Deuxième entretien

Bon je sais pas comment, je démarre sur quoi, sur mes bons souvenirs... Bon ben alors moi mon enfance, ça a vraiment été une enfance sans souci, oui. Bon, c’est ce que je, quand je pense à mon enfance hein, quand je pense à celle que, de mes enfants et puis celle des enfants maintenant, je me dis : nous on a eu, enfin bon, moi je baignais dans ce milieu instit où, où on n’avait pas vraiment, bon puis on n’avait pas le souci de dire à 7-8 ans : qu’est-ce que tu vas faire quand t’auras 20 ans ? Donc, c’était une enfance, on n’était moins gâté, j’étais, on n’était pas gâté, dans le sens que, on n’était pas euh, les jouets, les euh, y en n’avait pas plein la maison. Mais euh, des parents très présents, mes parents très présents, oui, oui, très présents, euh, s’intéressant à ma vie ... oui mais, mais pas, pas dans cette idée toujours moi c’est ce qui me fait un petit peu peur maintenant, c’est que les parents enfin je dévie peut-être mais ça fait rien dans le sens du prof d’histoire : mais quand est-ce que vous allez parler d’histoire ? toujours cette, cette hantise de, de , de l’après, voilà, de l’avenir. Moi je, voilà, je dévie toujours, une gosse euh que j’avais l’année dernière, les parents l’ont mise à chez les trappistes à Lyon parce que, euh, parce que là-bas, ben c’était, on apprenait, on apprenait, on apprenait, voilà. Et euh, donc, moi c’était, c’était vraiment l’inverse quoi. Enfin, du moment que je travaillais euh, voilà, mon petit bonhomme de chemin, euh voilà, c’est, ça leur suffisait quoi, je. Bon j’étais bonne élève, ça, ça a jamais posé de problèmes mais donc, je crois que c’est quand même, au niveau capital-souvenir, capital-enfance je crois que c’est, c’est important ça hein ! Et puis euh, bon des, des mauvais souvenirs ça c’est sûr que, j’ai pas, j’ai pas réussi ma vie, ma vie de couple, j’ai pas réussi ma vie, c’est que au niveau de mes enfants y a eu une période où, comme ça se passait très mal chez moi, dans ma vie, dans ma vie de couple, certainement que mes enfants en ont souffert. Ça j’en suis ... c’est sûr. Je le bannis de ma vie et j’arrive pas à en parler avec mes enfants parce que c’est un petit peu, c’est dur. Certainement que j’ai raté là quelque chose et... Bon j’essaie de le rattraper maintenant, je le rattrape dans le sens que, bon j’essaie d’être très présente maintenant avec, avec mes enfants, avec mes petits enfants, et puis je me rattrape de cette manière mais c’est sûr que, y a eu une période où, où ça a été euh, c’était vraiment, ça allait vraiment pas et qu’ils en ont souffert. Mais, bon, on peut pas revenir en arrière, hein !

  • Et puis, on sait pas. Ça apprend aussi.

  • Oui, faudrait que j’en parle avec eux mais euh, c’est pas encore mûr, c’est pas très euh, oui c’est pas prêt dans ma tête. Et puis je me dis : est-ce qu’ils ont vraiment envie d’en parler, eux ? Faudrait que ça vienne d’eux, et puis bon... Et puis le mettre comme ça sur le tapis, bon voilà, je suis pas prête. Mais autrement mes, oui, mes bons souvenirs moi, de l’école, comme j’étais, j’étais scolaire, j’étais euh, bon je travaillais bien. Les profs, bon ça, je je, j’ai pas vraiment, j’étais une gosse un peu sans histoires, parce que, ben oui, j’aimais l’étude. Alors euh, si, y a un prof de français notamment que j’ai jamais bon je crois que je vous en ai parlé l’autre fois qui m’a euh, que j’ai détesté. Alors du coup j’ai plus rien fait, voilà. Après j’ai fait des maths, j’ai fait de la physique, j’ai fait de la chimie parce que j’avais des bons profs et puis que ... Donc euh, mais disons que c’est, mon enfance, mon adolescence, ça a vraiment été une, c’est, ça a été sans histoires, hein ! Alors des mauvais souvenirs, j’ai commencé à avoir des mauvais souvenirs, ben après dans ma vie de femme mariée. Mais euh, dans ma vie d’enfance, à part les maux ou les coups parce que j’étais turbulente et puis des euh, oui parce que ça m’arrivait des, des, des accidents mais pour moi c’est même pas des mauvais souvenirs parce que ça va avec (rire) avec le fait que je, que j’étais turbulente. J’étais à la fois turbulente et puis quand j’avais le nez plongé dans un bouquin et ben c’était plus la peine ... C’étaient ces deux côtés. Alors ...

