départementale pour... Enfin au départ je devais correspondre avec une classe italienne, enfin du Val d’Aoste. Et puis... après ils m’ont demandé : ce serait bien que je corresponde avec une classe du Valais. Alors bon, oui j’ai accepté puis... Si c’est intéressant. Bon, je fonde mon travail en partie mais pas totalement hein, pas totalement. C’est difficile de faire que ça, de ne faire que ça. Ça, au niveau écriture, bien sûr que au niveau production d’écrit, c’est stimulant, au niveau atmosphère dans la classe aussi parce que bon ben là on va les recevoir, chacun... chacun, y a des groupes, chacun travaille à la, au fait, à quelque chose qui, que l’on va faire lorsque les correspondants seront là. Euh... stimulant, enfin oui c’est stimulant. Faire du théâtre parce que je veux que, qu’ils produisent... ils vont faire, ils vont produire des petites pièces devant leurs correspondants. Ça les stimule dans le sens qu’il faut qu’ils apprennent leurs textes, qu’il faut qu’ils... ben voilà que ce soit quelque chose qui tienne, voilà qui soit au point. Si c’est intéressant. Mais tout fonder dessus... si c’est, comment dire, de temps en temps, à propos de ... On est allé les voir et bien, la géographie du Valais, ah bien vous vous souvenez quand on a fait ça, enfin... C’est, ça relance un petit peu le, ça relance la machine. Je pensais aussi au niveau du français parce que, bon, à la fois ça fait écrire et puis à la fois, bon ben il faut être compris, il faut que ce soit, faut pas qu’il y ait de fautes. Oui, voilà.

  • Et vous vous rendez compte que ça a une efficacité ?

  • Me rendre compte... Je peux pas dire. Oui, je peux pas dire. Ça a une efficacité dans le sens que les enfants écrivent volontiers. Ils écrivent volontiers. On a ... Ben si, faut écrire pour se, pour se, ben pour les inviter, pour leur donner de nos nouvelles, pour leur. Ben on s’écrit régulièrement. On a écrit, pas forcément... Là, voilà . Là il y a un courrier qui va partir pour les inviter, pour leur dire ce qu’on va faire. Ah et puis maîtresse, est-ce qu’il faut leur dire ce qu’il faut qu’ils apportent parce que si on fait du foot... Ben oui. Ils disent : il faut que, il faut leur dire ce qu’il faut qu’ils mettent dans leurs bagages... Donc, c’est ... Et là ils écrivent volontiers. Hein ça c’est, il y a pas de... y en a aucun qui rechigne pour écrire. Y en même d’autres qui s’écrivent entre les courriers, qui vont directement chez eux. Ah oui, oui, oui, oui, oui, dans ce domaine-là, c’est ... et dans l’échange, il y en a même qui se téléphonent. C’est, c’est, je pense que là c’est enrichissant. Mais l’année dernière , donc j’ai commencé l’année dernière, c’est ce que je dis quoi, j’aurais dû le faire avant. Et l’année dernière, pareil avec la même classe. Oui c’est un ... Et le maître de la classe, il est ravi lui aussi, c’est pareil, ça motive, ils ont un an de plus. Et puis, lui pareil, il a encore plus de difficultés parce qu’il dit que c’est une école fermée, c’est le fin fond de la... du Valais. Ils sont, vraiment ils sont... et lui il est ravi parce que justement, les enfants découvrent, découvrent autre chose. Si,si, c’est intéressant. Et bon, l’école de SC. correspond avec une classe du Bénin aussi. C’est Mr H. qui a ... avec la MJC d’A. qui a lancé une ... un projet Afrique, je me souviens plus bien, alors donc ils ont demandé s’il y avait des écoles qui avaient envie de correspondre... Alors là, toute l’école correspond avec une école du Bénin. Ah ben c’est bien aussi. Y a pas eu encore beaucoup beaucoup d’échanges, on a eu, on a fait 2 courriers et on en a reçu un mais les... C’est pareil, bon ben ça permet, ben l’Afrique, où se trouve le Bénin, on a cherché des ..., y a des enfants qui ont apporté des documents sur le Bénin... C’est vrai, c’est ... quand on... La même chose, y a écriture et puis y a lecture. Quand y a un courrier qui arrive, alors c’est vraiment, c’est vraiment la joie. Le courrier du Valais, quand je dis : ah, on a reçu une lettre du Valais, c’est le c’est le, ils sont contents hein. Et c’est chacun sa lettre, ils se lisent, ils échangent, ils se font lire ce que l’autre a écrit. Oui, si c’est intéressant. Mais, bon on peut pas, on peut pas l’appliquer dans toutes les disciplines : histoire, maths... Ou alors si, peut-être bien mais faudrait que je me, faudrait faire une histoire comparée entre... Si, si c’est possible. C’est sûr l’histoire locale et puis, oui c’est sûr. Mais ...mais... faudrait que je me penche dessus. Ça demande du travail et de la documentation. Et c’est pas facile, enfin, pas facile à trouver. Et puis comme, y a rien à faire, on fait aussi autre chose, alors comme maintenant ça fonctionne tout sous forme de projets et de... bon ça donne aussi, ça fait quand même pas mal de travail... Mais c’est intéressant, c’est intéressant et bon ben, ça raccroche les élèves, oui. Ah oui... tous, tous, parce qu’ils sont obligés de, de, ben de rentrer dans le... Bon ben je vois cette année, j’en ai un, il traîne un peu les pieds. Enfin, bon il est grognon de nature, il est obligé... tous les autres, tous les autres sont contents, il ... même s’il traîne un petit peu les pieds, il est obligé d’être content (rire). Mais enfin ça l’entraîne, voilà. C’est pas forcément son truc mais... ou alors il le montre pas, je sais pas, cet enfant-là, c’est pareil, lui j’arrive pas à le... c’en est un avec qui c’est difficile. Oui, oui. C’est-à-dire, il est pas démonstratif alors je ne sais jamais si ça lui fait plaisir ou pas, s’il est content ou pas. Mais il le fait, il le fait sans être obligé de le pousser mais c’est pas... il montre jamais sur son visage si ça lui fait plaisir ou pas. Peut être bien que si je le laissais, si je lui disais : bon ça te plaît pas, tu restes chez toi, peut-être bien que là, à ce moment-là il montrerait sur son visage que... voilà (rire) qu’il est pas content et que... Si, il veut bien faire comme tout le monde, il le fait.

