Deuxième entretien

C’est vaste, parce que raconter sa vie, raconter toute une vie, on oublie forcément des passages. Maintenant, si je devais raconter en quelques mots ma vie, on a forcément plein de choses qui sont positives et plein de choses qui sont négatives, sinon on aurait pas de vie, je crois. Bon, ben commencer par un commencement, plutôt par l’enfance au niveau de l’enfance, j’ai pas tellement de souvenirs, bon en fait de ma petite enfance, ni même de ma période scolaire jusqu’à, jusqu’à la 3ème. C’est vraiment des bribes, des flashs comme ça ! Ce dont je me souviens, c’est ma première rentrée de, ma rentrée scolaire de CM2 où j’ai pris une claque phénoménale de la part de l’instit, et je crois que c’est ça qui m’a déterminé à être bien, bien sage (rire) si je puis dire. Non, mais c’est, c’est marrant parce qu’il y a des choses comme ça, qui restent, et pas d’autres. Moi qui étais un, j’ai toujours eu une scolarité très ... très facile disons, j’étais très très bon élève, bon, et puis là, j’ai pris une claque, alors je vous garantis que ça marque des choses comme ça, surtout quoi. Bon, c’était l’époque où on n’avait pas le droit d’aller raconter ça à la maison sinon ça doublait la dose, voilà. Sinon euh... (soupir) ben mon enfance a été... école primaire. Comme j’étais dans une école de campagne, c’était donc une classe unique, obligatoirement. Mon premier instituteur était également le secrétaire de mairie ; comme c’était un petit village de 200 âmes, il avait les pleins pouvoirs sur la gestion de la commune si je puis dire hein ! Donc lui, lui m’a beaucoup marqué, d’autant plus que je l’ai retrouvé plus tard quand je suis rentré à l’EN : il était devenu le surveillant général de l’EN où j ’étais. Donc j’ai retrouvé cet homme-là. Bon, et puis mon père étant devenu maire de la commune, j’ai encore eu à faire à lui pendant quelques années puisqu’il était toujours secrétaire de mairie. Donc ça, ça fait partie des gens qui m’ont marqué. Pas forcément en bien. Bon, il avait des méthodes que je n’appréciais pas du tout, par rapport donc au côté relationnel dont on discutait l’autre jour. Lui c’était plutôt : “ je ne veux voir qu’une tête ” et puis “ filez bien droit ”. Si on devient surveillant général, de toutes façons on a des méthodes à appliquer et sans ça, bon je le trouvais très obtu, très roublard, très sournois, voilà, et vraiment le genre de personnes que je n’ai pas aimé cotoyer quoi. Cela dit, lui mis de côté, au niveau donc de l’école primaire, bon ben les joies qu’on peut avoir avec les autres enfants, la découverte bon, on avait un souterrain qui était à côté de l’école, vous pensez toutes les sottises qu’on a pu faire dedans. Ensuite, toute la période collège ...

  • Vous aviez parlé d’une institutrice

  • Ah oui. Donc, celle qui est arrivée au CM2, c’était une dame qui rentrait de ...

  • Comment ça se fait ? Il y avait deux classes alors ?

  • Non elle remplaçait ce monsieur, elle est arrivée quand je suis rentré en CM2. C’est une dame qui revenait d’Algérie, suite aux événements qu’il y avait là-bas, donc rapatriée, puis elle a repris une classe. Et puis bon, peut-être parce que c’était une femme, mais bon j’ai passé un CM2 qui était vraiment sensationnel, du peu que je m’en souvienne. Voyez, c’était vraiment des petits flashs. Je revois la tête de la personne, le nom, les rapports qu’ont pu avoir mes parents avec elle. Donc, bon puis y avait d’autres choses.

  • Et c’était comment ?

  • Très bien, très bien. Non, c’était une femme vraiment extraordinaire dans le sens où elle avait un rapport avec les enfants qui était intéressant (souligné), et qui n’était pas un rapport de forces perpétuel. C’est en ça que c’était appréciable, quoi. Et que nous, on découvrait une nouvelle liberté aussi quelque part, et on l’a bien, bien mis à profit, peut-être un peu profité, aussi parce que ... suite à des années de bagne, dirais-je, entre guillemets, ça a bien changé quoi. Donc, cette femme-là, oui elle m’a bien, elle m’a marqué en bien. Suite à cette baffe d’ailleurs, que... Je crois que c’est, je reviens toujours là-dessus ,mais c’est l’événement principal dont je me souvienne au niveau de l’enfance scolaire. Viennent ensuite les années collège. Les années collège, je ne m’en souviens pas. J’avoue que ... et je sais pas pourquoi ? Peut-être qu’il y a quelque part en moi, ou un blocage, ou une envie de mettre tout ça à la poubelle, je sais pas. Ce dont je me souviens de cette période-là, disons, c’est ... j’avais une soeur enfin j’ai toujours ma soeur qui était plus âgée que moi d’un an, qui était excellente élève, deux fois plus que moi et qui bon, qui était, qui était le modèle. Donc, quand je passais dans les classes derrière elle : “ Ah, c’est le petit frère de ... ”. D’accord. Peut-être que quelque part ça a gêné quoi, j’en sais rien, je suis pas psychiatre, je suis pas allé cherché ça.

  • Est-ce que vous avez le sentiment, vous, que ça vous a gêné ?