  • C’était quoi les accidents ?

  • Et ben, bon je crois que j’ai dû me casser un petit peu, enfin je me suis cassé le poignet, j’ai les jambes, j’ai des cicatrices un petit peu partout. Je tombais de , je tombais, alors je tombais des arbres, je tombais de, oui, ça, des accidents comme ça, je tombais de vélo, je tombais euh parce que je faisais pas attention, parce que oui, parce que je jouais toujours avec mes frères et puis que, étant plus petite qu’eux, ben je voulais toujours les suivre alors, évidemment, j’arrivais pas. Et puis ma mère, c’est vrai que, 4 gamins, elle était, et puis c’était une autre vie, une vie à la campagne, nous on était dehors. Elle était pas toujours non plus à nous surveiller, à savoir, oui, on se levait le matin, on allait jouer dehors et puis, et puis... C’est pas qu’on faisait ce qu’on voulait parce qu’elle, elle, mais y avait pas non plus les dangers qu’il y a maintenant. A la campagne maintenant les gamins, ils (ne) vont plus jouer dehors, ils font du vélo autour de leur maison, ils vont faire du sport à la MJC, on les emmène à la piscine mais jouer, même les gamins de SC à la campagne ... Tandis que nous on jouait, on grimpait aux arbres, on se faisait des cabanes, on faisait des barrages dans les ruisseaux, et puis voilà, c’est des petits accidents comme ça qui m’arrivaient. Mais en fait, c’est même pas des mauvais souvenirs (rire), voilà. Alors (soupir) des mauvais souvenirs, c’est vrai que dans, j’en ai pas, j’en ai pas. Pas dans ma vie de jeune quoi, d’enfant, non. J’étais à SC, mes parents étaient instituteurs à l’école de SC. J’habitais à l’école de, j’habitais à l’école, hein ! En fait.

  • Et avec vos frères ?

  • Ça allait bien, oui, oui, oui, oui. Moi j’ai toujours été, j’ai toujours été avec bon, G. qui était quand même bien plus âgé, enfin bien plus âgé, il a 8 ans de plus que moi. Après j’ai un 2ème frère qui a 2 ans de plus que moi et nous trois euh, mais surtout avec G., mon 2ème frère était plutôt un peu poète, un peu rêveur. De temps en temps il jouait bien avec nous mais je jouais, j’étais souvent donc avec G. Enfin souvent, c’est pas qu’il me voulait mais j’étais toujours à les harceler pour ... voilà, voilà. Oui, c’est vrai que, et mes parents un peu euh... Mon père il s’occupait, il s’est occupé pas mal dans SC de faire bouger un petit peu, un petit peu la, la vie de SC. C’est lui qu’a ... Le cinéma, le 1er cinéma itinérant, c’est lui qu’avait mis ça sur pied. Les fêtes du Sou des écoles. Enfin c’était pas lui qu’avait mis sur pied le Sou des écoles, il existait déjà mais il l’a remis, des fêtes d’été pour essayer de, de faire vivre un peu la commune. Et, et ma mère, bon ben ma mère elle était plus présente. C’est pas que mon père, non parce que mon père était présent hein, mais d’une autre manière. Alors bon, c’est vrai que j’ai vécu un, quand j’y pense, une vie, une vie de, une vie d’enfant sans souci, alors ...

  • Vous aviez des copines ?