  • Et puis, peut-être que maintenant, des lettres c’est la 1ière fois qu’ils en reçoivent ?

  • Et oui, c’est sûr, c’est sûr. Et puis, enfin surtout les filles, enfin , surtout les filles et aussi des garçons mais les filles elles agrémentent leurs lettres de petits dessins, elles envoient des scoubidous, des petites fleurs, c’est vraiment, ça ... Si, y a une démarche de leur part. Alors c’est vrai que c’est intéressant.... Voilà. Je sais pas...

  • Qu’est-ce que vous pourriez dire, qu’est-ce que vous auriez encore envie de dire, les gens qui vous ont marquée, enfin pour faire la classe au niveau professionnel, je sais pas, ou des gens ou des livres ou... qui vous ont aidée enfin, ceux qui vous apparaissent les plus importants, ou qui vous ont découragée, il peut y avoir de tout.

  • Non, des gens qui m’ont découragée, il y en a point qui m’ont découragée. Mais étant donné, on peut dire que je me suis formée sur le tas. C’est ... Bon, et puis, enfin sur le tas et aussi, bon voilà parce que, je baignais dans ce milieu, j’avais une écoute auprès de mes parents qui ... , enfin c’est vrai qui avaient une oreille, qui bon, qui se sont, qui ont continué, même après quand ils étaient en retraite, ils étaient interessés parce que vraiment c’était, c’était, c’était leur truc, c’était leur vie et qui, qu’étaient intéressés par ce que je faisais. Hein, parce que, des expériences, enfin des expériences, par ma vie, parce que je pouvais faire en classe et on était aussi dans le, parce que G. mon 1ier frère est instituteur, mon 2ème frère aussi, et mon 2ème frère et, il est spécialisé dans l’enfance inadaptée et c’est vrai que, souvent les réunions de famille, au grand dam de mon conjoint c’était souvent, ça tournait souvent autour de l’école. Et ma belle soeur M. étant institutrice, ma 2ème belle soeur qui, bon qui est, qui a préparé, qui est à l’E.N., bon ben qui n’a pas enseigné mais qui, parce que, parce qu’elle n’a pas enseigné, parce que sa vie a fait que... mais, donc les réunions de famille c’était ça, c’était. Souvent les réunions de famille ça tournait autour de l’école. Entre les expériences, la vie de mes parents dans les... dans le village, ce qu’ils faisaient, ce qui tournait autour de l’école, les difficultés qu’on rencontrait nous autour de, dans nos classes, et puis on en parlait et c’était vrai, c’est vrai que l’école, l’école... Mes parents ayant des amis instituteurs, c’est vrai, on n’en sortait pas, on en sortait pas.