  • Ben je me pose la question maintenant. Je me demande si ça m’a vraiment gêné. Mais bon, pour vous dire qu’après la 3ème elle est allée, elle est rentrée à l’EN, je suis rentré à l’EN. Donc, les chemins étaient parallèles . Bon, elle est enseignante dans l’E., moi je suis enseignant ici, j’ai pris mes distances pour d’autres raisons. Maintenant, que ça m’ait gêné, je sais pas, je sais pas. Faudrait vraiment que j’approfondisse cela et que j’aille en introspection quoi, mais je sais pas. Peut-être, que j’ai pas envie de le dire maintenant, j’en sais rien. Tout ça c’est flou, quoi. Donc, mes années collège, je suis ... ben vous l’avez vu, je suis pas très grand, j’étais vraiment petit, hein J’ai toujours eu une tête de différence par rapport à tous les autres, donc j’étais gêné à ce niveau-là, ça c’est certain et je me suis retrouvé dans des situations ... où j’appréciais pas, quoi. Au point de vue du développement aussi de la maturité, moi j’ai toujours été en deça. Les, la vie, c’était... les autres du même âge partageaient plein de choses, et moi j’en étais un petit peu exclu parce que je m’excluais, ou parce que je comprenais pas ce qui se passait, que ce soit bon pour le développement, la puberté et ainsi de suite, j’étais en deça. Peut-être que ça a aussi joué sur mon, sur ma vie future, j’en sais rien, c’est autre chose. Mais je sais que j’ai eu des mauvaises relations avec mes collègues mes collègues ? oui, les autres enfants à ce niveau-là on n’était pas sur le même, sur le même stade quoi.

  • Vous avez des exemples ?

  • Ben, je vous dis dans les relations garçons-filles, tout ce qui se passait autour de moi. Moi, du fait de ma petite taille, de, je sais pas, bon j’ai été aussi un garçon timide, ben je me suis retrouvé, pas repoussé, non j’étais à l’intérieur d’un groupe, du groupe-classe, mais j’étais en dehors de certaines activités. Et puis moi, dans ma découverte du monde, j’avais envie d’aller vers ça, et j’étais pas forcément accepté par le groupe. Cela dit, ça s’est passé différemment après. Et là, j’étais toujours, donc au sein du milieu familial. Je mangeais chez une dame qui nous recevait le midi parce qu’y avait pas de cantine, on mangeait à la gamelle en ce temps-là, voyez. C’était très folklorique si je puis dire. Les profs qui m’ont marqué, j’ai eu un professeur de maths, Mr. C., je peux vous dire, je me souviens de son nom, je suis incapable de vous dire le nom des autres, totalement incapable. Mais lui, lui, lui je sais que ... J’adorais les maths, il m’a fait aimer les maths, en plus. Donc ça, c’est quelque chose qui a bien passé entre nous, et j’en garde un merveilleux souvenir moi, de cette période-là hein ! Par contre, bon, le directeur ... enfin celui qu’était le (professeur ?) principal de la classe, qu’était aussi le directeur du collège, j’ai beaucoup moins apprécié parce que bon, quand il y avait des, comment dire, des choses à faire passer, ben on utilisait un petit peu ma personne quoi. Pas souffre-douleur mais ... y a des choses que je n’ai pas appréciées, disons. C’était pas limite, tangent quoi, par moments. Bon c’est, quand on a des problèmes en soi de timidité et de rapports aux autres, quand en plus on vous met en exergue pour ceci, pour cela et puis : “ Bon ben écoute, tu vas monter sur la chaise, on va faire ci ”, c’est des choses qu’on intériorise mais qu’on apprécie pas, voilà. Donc ça, c’est ma période collège. Donc, j’ai passé le concours à l’école normale, pour l’entrée à l’école normale. Arrivé à l’EN, ben ça a été l’internat, donc passer d’un niveau vie familiale à un niveau internat, moi je vous avouerais que, là, je suis tombé de haut. J’ai découvert des choses que je ne connaissais absolument pas dans la vie de tous les jours, dans les relations aux autres. Parce que, quand on vit dans un petit village de 200 âmes, avec des parents qui – bon, mon père était mécanicien agricole, donc il était tout le temps pris toute la journée, des fois jusqu’en pleine nuit pendant les moissons maman avec 5 enfants ne pouvait pas s’occuper de nous, c’était une femme qui était arrivée de la B., du fin fond de la B. à Paris pour faire des, comment dire, pour faire des ménages à un âge relativement tôt quoi, donc elle avait pas une culture ni un, une éducation suffisante pour nous aider, pour nous pousser à faire des choses, pas d’argent non plus à, en veux-tu en voilà à la maison... Donc, on se retrouvait à, comment dire à, à avoir des non rapports aux autres. C’est-à-dire que moi, bon j’ai mon futur beau-frère qui allait au foot, qui partait en vacances à droite à gauche, tout ça moi je ne l’ai pas connu et. Et bon, y a toujours ce problème de maturité dont je vous parlais tout à l’heure. Ah, ce dont je n’ai pas spécifié avant c’est que mon père, étant donc ouvrier au niveau de la mécanique agricole, il était à la Mutualité agricole. Par ce biais, nous avions la possibilité de partir en colonies de vacances. Et les colonies de vacances que j’ai faites, moi j’en garde des souvenirs émerveillés. D’où mon intérêt maintenant pour envoyer les enfants en classe d’environnement, en classe verte et tout ce qu’on veut, moi je pousse, je pousse, je pousse. Moi j’y ai découvert les autres, j’y ai découvert la vie parce qu’à la maison, c’était nous 7 et on n’en sortait pas quoi. Tandis que là, les colonies de vacances c’était, bon à Cabourg, une en Auvergne à Ambert, et là moi, j’ai vraiment ..., je me suis ouvert voilà. Et j’avais besoin de ça, et que je n’avais pas autrement dans la vie familiale. Je crois que c’était, je vais dire restrictif voilà, fermé parce qu’y avait pas de moyens. De toute façon, si on a fait l’EN, ma soeur et moi, c’est parce que les études étaient payées hein, et nos parents ne s’en sont pas cachés, hein. Et puis, le fameux instituteur qui était qui était devenu conseiller, enfin surveillant général, avait poussé à la roue pour qu’on devienne normalien de ce fait quoi. Parce que l’argent n’était pas courant à la maison. Donc, arrivé à l’EN, ça a été cette ouverture au monde, ce qui m’a fait, j’ai eu une, comment dire, une, une culture politique à partir du moment où j’ai fréquenté des gens à l’intérieur de ce milieu. D’abord les plus anciens, les plus âgés qui se sont chargés de nous aiguiller dans certaines directions si je puis dire. Et puis, par des jeunes de la ville qui avaient des connaissances que moi je n’avais absolument pas quoi. Donc, ça a été l’époque un petit peu militante, je dirais entre guillemets, jusqu’aux abords puisque j’étais à l’EN en 68, hein donc ça fait quand même quelque chose d’important, une sacrée différence, et 69,70,71,72, tout ça ça a été une période de...