  • Oui, oh la, la... Oui, oui, oui, oui j’avais des, oui oui j’avais des copines mais ce qui est drôle, c’est que, bon ben je suis allée à l’école à SC hein. Après je suis partie en 6ème avec le, j’ai passé le concours de, le concours d’entrée en 6ème ça se passait comme ça à cette époque et euh, et je, après j’ai eu des copines de, de du lycée. Oui j’avais des copines de SC à l’école primaire et puis après je les ai toutes, elles sont, parce qu’on n’était pas beaucoup à partir au, alors après mes copines c’était plus (davantage) des copines du lycée. Non je pense pas, en fait euh, je, c’est vrai que j’ai (rire) c’est difficile à se rappeler, à raconter hein ? Parce que oui, et euh ma vie c’était, ma vie c’était le, euh, c’était l’école, les copines, après en grandissant, bon bien sûr, y avait les suprise-parties. Fallait, ben c’est pareil, fallait négocier un petit peu les, avec les parents les surprise-parties mais euh dans le domaine, il étaient pas euh, ils nous laissaient, ils m’ont laissée aller à des surprise-parties quand c’était raisonnable. Enfin bon je crois que, au niveau éducation euh, ça a été une éducation pas trop stricte, pas trop rigide oui, et puis non plus pas trop laxiste quoi. C’était l’éducation aussi qui se faisait à cette époque, y a des choses dont on ne parlait pas, ben on n’en parlait pas. C’est vrai qu’il y avait, y avait un domaine euh, euh, bon hein, on parlait pas de sexe, on parlait pas de, c’était comme ça, et puis c’était comme ça pour tout le monde hein, c’était, c’était, maintenant c’est vrai que c’est, y a des choses qui sont vraiment banales mais à cette époque, bon ben on en parlait pas et puis c’est tout. Mais j’ai (rire) pas l’impression d’en avoir beaucoup souffert et euh, tout le monde était, tout le monde était à la même enseigne, voilà. Et puis, bon, le collège, les copines, les copains, une vie... oui, en fait une vie sans, une vie sans histoires quoi. Des mauvais, les mauvais souvenirs que je peux avoir, oui que je pourrais, non (soupir), oh des disputes avec, non je sais pas, c’était plus ce prof que je, que j’ai vraiment détesté, euh. Peut-être avec mes parents, si une fois mon père avait, voulait pas me laisser sortir et puis que, et puis que je, que j’insistais quoi. Mais euh, je veux dire, non, mes mauvais souvenirs de vie arrivent après, vraiment après. Mais jusqu’à 20 ans, tant que, tant que, oui, mon enfance, mon adolescence jusqu’au bac, après, oui euh, même après le bac parce que j’ai fait du pionicat , c’était un peu après le bac, c’était un peu le, je savais pas trop vraiment ce que je voulais faire (soupir), mes parents euh ... J’avais le bac, bon j’ai voulu faire du pionicat pour, un peu parce que mon frère, mon 2ème frère il est rentré à l’EN alors c’était un peu par, pour dire que je voulais pas, euh pas coûter de l’argent à mes parents. C’est un peu par esprit c’est pas qu’ils auraient pas voulu hein !et peut-être bien que, oui à cet époque les instits ils gagnaient pas vraiment beaucoup d’argent et c’est vrai que mon père il a euh, bon on était 4, j’ai un cousin germain qu’était, qu’est devenu orphelin, bon c’est mon père qui, il était tuteur, ça faisait presque un 5ème. Euh, il était tuteur aussi de 2 autres, enfin ils étaient plus âgés que nous, 2 autres jeunes qui étaient orphelins, ils habitaient V. , donc il s’est ; il s’est occupé d’eux, il a, il a, je sais pas s’ils ont vraiment payé leurs études mais il s’en est occupé. Bon, ils avaient certainement de l’argent de leurs parents mais il s’en est occupé donc ... Et mon père disait que lui il était normalien et il avait appris à lire, c’était ... il avait appris à lire en gardant les chèvres pendant que nous ... Y avait pas de raison, du moment qu’on était intelligent, il y avait pas de raison qu’on n’y arrive pas, oui. Et c’était un petit peu dans cette idée que, euh, il aurait, il aurait jamais, c’était dans son idée de jamais, il voulait pas nous favoriser par rapport à un autre. Ça lui serait jamais venu à l’idée d’aller, de faire, de nous pistonner pour faire, pour nous faire entrer quelque part, c’était nous qui devions y arriver. On a été élevé un petit peu dans cette, dans cette idée-là hein ! Laïque, mais laïque euh, un peu laïque, bon c’est sûr et euh ... C’était à nous à montrer ce qu’on était capable de faire en somme. Alors, donc, toujours dans cette idée, moi je, quand j’ai eu mon bac, je voulais que, je voulais, bon je voulais payer les études. Après je savais pas trop ce que je voulais faire, en fait j’ai un petit peu de, j’ai fait la, à cette époque ça s’appelait SPCN, c’était voilà.