  • En fait le soutien pédagogique c’était la famille ?

  • Oui, oui. Oui, oui. Ça c’est vrai. Parce que, moi en soutien pédagogique, étant donné que j’ai été pendant 4 ans dans des collèges, enfin remplaçante, ma 1ière inspection enfin si, j’ai été inspectée, c’était même pas une inspection, c’était l’inspectrice maternelle j’étais aux H., l’inspectrice était venue me voir. Et c’est vrai que quand j’étais en maternelle aux H., c’était une directrice après qui a été inspectrice, Mme H., et qui m’a beaucoup, elle m’a aidée. Elle m’a beaucoup aidée. Et puis c’était une école aussi où on faisait des choses et... donc... oui elle m’a aidée. Et bien l’inspectrice était venue me voir et m’avait complimentée parce que, parce que... Pareil parce que j’étais... bon ben bon peut-être pas forcément complimentée dans le sens de ce que je faisais en classe parce que ça avait été très vite fait mais surtout mon attitude vis-à-vis des enfants. Que j’avais un bon contact avec eux. Parce que après, les inspecteurs... Parce que j’ai eu... et puis après mon, ma 1ère inspection après mon CAP, vous savez, maintenant ça a changé mais enfin vous vous en souvenez, les inspecteurs, je sais plus comment il s’appelait celui-là, il était venu il était venu m’inspecter... Euh, bon, oui c’était bien quoi, je faisais mon travail mais pas un seul, un seul conseil, pas un seul, non pas un seul conseil. Non, rien. Et puis les maintenant ça s’appelle animation pédagogique mais avant les conférences pédagogiquesvous vous en souvenez aussi hein ! on sortait des conférences pédagogiques complètement cassé parce qu’on se disait : ben euh, tout ce qu’on fait, ben c’est... ça vaut pas grand chose et puis, puis quelques fois c’était d’un mortel ennui, hein ? Moi je m’en souviens d’une où, je me souviens plus qui l’avait faite c’était pas S. c’était un autre, où il avait commenté les nouvelles direc... non pas les nouvelles directives, les nouvelles, les nouveaux programmes de français je crois, on avait un bouquin. (soupir) Oui, c’était la leçon. Ça me faisait rappeler mon professeur de français que je me suis traîné de la seconde à la, enfin de la 3ème à la 1ière et puis qu’était vraiment nul, nul, nul, qui disait que (soupir), d’un monotone, enfin bon, qui dégoûtait, qui nous avait dégoûtés du français. Qui m’avait fait abandonné le latin, j’étais bonne en latin jusqu’en 4ème et qu’en 3ème d’un seul coup j’étais nulle en latin parce que, parce qu’elle était insupportable. Et, donc c’est vrai on ... moi, j’ai pas été aidée, pas du tout. Et je me suis vraiment ... c’est pour ça que quelques fois je dis c’est de la petite cuisine ; pour moi ça a été un peu de la petite cuisine. Et j’ai appris comme ça en, en essayant d’abord de rester au, un peu dans ce que je savais faire. Et puis après ce qui réussissait, parce que j’avais vu que, et bien qu’il y avait du répondant. Et puis après, bien petit à petit, ouvrir l’éventail, ben au fil des années, parce que je me sentais plus sûre de moi et, et... Et puis après j’ai... Bon après y a eu des stages. C’était des stages qui ... qui m’ont permis aussi... Ben j’ai fait des stages... Enfin certains stages ont été bénéfiques et puis d’autres... Mais les stages étaient bénéfiques dans le sens qu’il y avait échange entre collègues. Voilà. Et c’est ... Et j’en ai fait un, enfin le 1ier que j’ai fait c’est en ... il a duré 3 mois. C’est un stage à l’E.N., voilà des stages à l’E.N. Et c’est vrai que... Et puis en en bouquinant un petit peu, en en, en réfléchissant, en me posant des questions moi, en en cherchant ... oui en bouquinant pour apprendre telle ou telle chose, comment est-ce qu’il faudrait faire... Et puis en observant les enfants, en me disant : bon ben non, ben là ça a pas marché... Voilà et je rectifiais le tir, je rajoutais du sel, un petit peu de poivre, comme ça.