  • Vous êtes rentré en 68 ?

  • Oui, ben mai 68. C’est pour ça, mais on avait quand même connu les, on a connu les défilés dans E., enfin toutes les manifestations qu’il a pu avoir à ce moment-là quoi. Donc, toutes ces années-là pour moi ont été très très très riches, très formatrices, et c’est vraiment là que j’ai acquis la maturité qui était nécessaire à quelqu’un de cet âge-là. Je crois que j’en tiens pas rigueur à, à mes parents mais bon c’est vrai que, quelque part, il faut ouvrir les enfants sur le monde sinon ils ont de mauvaises surprises à la fin quoi. Et bon, sorti de l’EN, l’EN ça s’est très bien passé, j’ai eu d’excellents professeurs, ben oui, dont un d’histoire-géographie qui était formidable parce que lui, il nous montrait comment apprendre. Je sais pas comment vous allez prendre ça, j’ai eu une prof, une prof de psychothérapie, de psychopédagogie, pardon, oui, le mot, le lapsus significatif -, qui était absolument horrible qui, sortie de ses bouquins, de ce qu’elle disait, de sa théorie, était tout à fait incapable de s’exprimer sur quoi que ce soit d’autre. Imaginez les attentes de jeunes instituteurs qui sont confrontés dans une classe, parce que moi j’ai fait un stage en classe unique et en classe de perfectionnement on est confronté à des tas de problèmes quand on revient en classe, qu’on essaie d’en débattre, c’était non, c’était non, c’était : “ voilà , on fait de la psychopédagogie, un tel a dit ça, tel truc ... ”. Là j’ai, j’ai eu des boutons qui ont sugi (rire). Ça m’a absolument horripilé ce genre de choses quoi ! Le prof, donc C., d’histoire-géographie était très très bien. On avait un prof qui nous faisait grammaire et anglais lui, qui était absolument nul. Et puis moi, avec le recul, à cette époque-là on trouvait qu’il était nul, maintenant je trouve qu’il est encore plus nul. Lui, il pensait peut-être qu’il faisait bien les choses, j’en sais rien, et lui on l’avait pas beaucoup. J’ai fait quand même pendant dix ans de l’anglais et, au bout de dix ans d’anglais, j’en ai quand même passé six avec lui, et j’en savais pas plus. Je suis tout à fait incapable de tenir une conversation en anglais. Je trouve que c’est grave quand même hein ! Quand on a des profs qui arrivent à ce niveau-là ... Et c’est pour ça que je transpose à ce que je fais aussi maintenant hein, si je suis pas capable de faire passer un message, le peu que je veux faire passer chez les enfants, si j’arrive pas à le faire, c’est un problème qui vient de moi quoi. Hein ? Les gamins ils ... un môme c’est une éponge, et on peut en mettre des choses dedans, on peut en mettre, on peut en mettre, on peut en rajouter... Mais seulement il faut savoir le faire passer quoi. Bon pour lui, y avait un gros problème de communication je crois hein ! Sinon, le prof d’Allemand, qui a eu la délicate intention un jour de, pour faire rire tout le monde, de dire “ ... ”, la crémaillère, tout le monde s’est esclaffé. Donc, résultat j(e n’)’ai plus fait d’allemand. Parce qu’en plus on avait le choix à ce moment-là, oui. Mais, c’est en ça que je dis que ce qu’on fait comme réflexion à un enfant, il faut faire très très attention. On choisit ses mots, il faut pas blesser un enfant, surtout ceux qui sont timides, surtout ceux qu’on voit renfermés, qu’on trouve un petit peu en deça des autres, ou qui ont du mal à s’extérioriser, ceux-là c’est à prendre avec des pincettes. Sinon on les saborde hein, c’est définitif hein ! Voilà. Donc sorti de l’EN ben j’ai fait un premier poste en institut médico-pédagogique. Ça s’est très très mal passé. J’ai mal vécu ça, j’ai pas supporté les enfants, j’étais dans une période un petit peu, disons trouble de ma vie sentimentale, donc ça s’est mal fait. Et donc, c’est au bout de 6 mois, j’ai eu un accident de voiture, je pense que ça découlait du reste, et puis voilà. Après c’était fini. Puis ensuite je me suis marié et puis, les années passant, aidant, au bout de 8 ans j’ai divorcé et c’est pour ça que je suis arrivé en Haute S. J’ai voulu mettre de l’écart entre la vie de là-bas et aussi la famille, je veux dire quelque part, et puis moi.

  • Mais votre famille, vous avez parlé de vos parents, d’une soeur mais vous étiez 5 ?

  • Nous étions 5, 4 garçons et une fille. Voilà.

  • Et les autres garçons, comment ça se passait avec eux ?

  • Moi j’étais l’aîné des garçons. Y avait ma soeur, moi et les 3 petits frères oui. Alors les 3 petits frères, y en a un qui est né 2 ans après moi, l’autre 3 ans et puis l’autre 5 ans encore après. C’est-à-dire qu’on avait beaucoup d’écart avec le dernier. Les rapports aux frères et soeurs ? Bon ben la soeur, il est arrivé un moment où elle s’est isolée, elle avait sa chambre à elle, donc elle (ne) faisait plus partie de notre groupe, si je puis dire, c’était la fille de la maison, c’était en plus la responsable. Imaginez un peu ce que ça est, donc on lui faisait les 400 coups. Nous, entre les garçons, ben c’était les rapports qu’on peut avoir entre garçons, hein ! C’était des jeux de force, c’était des jeux d’influence où on allait faire des sottises ensemble, enfin bon, on a fait aussi pas mal de bêtises.