  • Oui, c’était comme un début de DEUG

  • Voilà. Et euh, bon donc euh, j’ai fait ça. Mais du moment où je, où on gagnait de l’argent, en étant pionne, donc je gagnais de l’argent, alors j’allais en fac, c’était un peu la ... aussi d’être libérée quoi. Si je travaillais mais (soupir) un peu, d’une façon un peu décontractée. Je pense que c’est un petit peu ce qui et à cette époque aussi, ma mère, elle voulait absolument qu’on ait un métier. Euh, de toutes façons y aurait certainement, y aurait du travail pour moi, euh j’allais certainement faire quelque chose de ma vie donc y avait pas de souci. Y avait pas de souci mais bon, ben les soucis ils ont commencé quand bon, ben, quand je me suis mariée, enfin quand... et c’est pareil c’est ... Peut-être que c’est, bon, quelquefois, ils sont plus là mais, c’est vrai que quand euh, quand je me suis trouvée enceinte et que c’était avant 68 et c’était encore l’époque, maintenant c’est vrai une femme qui se trouve... une jeune, même les jeunes mères hein, c’est, c’est, c(e n)’est plus pareil, hein, c’est une, c’est... Avant et du moment que j’étais enceinte, il fallait que je me marie. Moi j’avais vraiment pas envie de me marier. Et ça c’est peut-être le c’est pas un reproche que je peux faire à mes parents mais euh en quelque sorte si, hein ! Ils ont absolument, ils ont exigé que je me marie alors que je me suis trouvée enceinte un peu par hasard et euh, on peut pas dire que ça m’ait gâché la vie parce qu’en fait après on .. ; La vie elle (rire), on se la fait mais euh... Ça correspondait aussi euh, j’ai jamais sû s’ils ont exigé que je me marie parce que euh, ils avaient un peu peur du quand dira-t-on ? Pourtant, c’était pas, c’était pas dans leur esprit parce qu’ils ont toujours été, ils ont toujours fait des choses enfin ils se souciaient pas vraiment du quand dira-t-on. S’ils s’étaient soucié du quand dira-t-on, à cette époque, à SC, bon était 3 ou 4 familles à ne pas aller à l’église hein ! Peut-être qu’ils, peut-être qu’ils nous auraient envoyés au cathéchisme pour, pour justement rentrer dans la ligne . Et ils l’ont, on n’a pas été baptisé, on n’est pas allé au catéchisme, c’est pas pour ça qu’ils nous élevé dans la haine du, de la religion, absolument pas hein, ma mère qui allait au catéchisme, qui était allée au catéchisme, nous parlait, nous expliquait, nous parlait de ce, et mon père ne l’interdisait pas. Mais, là, pourquoi, pourquoi ils ont voulu que je me marie ? J’ai jamais euh ... Est-ce que c’était pour, je sais pas, pour donner, pour que ... Puis c’était aussi cette époque, hein, enfin quelque chose qui est tout-à-fait maintenant normal, hein, oui. Et comme, et comme, comme le divorce qui, j’ai mis du temps avant de, avant de franchir le pas parce que justement, ça, ça ne se faisait pas et, enfin ça ne se fait pas... Oui c’était pas quelque chose de banal comme ça l’est maintenant. Oh c’est peut-être, c’est un peu ça mes euh, oui, mes mauvais souvenirs parce que c’est vrai que y a eu une période où j’aurais voulu faire autre chose de ma vie... En fait après je suis rentrée dans l’enseignement et puis j’y ai, j’ai aimé, ça m’a plu, alors. Dans un sens c’est pas complètement raté (soupir). Voilà, je sais pas.

  • Je repense à la prof que vous avez détesté ?