  • Mais en fait, essentiellement, en face des enfants ?

  • En face des enfants. En modifiant, en écoutant les enfants. Oui, en m’adaptant. Je crois que c’est S. qui m’avait dit : vous savez la meilleure pédagogie, c’est pas, c’est pas parce que vous aurez préparé une belle leçon et puis c’est sûr qu’il faut bien, faut préparer sa leçon, faut savoir ce qu’on veut y mettre dedans, ce qu’on veut faire passer... Mais si, si ce qu’on veut y mettre dedans , si au bout de 5 minutes on voit que les gamins, commencent à bouger des pieds (joint le geste à la parole) puis qu’ils commencent à danser sur leur chaise, ben faut dire non. Voilà. Faut vite s’arrêter puis faut changer ou on... c’est parce qu’ils sont pas réceptifs et que.. et c’est vrai y a que bon la pédagogie par groupes, enfin du travail par groupes, du travail de ... D’abord inciter les enfants à , à lancer quelque chose puis partir des enfants, de ce qu’ils savent, de ce que oui de ce qu’ils savent... ben au début moi je le faisais pas, je le faisais pas. C’était... on... et puis je vois les jeunes qui arrivent maintenant, qui viennent dans mes classes, les stagiaires, ils font pas mieux, ils font pas mieux. Ils ont, il faut que ... ils ont une feuille alors pareil : il y a le contenu, y a c’est en termes bien plus... les objectifs, voilà je vais pas me souvenir de tous les mots. Et puis c’est bien clair. Et c’est à la lettre qu’ils se... ils se tiennent à ça, ils s’en tiennent à ça, hein ! Bon, eux après ils sont, c’est sûr qu’ils sont vus après par des professeurs... et ils ... parce que moi quand ils viennent, bon j’ai des stagiaires dans ma classe je leur dis : tu sais, tu apprendras après, regarde les gamins. Si tu ... faut que tu t’aperçoives très vite si tu, si ça passe ou si ça passe pas, si le courant passe pas, tu sais, tu prêches dans le désert. Oui mais (rire) oui c’est sûr pour le moment il faut que tu fasses comme ça mais après, petit à petit il faudra que tu apprennes à regarder, à regarder les gamins. Il faut apprendre à lire sur leurs visages, à voir dans leurs yeux si ça pétille ou si ça reste terne. (Des inspections :) l’inspection de 77, puis peut-être après en , 77 et 5, oui, oui, en 82. Oui, voilà c’est 82. Et je me souviens que la 2, oui la 2ème inspection, en 82, l’inspecteur avait dû rester ½ heure dans ma classe, ô à peine, parce qu’il y avait eu un drame, c’est l’année où une petite à A. s’était faite assassiner et donc, il y avait les gendarmes, enfin la police dans l’école et il fallait que l’inspecteur vienne tout de suite dans l’école. Donc il était parti, il avait dû rentrer dans ma classe à 9 heures 10, il en était reparti à 9 heures et demie parce qu’il y avait eu un coup de fil et je l’avais pas revu. Et je me dis toujours que ... faut faire confiance à l’instit. Oui c’est vrai que, alors que je vois J. (inspecteur actuel), il est à l’écoute. Enfin bon, je sais pas ce qu’il ... Mais c’est vrai qu’ils nous aident pas, ils nous aident pas. Et c’est vrai que, si on, enfin les gens qui ont fait l’E.N., qui ont... qui ont eu des cours... et puis encore je sais pas, je vois les jeunes qui nous arrivent ; voilà les jeunes qui nous arrivent de l’I.U.F.M., y a pas grand chose, hein. Ils sont vraiment pas, à part bon voilà ils ont des modèles-types de leçons préparées, euh... Moi je crois que ce qui manque, c’est la connaissance de l’enfant, comment un enfant fonctionne et, bon ben faut vieillir, faut avoir vraiment du métier pour arriver à ... Moi y a pas longtemps, enfin y a pas longtemps, si y a quand même quelques années que je m’aperçois parce que, bien sûr au fil des années, on est plus en, on domine un peu le sujet, on peut se pencher plus sur l’enfant en tant qu’enfant donc et c’est vrai qu’au début, ... il faut qu’on fasse une leçon. Donc on fait sa leçon, on est là pour ça, on est en fait payé pour ça, mais on prend pas en compte forcément Toto qui fonctionne de cette façon et puis Julie qui fonctionne d’une façon complètement différente. Et bien il faut vieillir, il