  • Par exemple ?

  • Par exemple ? Et bien on avait un, on élevait un cochon parce que c’était classique de tuer le cochon, et puis nous, on a joué avec les allumettes à l’endroit où il y avait le cochon, on a mis le feu, quoi. Voyez c’est le genre de bêtises. Ou, il y avait un immense poirier, alors on s’amusait à grimper dans ce poirier pour s’attraper et puis y a mon 2ème frère qui, à un moment, est tombé. Il est tombé quand même de 3 mètres, voyez ce genre de choses. Ou, on jouait dans l’atelier du père quand il est pas là, on gardait l’atelier, on surveillait donc. Et puis, y avait un chariot sur lequel il y avait un moteur, alors on jouait à tirer le moteur, à aller le plus vite possible et puis, à un moment, tout est tombé par terre et puis il y avait le doigt de mon frère en dessous. Ce genre de choses. Ça, c’est des bêtises dont on se souvient quoi ! C’est quand même assez ... Donc au niveau de mes frères, alors il y a celui qui venait juste après moi, qui depuis est décédé suite à, à, comment dire ? à un profond mal de vivre. Ça a été un, comment dire, ben nous on dit carrément que ça a été un suicide lent, quoi, par le tabac, par l’alcool, par le, la solitude enfin, tout l’a tué et on n’a pas pu ... Nous, en tant que frères et soeur, on a essayé un maximum, et puis on pouvait pas. D’abord, il avait un mal être profond, et un rapport aux autres qui était extrêmement difficile. Et ça, c’est un problème de, de la petite enfance hein, c’était déjà présent en lui, lui il a toujours eu, toujours été rebuté par plein de choses, par le rapport au père et ainsi de suite. Donc de fil en aiguille ça a provoqué sa ... il est mort y a 2 ans. Ensuite, y a mon frère P. qui lui est, bon, ingénieur informatique, il travaille chez Philips. Donc lui, il a une bonne place, ça a été le, le garçon comment dire ? très, qui savait où il allait dès le départ, il a fait, il a pris femme, enfants, enfin il a eu des enfants, il a eu la maison et puis c’est nickel, une vie aplanie. Et puis le dernier, qui lui est arrivé un peu plus après les autres, a eu une enfance un peu plus choyée, dirais-je, et de ce fait-là, il n’a jamais fait les efforts nécessaires pour avoir une scolarité euh, correcte. Donc, il s’est retrouvé d’échec en échec scolaire. Et puis maintenant, il travaille dans une usine à Paris, de faux-plafonds. Enfin, c’est quelque chose avec des horaires aberrants, et puis des collègues ... Et lui il a eu, donc il a pris femme, 5 filles, ce qui est quand même assez conséquent et il vit à la campagne maintenant, où habitait autrefois ma soeur. Les rapports entre lui et ma soeur se sont vite déterriorés parce que ma soeur, ayant eu le rôle de maîtresse de maison quelque part, a gardé ce rôle aussi adulte. Et puis, quand elle fait des réflexions bon, ou on laisse courir en disant : “ bon c’est pas grave de toutes façons ”, ou alors “ elle a rien à nous dire ” et bon, je crois que mon frère parfois il est pas très facile à manier, donc y a eu des heurts. Ils ne se parlent plus. Voilà en clair.

  • Et vous avec les autres ?