  • Cette prof, elle, euh, je l’ai détestée dans le sens que, euh, c’était, c’était inadmissible, enfin moi, je, j’ai jamais admis, enfin je l’admets toujours pas, qu’on puisse, qu’on puisse, bon ben gagner de l’argent à rien faire. Bon je oui, je sais pas comment dire, je pense que ça correspond à, aussi à mon éducation, hein, y avait des valeurs, on, oui, des passe-droits chez moi ça devait pas exister. Euh, on, on, mes parents, ils ont jamais, ils m’ont, oui. Les gens travaillaient donc ils gagnaient un salaire, donc ils, euh, je sais pas comment expliquer. Et elle, ce prof qui, qui ne faisait rien, elle ne faisait rien, elle ... oui elle, non seulement c’était je sais pas comment dire c’était pas elle faisait rien ! Elle, moi elle m’avait euh, elle m’avait pris en grippe on peut dire, euh. Je l’ai eu en 3ème, c’est elle qui m’a fait abandonner le latin parce que, parce que j’étais, j’étais une élève sans histoires mais euh, en fait tant que ça allait bien je veux dire, j’étais assez frondeuse si ça, si ça me plaisait pas. Ça veut dire que, avec elle bon ben j’ai, oui j’ai euh, j’ai euh, certainement, je lui ai tenu tête certainement, hein j’ai et euh ... Donc elle m’a, elle m’a prise en grippe. Je l’ai eue en 2de, la 1ère dissertation euh, j’ai dû avoir un 6 parce qu’elle se souvenait de ma 3ème. Après j’ai été abonnée au 6, elle corrigeait même pas mes dissertations. Une fois j’ai fait je faisais pas de fautes d’orthographe parce qu’en fait oui, c’était peut-être pas bien bon ce que je faisais mais en tous les cas c’était écrit correctement et une fois j’ai fait exprès de faire des fautes d’orthographe, elle avait laissé les fautes d’orthographe, j’avais fait exprès pour voir exactement ce qu’elle corrigeait. Donc elle avait corrigé aucune faute, enfin souligné aucune faute d’orthographe. Donc manifestement elle avait pas, elle avait pas vu, elle avait pas lu ma copie. Je l’ai eue jusqu’en 1ère . En 1ère à cette époque y avait le bac de français, c’était pas le bac de français c’était le 1er bac, 1er bac et elle s’est débrouillée pour arriver toujours en retard on l’avait, je me souviens en 1ère heure, elle arrivait, au lieu d’arriver à 8 heures, et ben elle arrivait à 8 heures ¼, 8 heures 20, et je me souviens que j’étais toujours la 1ère à dire : bon on attend 5 minutes et on filait en études. Elle venait nous chercher en études, elle était rouge comme un, un coquelicot, euh parce qu’on arrivait, on la, on la huait en fait. Et euh, et c’est vraiment euh, elle m’avait, elle voulait pas que je passe en ... comment ça se passait à cette époque ? Non c’était en 2de, elle voulait pas, elle m’avait donné un, elle voulait pas que je passe en 1ère, c’était la seule qui ne voulait pas que je passe en 1ère parce qu’à côté de ça ben j’étais bonne ailleurs, évidemment j’étais bonne. Je faisais du, je faisais du, je faisais de la physique, je faisais de la chimie donc j’étais bonne. Je, j’avais plus (davantage) que la moyenne bien entendu. Donc elle avait accepté mon passage en 1ère que si j’avais c’était un examen à cette époque, je (ne) me rappelle plus bien mais) donc elle m’avait obligée à travailler le français pendant l’été et j’avais un examen de français pour passer en 1ère, examen que j’ai réussi d’ailleurs. Et euh, évidemment en 1ère j’ai continué à ne rien faire et elle avait marqué, elle a marqué sur mon dossier, sur mon dossier scolaire : ne mérite pas d’avoir le bac ! Et euh, bon évidemment j’ai eu mon bac. Peut-être bien qu’en français, faudrait que je vérifie mais j’ai certainement, j’ai peut-être pas eu une note, note faramineuse mais, enfin toujours est-il que j’ai eu le bac et euh. Et je me souviens plus, je sais que j’avais montré euh, je l’avais montré à mon prof de maths qui avait souri parce que j’adorais mon prof de maths et à l’inverse j’ai eu un prof de maths en 2de, en 1ère, en terminale, euh, que j’adorais, qui évidemment que, avec lui je travaillais quoi, et qui, qui avait, bon qui avait souri et qui, enfin qui avait quand même un peu, euh cette appréciation, qu’avait quand même, c’était quand même quelque chose qui était grave mais qu’elle... oui. Et à côté de ça, après quand on a eu, quand on a fait de la philo, et bien, j’avais, on avait un prof de philo que j’aimais bien et puis j’étais bonne en philo. Donc, c’est vrai que c’est quand j’y repense, c’est c’est vraiment des, bon ben ça rejoint un petit peu ce qu’on disait des, que les élèves ils travaillent pour, enfin même, même, hein pourtant à 17, à 18 ans, je travaillais, j’aurais pu me rendre compte que c’était quand même mon avenir, que j’aurai peut-être ... Et je fichais rien, je fichais rien parce que, ben parce que je pouvais pas la voir. C’est pas parce que, c’est pas par un manque de, je pouvais pas la voir et puis parce qu’elle était incapable de nous rendre ces cours intéressants.