faut avoir un petit peu, il faut avoir de la bouteille quoi, comme on dit, pour pouvoir ben dès l’instant où on domine un tout petit peu plus, et bien après ça devrait être l’inverse. L’E.N., c’est ça, c’est des belles leçons, c’est des belles leçons pour l’instituteur, et puis pour les gens qui regardent, et puis qui écoutent. Enfin bon. Voilà, c’est ça, c’est ça, c’est que, avant que l’enfant, ça devrait commencer comme ça : on prend en compte l’enfant, on , ce qu’il sait, parce que le gamin qui écoute écarlate par exemple, et bien je voudrais bien savoir ce qui se passe dans son petit cerveau à propos d’écarlate. Mais y a qu’à leur poser des questions. Moi c’est souvent, enfin même des plus grands. Y a un petit texte où il y a justement comme ça des mots difficiles, y a des enfants qui ont compris quelque chose de complètement différent. On leur apprend pas, on leur apprend pas (aux élèves-maîtres) et on ne nous apprend pas (à partir du vocabulaire de l’enfant). Mais c’est pareil. Enfin bon ici, est-ce que l’école primaire elle est pas non plus aussi avec ses sacro, ses programmes... qui sont ... on a beau dire les avoir allégés, est-ce que justement on pourrait pas prendre un gamin là où il est ; on se dit bon ... avoir un objectif sur un gamin : cette année lui y a ça et puis tant pis si le reste il est... Et ce qu’on sait pas non plus aussi c’est ce qu’on disait tout à l’heure ce qu’on devrait apprendre dans les I.U.F.M., c’est comment remédier aux choses qui ne vont pas. Des gamins qui, moi je m’en rends compte parce que ça se retrouve... Enfin un exemple : j’ai un enfant qui est pas bon en géométrie, c’est un excellent élève à côté de ça, et puis qu’est pas bon en gym, qu’est patasson comme tout. Quand il faut lui faire faire un enfin gym, genre danse un peu et puis dans l’espace quand il faut lui faire faire 3 pas à gauche, 2 pas à droite ou enfin 3 pas à gauche, 3 pas à droite, bon il a un mal fou à... Le triple saut il a un mal fou à le mettre... l’intégrer. Mais ça va ensemble. Je suis sure que la dyslexie ça peut se combattre avec, par autre chose que de faire relire et relire et relire et réécrire. C’est ce qu’il faudrait que dans les I.U.F.M., la belle leçon type, leçon sur le complément d’objet direct, bien jolie, bien cadrée, bien faite... à la limite ça, ça se ça se fait et puis on prend un bon livre on n’a qu’à tout bonnement suivre le livre à la limite, hein ? Mais justement, comment faire pour que ... ils n’oublient pas, je sais pas le, les accords... Moi, je dis dans les I.U.F.M. ils ne sont pas préparés justement à remédier, à pallier aux carences, à (soupirs)... Mais enfin, moi, (soupir) je me souviens d’un gamin, j’ai perdu comme ça, qui a , avec qui j’ai rien fait hein. Il y a déjà de nombreuses années, outre que j’avais une classe, je devais en avoir 34 ou 35, alors travailler dans des conditions comme ça... quoi qu’en disait S., que lui il a eu jusqu’à 50 élèves, on peut pas... Mais c’est vrai que ce gamin j’ai rien pu faire avec lui. Et la pédagogie différenciée parce que c’est ça hein ( ?)... C’est bien celle qui s’adapte à sinon à chacun , à arriver à faire, qu’elle puisse varier pour qu’elle convienne au maximum et puis celui à qui elle convient pas et bien lui en trouver une pour qui, qui lui va bien. Mais, mais on est tout seul. On est tout seul. C’est vrai que (rire), on est tout seul face à nos échecs, on est tout seul face à nos réussites. C’est moins grave, ça marche mieux mais, d’une certaine manière, on est, je crois qu’un instit c’est aussi un être humain et qu’il a besoin aussi d’être reconnu en tant que personne qui réussit son travail. Bon, c’est peut-être un peu de la fanfaronnade mais moi je dis... Bon ben là l’autre jour j’ai, au mois de janvier j’ai été inspectée. J’ai eu 2 formes d’inspection parce que, donc j’ai emmené mes ... on a un stage de ski alpin et vous savez que maintenant y a des tas de directives au niveau des sorties comme ça, on a plus le droit, les parents n’ont plus le droit d’avoir un groupe et puis