  • Moi avec les autres ? Moi je, j’ai récupéré le caractère de ma mère, c’est-à-dire, peut-être en mal disons, j’en sais rien c’est pas à moi d’en juger, j’aime que tout se passe bien. Voilà. J’aime aplanir les difficultés et si, à un moment y a trop de difficultés, que je vois que je ne maîtrise plus, ben je m’en vais. Voilà. C’est-à-dire que je vais pas rentrer si, ça m’est arrivé, mais quand même mais je vais pas rentrer de face dans quelqu’un pour essayer de résoudre le problème, hein ! Je vais essayer avant d’aplanir les choses, de discuter, de faire en sorte qu’il y ait pas de, de crise quoi ! Comme il peut y en avoir dans, dans les couples. Je sais que, dans le couple de mes parents, y a eu des crises comme ça, des périodes de crise et moi, en tant qu’enfant, ça m’a beaucoup angoissé et maintenant je (ne) veux plus vivre ça. Bon. Comme ça se passe au niveau de la classe hein ! S’il y a des crises entre les enfants ou moi par rapport à un, des fois quand il a quelque chose qui va pas, faut que ça s’aplanisse, il faut que ça disparaisse parce que ça, j’aime pas du tout. Je veux pas répercuter ce genre de choses, c’est intérieur. Donc, moi mon rapport aux autres, c’est ça hein, c’est que tout se passe bien ; je n’aime pas, je n’aime pas faire de, de mal aux autres. Par contre, j’ai des idées bien que ce soit, bon au point de vue syndical, au point de vue politique, au pont de vue de ma vie et puis ça, j’en démords pas, quoi. Mais si je vois que je suis pas d’accord avec quelqu’un, je dis : “ D’accord, c’est plus la peine d’en discuter ”. Je ne veux pas me fâcher avec quelqu’un. Je comprendrais pas qu’on se fâche avec quelqu’un pour des sottises pareilles. C’est ça. Je pense que rien ne vaut le coup de se fâcher avec quelqu’un. Rien. Je reste persuadé qu’on a une vie, et que sa vie il faut la vivre du mieux possible pour soi-même et pour les autres. Et si on passe son temps à s’engueuler avec l’un, avec l’autre, ou à être tout le temps en désaccord, et puis à se faire la tête, c’est pas une vie. D’abord ça stresse, et le stress, si on peut l’éliminer, on vit d’autant mieux hein. Bon voilà. Donc, dans mon rapport aux autres c’est, c’est ça et puis aussi j’ai eu toute une période lors de mon premier mariage où j’étais très euh, très ami. On recevait tous les soirs oh ! on recevait tous les soirs, on recevait souvent on allait chez les autres et ainsi de suite, et puis ça, maintenant c’est fini. Alors, pour vous dire, peut-être que c’est le fait du mariage, j’ai plus envie non plus de recommencer les mêmes choses. On a des amis, mais c’est beaucoup plus éloigné quoi, les moments. On les rencontre, ou ils viennent ainsi de suite quoi. Je préserve ma cellule familiale, voilà. Ma compagne et moi. Nous ne sommes pas mariés et elle a deux enfants, moi j’en ai pas. Je sais pas si je vous avais dit ça l’autre jour ? Bon, voilà. Donc moi, je n’ai pas eu d’enfant de mon premier mariage parce que bon, on a fait tous les examens possibles et imaginables, tout allait bien et c’est après, qu’en discutant avec un médecin, on m’a dit que ça venait de madame parce que, psychologiquement elle ne voulait pas avoir d’enfant. Moi, je sais pas si, effectivement, on peut ne pas avoir d’enfant parce qu’on le veut pas mais c’est ça, donc j’ai pas eu d’enfant. Et puis donc, j’ai retrouvé une compagne, et puis on estime que, comme elle a des enfants de 20 ans, c’est pas le moment de faire d’autres enfants. Y a peut-être autre chose à vivre aussi maintenant, elle a eu sa période où elle a fait des enfants ... Personnellement, je dois avouer que ça me manque, hein ! Quand même hein ! Je sais qu’il y a quelque chose qui ne va pas dans ma vie, qui n’est pas j’allais dire : pas normal non c’est pas ça mais qui n’est pas, qui n’est pas abouti. Voilà. J’aurais aimé avoir des enfants, j’aurais aimé, comme je fais en classe par rapport à tous ceux-là, c’est m’investir, en faire quelque chose, les tirer quoi. Essayer de faire quelque chose, bon. On a toujours l’impression quand on n’a pas eu d’enfant de, que sa vie il y a un manque quoi ! Y a ...

  • Vous, vous avez souvent, vous ressentez souvent