  • Et puis parce que vous n’étiez pas reconnue. Quoi que vous fassiez

  • Oui, oui, oui. Elle me, elle, systématiquement j’étais dans sa ligne de mire, et on j’étais pas la seule mais euh systématiquement c’était moi qu’était le, bon ben je recevais pour les autres. Et oui, j’étais pas reconnue et c’est vrai que l’autre jour je disais : on a besoin d’être, d’être, d’être reconnu et euh, et c’est là, en tant que personne, en tant qu’être humain. Après sur le plan professionnel, enfin à tous les niveaux, quoi. C’est normal et puis quelque soit ... je pense que c’est la pire des choses qui puisse arriver à un être humain c’est de, hein ceux qui sont au chômage, ceux qui sont ... c’est justement de ne plus être, de ne pas être reconnu. (soupir) C’est vrai que euh, bon, mon enfance, c’est vrai que c’est, c’est une, c’est, c’est sans histoires parce que, oui, j’ai, je suis travailleuse. En fait j’aime (insiste) l’étude, j’aime le travail. Euh, bon c’est vrai que quelques fois ça me coûte de, quand je m’attaque à 30 rédactions, bon, je, c’est ... mais c’est long, je le fais. Mais, par exemple passer une heure à chercher comment je pourrai organiser quelque chose pour mon, pour mon travail, ça ne me pèse pas. Et tout le temps. Même, donc en temps qu’élève, euh, ça me pesait pas de, bon, c’est certainement à cause de, j’ai pas toujours été, si ça m’est bien eu arrivé d’être en tête de classe, à la tête de la classe, mais euh, si fallait travailler, si fallait travailler ça me coûtait pas. Voilà

  • Le travail ne vous rebutait pas.

  • Oui, voilà. Le travail intellectuel ne me rebutait pas. Et euh, la même chose, c’est ce qui va me faire peur un petit peu dans 3 ans quand je vais prendre ma retraite, faut que j’y réfléchisse parce que faut que je me dise, il faut que, il faut que je fasse des choses qui euh, j’aime, j’aime, oui j’aime chercher (insiste), j’aime euh, même apprendre quelque ..., à m’apporter bien entendu hein, j’aime apprendre quelque chose de nouveau, je ... oui, voilà. Alors... Gamine c’était comme ça, j’étais, je ... Les profs euh, parce que surtout à cette époque, c’était l’époque où les profs distribuaient leur savoir et euh, c’est vrai que nous on recevait hein ! (insiste) Voilà, on recevait. Bon ben c’est une forme de, c’est, c’est une forme d’éducation hein ! C’est pas, faut pas non plus tout euh, tout jeter. Et, et c’est vrai que, à part ce prof, les autres profs bon, je buvais leurs paroles quoi, c’était le pas tout le temps tout le temps bien sûr mais j’ai toujours été intéressée par, par ce qui se faisait. Voilà. C’est vrai que les mauvais souvenirs, on dit qu’on a une mémoire sélective, euh, je, bon je les ai bannis, je les ai bannis de ma mémoire. C’est euh ...

  • Oubliés ou vous ne voulez pas y penser ?

  • Oui, voilà. Pas bannis mais je refuse.Oui, oui.Et ...

  • Et ils ressortent ?

  • Oui, oui, ils ressortent. Oui, ils ressortent, ils ressortent ... ben oui ils ressortent de temps en temps, ils ressortent la nuit, ils ressortent, voilà quoi.