il faut que l’instit reste maître de sa classe, faut que l’instit oui et c’est lui qui est le grand manitou. Bien. Donc c’est un travail complètement différent de ce qui se faisait, il est plus question, même en ski de fond de dire : bon ben voilà, toi tu as ce groupe-là, toi tu fais ça et ça. Il faut que ce soit tout bien ordonné, et en ski alpin c’est pareil. Et donc il m’a inspectée en ski alpin le vendredi après-midi ; y avait Mme M. Et il fallait que je fasse quelque chose, il fallait que le stage de ski alpin corresponde vraiment à ces nouvelles directives. Ça m’a pris un temps fou. Ça m’a pris un temps fou. Ça voulait dire que toute la semaine, je savais exactement ce que faisait chaque groupe autant du niveau débutant jusqu’aux flèches, fléchettes. J’ai eu un travail à faire avec les moniteurs du ski-club. Les moniteurs du ski-club je les connais bien, ils ont été vraiment sympas, on a , ils sont rentrés vraiment dans la combine et les parents ils m’ont d’ailleurs assez brassée à ce sujet mais ça m’a pris un temps fou : préparer les ateliers, évaluer les compétences, enfin bref. Et donc l’inspecteur est venu aux G., il m’a , donc il a vu le travail que j’avais fait et il est revenu le mardi matin pour me voir en classe voilà sur une leçon de, c’était une leçon de grammaire, sur le travail en grammaire. Bon j’ai eu un rapport d’inspection, et c’est pour dire, pour finir au bout de ma petite histoire parce que je dis un être humain... Bon, j’ai eu mon rapport l’autre jour, c’est vrai que j’ai eu un rapport élogieux. Bien, il a reconnu tout mon travail, c’est un rapport élogieux. Bien voilà. Y a que moi qui le sait. C’est pour dire, je l’ai montré, parce que je l’ai montré à ma fille. Je lui dis : tiens regarde mon, je l’ai quand même montré à mon ami. Euh, euh. Ma fille et mon gendre : oh la la, maman, oh la la maman. Ben dis donc ... oh la la maman. Mais voilà, c’est pour dire que... on serait une secrétaire, bon elle aurait... son chef vient la voir ; bon elle a peut-être gagné... y aurait une augmentation ... Voilà. Alors j’ai quand même montré quand je l’ai reçu. J’ai dit à F. (directeur) : j’ai reçu mon rapport d’inspection. J’ai dit : tu veux le lire ? Il m’a dit : oh ça doit certainement être élogieux, mais tu sais je suis pas obligé de le lire. J’ai dit : Ah, le directeur il est pas obligé de le lire (rire). Je lui ai quand même montré parce que c’est très, c’est orgueilleux de ma part mais enfin je sais pas si c’est orgueilleux mais c’est pour dire que on est seul, on est seul, on est seul à tous les, comme si à l’inverse ça aurait pu être, enfin bon... Moi, quelques fois c’est un métier où ça me fait un petit peu marronner. Je me dis, bon on se décarcasse, tu te décarcasses. Après tout que tu te décarcasses ou que tu te décarcasses pas... ça va pas bien loin. Tu te décarcasses, bon moi je me décarcasse parce que je trouve que c’est, je préfère et puis j’aime, je préfère passer une journée, de toutes façons je m’ennuierais. J’aurais jamais pu faire un métier, ce métier en arrivant en traînant les pieds et puis faire le strict minimum. Ça j’aurais jamais pu parce que je m’y serais ennuyée à mourir. Alors je le fais autant pour les gamins, que pour moi. Voilà. Oui je pense que je le fais d’abord pour moi parce que... et puis les gamins voilà. Mais c’est, je trouve que c’est quand même un peu... on est dans notre petit coin. On a de la peine. L’autre jour encore, on fait partie du groupe ressource donc avec Mme M. et elle disait : mais y a des instits qui, on peut pas rentrer dans leur classe, qui ferment leur porte à clé. Pour rentrer dans leur classe, c’est le... J’ai l’exemple d’un enfant, c’est la 1ère année qu’il est là. L’année d’avant il était dans une école d’Annemasse. Alors bon, il a bien progressé, mais il veut redoubler. Il veut redoubler pour profiter encore de l’école de SC. Qu’est-ce qu’ils peuvent faire ceux qui ont du mal à suivre ? C’est ça le problème.

Notes
284.

G., frère d’Eliane était directeur de l’école où elle enseignait