  • Moi, le manque oui. Mais je sais bon, que ça, c’est définitif maintenant, j’aurai pas d’enfant, bon. à moins que ... Mais je (le) ressens mal par moments quoi ! Ça me rend triste, ça m’attriste, quoi ! Surtout quand on est en réunion de famille, qu’on voit les neveux, nièces et tout ... Y a toujours les discussions entre les, bon ben les frères, la soeur à propos des gamins, de plein de choses, et puis moi, voilà. Ce côté un petit peu isolé.

  • Et vous aviez de la parenté plus éloignée, pas très loin de chez vous, que vous avez pu rencontrer, qui a pu vous marquer, des grands-parents, des oncles, des

  • Ah oui, oui, oui. Ça, ben ça m’a marqué oui. Je crois qu’on est toujours marqué par sa famille de toutes façons. J’avais, donc dans le même village il y avait mes grands-parents paternels, avec l’oncle qui ne s’était pas marié parce qu’il était un petit peu, comment dire, j’aime pas le mot demeuré, mais un petit peu ... mentalement il avait, il avait pas eu une maturation suffisante quoi. Et donc, donc mes grands-parents, moi, je les ai perdus en 72 et 81, mais j’en garde un souvenir ébloui, et même plus que ça puisque j’avais un grand-père qui, qui travaillait le bois, donc il nous faisait des, des jouets en bois, des girouettes, plein de choses. Et puis à Noël, chaque fois qu’on allait le voir, il nous donnait une pièce de 5 francs. Bon c’est rien, c’est ridicule mais c’est, pour nous c’était un événement considérable quoi. Et puis bon, y avait la grand-mère, qui était une forte (insiste) personnalité. Donc le grand-père, lui était un peu en deça. Ça, c’est vraiment des gens donc que j’ai cotoyé toute mon enfance, donc qui ont beaucoup marqué. Cet oncle aussi, qui, ben qui est décédé également, lui parce que c’était, c’était, c’était la crème des bonhommes quoi. Bon, il était un petit peu retardé mais il était gentil comme tout, et puis c’était l’oncle, voilà. Ce qui m’a marqué dans ma jeunesse aussi à ce moment-là c’est bon, on allait souvent en B., dans la famille de ma mère, donc y avait toute, tout ce côté euh, un peu exotique dirais-je, parce que là-bas aussi c’était dans un petit village, mais le village y avait 50 âmes. C’était complètement perdu en pleine cambrousse dans le M. Puis, au tout début c’était pas des belles routes pour y aller, c’était vraiment des petits chemins. Donc, quand on se retrouvait avec tous les cousins, les cousines et autres, c’était la grande fête quoi ! C’était, moi ça m’a marqué à ce niveau-là quoi ! Des gens que je vois absolument plus maintenant quoi. Si, des fois on se voit ; malheureusement c’est aux enterrements, je crois que c’est souvent le cas dans ce genre de choses. Ben, au niveau de la famille, donc, y avait les 2 tantes du côté de mon père sur Paris si, on se voyait les week ends de temps en temps quoi. Mais marqué, c’est-à-dire garder un souvenir vraiment profond, non j’ai pas, j’ai pas ça. Non, moi ce dont je garde des souvenirs importants, c’est plus les gens que j’ai rencontré en dehors, dans ma formation politique je dis politique dans le bon sens du terme, hein, je m’entends c’était pas du prosélytisme, pas du ... et ainsi de suite. J’ai eu un ami à l’école normale, bon une personne avec qui je m’entendais magnifiquement et puis qui, lui, vraiment était ouvert sur plein de choses, donc sur la vie politique en général, et lui m’a formé m’a formé je m’entends hein m’a ouvert les yeux sur plein de problèmes, sur plein de choses que moi, petit collégien qui arrivait de ma cambrousse, je débarquais quoi, et en cela lui, il m’a beaucoup marqué quoi. C’est réellement quelqu’un qui a compté pour moi. Ensuite ben bon, dans ma vie ça a été, bon y a certains amis, certaines personnes avec qui j’ai gardé des relations, d’autres on ne s’est plus revu parce que depuis que j’ai quitté le département on n’a plus des relations qu’on pouvait avoir avant, qu’étaient beaucoup plus proches, mais y a quelques personnes comme ça qui m’ont marqué. Y en a beaucoup d’autres que, dont on s’aperçoit après que c’est vraiment du superficiel je t’invite, tu m’invites, bon puis c’est tout puis y en a d’autres à qui on pense, qui reviennent de temps en temps, et ceux-là oui, m’ont marqué quoi, dans ce sens-là.

  • Et ces des gens que vous avez rencontré quand vous étiez jeune ?

  • Non, adulte. adulte, oui.

  • Jeune, vous n’avez pas de souvenirs de personne

  • Si on a toujours un meilleur ami comme on dit, donc je me souviens des noms de ces gens, mais nos vies ont bifurqué quoi. Moi j’en ai eu un qui, quand je suis rentré à l’EN, lui est parti à la SNCF et on était vraiment soudé, très soudé et à partir de ce moment-là, ma vie a été tout autre, la sienne également, et on (ne) s’est plus revu. Et pourtant on habitait, quoi à 2 km l’un de l’autre, mais on (ne) s’est vraiment plus revu quoi. Et pourtant c’était quelqu’un qui m’avait beaucoup, beaucoup marqué parce que je lui étais beaucoup attaché quoi.

  • C’était un de vos rares copains au collège ?

  • Ah, oui. Oui, oui. Oui, je crois qu’au collège c’était même le seul, hein. Les autres, si j’avais des relations avec tout le monde ben je m’entends, je parlais à tout le monde, je faisais partie d’un groupe mais vraiment être bien avec quelqu’un, c’était le seul quoi. Parce qu’on avait le même niveau familial, parce qu’on avait des accointances, parce qu’on écoutait un peu les mêmes, les mêmes musiques en ce temps-là, et on s’était vraiment bien retrouvé quoi. A l’EN bon, y a eu cet ami là, et qui lui ... donc on est resté les cinq ans ensemble. Et puis bon, après on est parti chacun de notre côté et on s’est pas retrouvé. C’est pareil, et puis bon quand on devient adulte, on n’est pas ... à moins, je sais pas, d’avoir quelque chose de très très très puissant, très très fort à la base qui fasse qu’on reste toujours en relation. Mais quand on va chacun dans son coin, on connaît d’autres personnes, on s’ouvre à d’autres choses et puis la vie va quoi. Surtout que moi, j’aime bien le renouveau. Au niveau des gens, au niveau, comme j’aime au niveau de la classe quoi. Je serai incapable de garder plusieurs années on discutait justement avec la directrice qui dit : “ Oh ben ce serait bien de partir du CE 2 et puis de faire jusqu’au CM 2 avec les enfants. Et puis comme ça on les suit pendant 3 ans et ainsi de suite ”. Moi, je lui dis que j’étais contre. D’abord, parce qu’on peut prendre entre guillemets hein ! en grippe certains enfants et ça, si le gamin il vous subit pendant 3 ans c’est une horreur. Et puis certains enfants, même si vous, vous ne les avez pas en grippe, eux peuvent ne pas apprécier votre façon de travailler. C’est pareil avec les collègues. C’est-à-dire que rester dans mon coin ici, d’abord on n’est que 2, avec ceux d’en bas on est 5, donc. Mais que ce soit au point de vue pédagogique ou au point de vue relationnel ou autre, à partir d’un certain moment, c’est, l’horizon est bouché. C’est pour ça bon, je fais partie d’un groupe environnement donc on travaille, on prépare certaines choses ça me permet de confronter mes problèmes à ceux des autres, ça me permet d’apporter quelque chose mais eux aussi m’apportent, et ça me permet de me sortir un peu de l’école quoi. Au point de vue syndical c’est pareil, ça me permet d’aller confronter mes points de vue, mes expériences, ma façon de voir les choses à des personnes différentes qui travaillent ailleurs. Moi, j’ai besoin de cette ouverture. Et je pense que j’ai besoin de ça parce que je l’ai pas eu, comme on disait tout à l’heure, jeune, quoi. Où on était dans un, un cadre très très restreint, très fermé, moi j’ai besoin de voir ailleurs maintenant. C’est pour ça, là ça fait sept ans que je suis, c’est ma 7ème année ici et j’ai déjà des fourmis depuis deux-trois ans déjà. L’envie d’aller voir ailleurs. Voir ailleurs, faire autre chose mais je sais pas, peut-être que certains diront que c’est l’instabilité, moi je vois ça autrement. Moi j’ai besoin de renouveau, j’ai besoin de sang neuf, de changer un petit peu quoi. Dans mon travail, quoi. Pas dans ma vie personnelle. Là je suis, bon on tombe sur quelqu’un qu’on trouve très très bien, je suis tombé sur la bonne personne, c’était une, une maman d’élève d’ailleurs, c’est un petit peu logique quelque part, avec qui on a eu des, le courant est passé et puis, et puis voilà. Donc elle a vécu son propre divorce et puis on s’est retrouvé ici quoi. On a eu du mal avec les enfants, ce qui est un petit peu logique dans ces cas-là. Comme ils étaient en période pubère, ils ont eu beaucoup de mal à accepter que la maman s’en aille, eux ne comprenaient pas et puis, comme de l’autre côté, la famille a bien enfoncé le clou, j’ai eu de gros gros problèmes avec ces enfants-là. J’ai choisi personnellement de, ben pas d’attaquer de front, pas de heurt, rien du tout. J’ai dit : “ bon ben, vous êtes avec votre mère, moi je vous laisse, je vais travailler en classe, je vais faire mon truc de mon côté ”. Et puis, à partir de ce moment-là, ça s’est très très bien passé. On a des relations cordiales, dirais-je maintenant, sans être à se sauter dans les bras les uns les autres quoi. Voilà, on se dit bonjour, on peut parler à table mais ils font leurs trucs de leur côté et avec leur mère, et puis moi je suis un petit peu à côté. Mais bon ça, il faut laisser le temps au temps comme on dit hein, ça viendra peut-être un jour qu’on se considère autrement qu’en qu’en chiens de faïence j’allais dire, non pas forcément mais qu’on se voie d’un autre oeil quoi. Quand ils auront aussi acquis un peu plus de maturité, je pense que ça deviendra mieux. Donc voilà, au niveau personnel c’est bien, en ce moment c’est très très bien. Je vis une bonne période comme on dit. Je fais en plus, personnellement je sais pas si vous connaissez la sophrologie. Et, tout ce qui est sophrologie donc, je trouve ça, moi, super. Personnellement, et pour les enfants avec qui je fais aussi en sophrologie un travail de relaxation et autre, c’est pas mal. Et donc, dans mes relations aux autres, ça aide énormément. Puis, ça aide à évacuer aussi pas mal de choses hein ! J’ai été, j’ai un petit peu, j’ai aussi 50% de mon père qui a le tempérament très vif, il monte en régime très très vite. Moi j’avoue que j’étais aussi comme ça un certain temps. Et maintenant c’est, je pense que c’est grâce à la sophrologie, grâce aux années, grâce à la personne que j’ai rencontrée, tout ça, ça s’aplanit, je suis plus (+) cool, je laisse passer plus de choses quoi. Je réfléchis davantage, tant par rapport à ma propre vie, qu’à mon travail en classe, hein ! Je suis plus, je suis moins enferré sur mes rails comme on peut l’être parfois ... Là, si ça déborde, et bien ça déborde, c’est pas grave, on passe à autre chose, on fait tout autre chose. Il faut vivre, il faut laisser vivre, quoi. Une classe, c’est un bouillon de culture, y a plein de choses qui peuvent en ressortir, et faut pas étouffer, quoi. Bon, si, quand il est est 4 heures et demie faut s’en aller mais, je veux dire, si y a un gamin qui a quelque chose à dire, ou qui a envie d’apporter quelque chose, ou s’il y a un événement qui se passe dans la classe, relationnel entre eux ou à la maison et puis qu’il y en a un qui a envie de parler, je crois qu’il faut toujours laisser ça ressortir. Quel que soit le moment de la journée, quoi ! Même si on est en train de faire du sport, ou une dictée, ou n’importe quoi, ça, ça doit ressortir. Mais j’essaie de le faire ressortir justement. Si les enfants s’extériorisent, ils seront aussi très très bien dans leur peau après quoi ! Et ça, je l’ai peut-être pas fait suffisamment jeune quoi.

  • Et vous n’avez pas eu, ou il n’y a pas eu de problèmes particuliers de santé, de confrontation à la maladie, vous-même ou des gens proches

  • Si. Mais on en a tous eu. Vous savez des maladies on en a tous eu.

  • Oui mais des choses graves qui

  • Oh non, non non.

  • Que ce soit vous ou des membres de votre famille et que ça vous ait touché.

  • Alors là, on peut en parler. C’est comme le reste, ça va finir par faire beaucoup. Bon, personnellement, moi petit, j’ai été à l’article de la mort à environ un mois, parce que je refusais toute nourriture. Et j’ai été hospitalisé, ils n’arrivaient pas à comprendre pour qui, pourquoi. Et j’ai été, comment dire, sauvé par l’intervention d’un vieux médecin de campagne. Et quand je dis vieux c’était, c’était le gars au fond de sa cammpagne qu’était en même temps rebouteux, qui faisait un petit peu de tout et qui, lui, a préconisé que je prenne quelque chose, et puis ça s’est passé tout de suite. Mais j’étais vraiment arrivé à être épais comme un fil de fer quoi, vraiment très très, très très, comment dire, maigre, dépéri, dépérissement à vue d’oeil et, ce dont je vous avais pas parlé, donc j’ai mon 1ier, le 1ier fils de mes parents est mort de ça. Hein ! Il s’appelait Jacques, il est mort à un mois. Ensuite, y a eu ma soeur qui s’est appelée Jackie. Alors bon, la transposition. Et ensuite, y a eu moi avec ce problème-là. Donc moi, je garde, je cette époque-là, il paraît que ça date de ça, un besoin de boire énormément ; je bois par exemple un litre et demi d’eau par nuit. Je me lève pour aller boire, j’ai besoin de ça, et c’est tout le temps hein ! Voyez, comme l’autre jour quand vous êtes partie je suis allé boire un litre d’eau, et c’est quelque chose d’incontrôlable, j’ai besoin de ça. Au niveau de, de ma vie, au niveau des maladies, j’ai eu tout ce qu’il y a eu de classique hein. Deux choses qui m’ont marqué quand même, c’est l’opération pour l’appendicite, de l’appendicite, l’opération d’une hernie, des choses quand même qui marquent bien. Parce que c’est un vécu particulier hein, de se faire opérer, c’est loin d’être évident. Ensuite, je suis arrivé à 17 ans, à 17 ans j’ai eu un accident de mobylette qui garde un mauvais souvenir d’ailleurs là, j’ai eu le rétroviseur de la mobylette qui m’a coupé le tendon, carrément tout, donc on a été obligé de couper une partie du pouce. Ça, j’avais le pouce dans une espèce de bocal où ça saignait tout, je garde un très mauvais souvenir de ça. Bon, ça fait aussi partie de la vie. Ensuite j’ai eu mon accident de voiture dont je vous avais parlé avec bon, traumatime crânien, bon ça aussi ça fait partie des mésaventures quand on est jeune et un peu foufou. Et puis depuis bon ben je, ça va quoi. Bon, je suis soigné pour le cholestérol mais ça, c’est une histoire de famille aussi. Euh, sinon ça va. au niveau des maladies importantes, j’ai mon grand-père qui est décédé d’un cancer du colon, mon oncle qui était un petit peu handicapé qui est mort aussi d’un cancer du colon, j’ai ma tante qui vient de décéder d’un cancer du colon. Donc là y a un, comment dire, un facteur familial quoi, donc que je crains moi personnellement, je me méfie, bon. Mais je sais aussi que, à la campagne, quand on mangeait autrefois c’était très très riche, très très viande, très... tout ce qui ne fallait pas quoi. Et donc on en a parlé, aussi bien avec le médecin qu’avec mes parents, qu’avec mes frères et soeurs, nous on change d’alimentation, comme nos enfants vont changer d’alimentation aussi tout diffère on n’a plus du tout la même façon de se comporter quoi. Mais ça, c’est quelque chose qui marque, hein, au point de vue d’une famille, quand les gens ne décèdent pas d’une façon entre guillemets naturelle comme ça, par arrêt cardiaque dans le lit ... C’est difficile de voir mourir un grand père, par exemple, hein. Quelqu’un qu’on a admiré, qu’on a aimé et puis qui, qui, qui se transforme comme ça jusqu’à devenir cette, comment dire, cette loque, ce débris humain qu’on voyait avec tous ses tuyaux partout là et... Moi ce qui me reste c’est ses yeux qui imploraient, qu’il pouvait plus parler, plus rien, bon ça, ça ... Moi adolescent, fin d’adolescence plutôt ça m’a beaucoup marqué ça. Voilà, au niveau des maladies ce qui m’a ... Oh, et puis mon frère ... que je n’ai pas revu les 6 derniers mois parce que, moi, j’étais ici. Quand j’allais en N. il ne sortait plus de chez lui, il était complètement enfermé, il ne voulait plus voir personne. Donc les 6 derniers mois de sa vie je ne l’ai pas vu. Ce que je regrette d’ailleurs maintenant, infiniment, j’aurais dû forcer. Mais bon, si on savait tout on ferait autrement hein ! Et lui avant, il a eu d’énormes problèmes psychologiques, puis il a dépéri petit à petit, il a sombré dans l’alcool, dans le tabac, enfin dans tout ce qu’on veut voyez. Donc j’ai vu mon frère en piteux état, mais je pensais pas qu’il allait partir aussi vite quoi. Les 6 derniers mois je l’ai pas vu et puis on m’a dit, un jour : “ il est tombé chez lui, transporté à l’hôpital et puis bon là c’était fini ”. Tout l’intérieur était complètement , plus que pris, le coeur n’était qu’un amas de graisse, les poumons y en avait plus, enfin bon c’était ... La déchéance la plus totale quoi. C’est pour ça que je parlais de suicide parce que franchement je pense qu’il a, volontairement ou involontairement, c’est arrivé à ça quoi. Donc au niveau des maladies graves et des problèmes, c’est ce qui m’a le plus marqué quoi, c’est un petit peu logique quoi, un petit peu. On le serait à moins. Voilà. Ça fait un lourd passif quelque part quand on a tout ça qui trotte dans la tête. C’est pour ça que la sophrologie en moi, c’est quelque chose qui est bien, on évacue des tas de choses comme ça, on extériorise, et puis on met ça dehors, et puis on vit pour soi un petit peu. Parce que, vivre en pensant qu’aux autres c’est difficile hein, et puis se dire après : “ Ben moi qu’est-ce que j’ai fait de ma propre vie, hein, de mon propre corps aussi quelque part ? ” Faut passer à mon avis à la marche supérieure hein ! Et aller voir, “ Bon écoute, les autres c’est bien gentil mais y a aussi soi quoi ”. Et puis on n’a qu’une vie hein. Ça veut pas dire de brûler la chandelle par les deux bouts, comme on dit hein, pas du tout hein. Non, mais savoir profiter de la vie, savoir bien vivre, bien vivre (les 2 mots détachés). C’est-à-dire vivre bien, pas vivre avec des excès hein ! Je m’entends dans ce que je dis aussi. Non non, ce qu’on fait là actuellement, je pense qu’on vit très bien, on est bien dans notre peau, on est bien dans notre relation, on est bien dans tout ce qu’on fait. Ça permet aussi d’ailleurs, quand on est bien soi-même, de s’ouvrir aux autres, parce que bon, soit du côté de ma famille ou du côté de sa famille, y a des problèmes hein, y a toujours des problèmes dans les familles (rire). Donc ça permet de s’ouvrir à leurs problèmes, et puis d’essayer de les aider quoi, dans toute la mesure du possible. Parce que, règle n° 1: on ne vit pas à la place des autres, donc les problèmes de l’un ne sont pas les problèmes de l’autre, et il faut pas transposer, dire : “ moi, je ferais ça, moi je ferais ci ”. Hein, on peut essayer d’être à l’écoute de quelqu’un, mais pas vivre les problèmes à sa place quoi. Ce qui malheureusement est le cas de certains qui se déchargent de leurs problèmes sur une autre personne. Je le dis parce que je l’ai un petit peu vécu. Quand on prend en charge quelqu’un qui est dépressif, et bien il arrive un moment où on craque soi-même. On peut plus, on peut plus, on sature.