III.1.2011L’hallucination négative de l’objet comme structure encadrante de la symbolisation

R. N. Emde attire donc l’attention sur la place des affects dans l’espace thérapeutique : et non seulement ceux que l’analysant “exporte” et qui proviennent de ses différents modèles internes, ceux auxquels il est directement confrontés dans le travail thérapeutique “où est mis à l’épreuve son sentiment de confiance de base”, mais aussi les affects de l’analyste confronté aux affects de son patient, et sa capacité à les accueillir/contenir dont va dépendre la qualité de l’écoute telle que le patient pourra la vivre et se la représenter.

Le modèle qu’il nous propose de la situation transféro – contre-transférentielle, –en référence à une relation primaire à l’objet dont il précise les contours autour des conditions d’élaboration primaire organisées sur l’élaboration des vécus émotionnels – recentre la question, dans le travail thérapeutique, sur la problématique de l’affect et des conditions nécessaires à l’émergence des motifs pulsionnels qui relient inconsciemment sujet et objet, pour que le moi puisse s’affecter sans être débordé par les tensions provoquées lors de leur mise en représentation Modèle que nous pouvons rapprocher de celui proposé par A. Green409 : “En fin de compte, nous dirons que la motion pulsionnelle est ce qui donnera naissance à l’affect, une fois que la rencontre avec la représentation d’objet sera intervenue.” Rappelons ici ce que S. Freud déclarait en 1915 : pour devenir conscient, l’affect doit se relier à une représentation de substitut dont la nature détermine son caractère qualitatif” (comme souligné p. 151 de ce travail).

Cette problématique fait écho au questionnement provoqué par S. Freud en 1938, et sa petite phrase revient ici comme un leitmotiv, puisqu’il s’agit aussi de trouver une manière de symboliser les affects d’amour et de haine pour en avoir une représentation consciente en terme de culpabilité et savoir à qui et/ou à quoi pouvoir les affecter.

La question de l’affect et de sa représentation est l’une des grandes questions que les héritiers de S. Freud ont dû, d’une manière ou d’une autre, mettre au travail. André Green en a proposé une première ponctuation en 1970, reprise en 1973 dans Le Discours vivant 410, où il semblerait que la reprise des écrits de S. Freud l’amène à privilégier les modes d’absence de l’objet pour théoriser l’affect, alors que, dans la reprise théorique de 1999, il nous propose de reconsidérer la question en privilégiant les modes de présence de l’objet qui impliquent que soit pensé par lui les effets de son absence sur le moi:

‘“D’une manière générale, la correction à faire subir à la théorie freudienne est de rattacher ce fonctionnement pulsionnel au rapport à l’objet. C’est en effet la capacité de l’objet à favoriser l’intrication des pulsions érotiques et destructrices en les reconnaissant, en les acceptant, en y apportant une réponse psychique qui permette leur élaboration en préservant leur avenir que nous appris la clinique contemporaine. Cette réponse psychique, il ne faut pas l’envisager comme secondaire aux investissements pulsionnels dirigés vers l’objet. Il nous faut considérer le travail intérieur qui modifie l’investissement vers l’objet , en le mettant en rapport avec la réponse imaginaire de celui-ci. Cette réponse intervient donc avant celle qui est effectivement donnée par lui. Une introjection se produit sur le couple investissement-réponse interne et externe devenu totalité indissociable . Sans doute, certains aspects de la réponse pourront demeurer à l’extérieur de cette introjection, mais l’impact sur la psyché dépendra de la réintériorisation de l’ensemble formé par l’investissement et l’écho qu’il aura suscité . 411 Nous sommes renvoyés dans ce travail sur l’affect à la réflexion développée sur la passivité parue la même année et au changement de paradigme proposé par A. Green , auquel nous nous sommes référés (p. 249) pour travailler la question de la transformation de la pulsion par l’objet. L’évolution de la pensée de l’auteur suit, d’une certaine manière, l’évolution de ses contemporains amenés à reconnaître le rôle médiateur , pare-excitant , organisateur pour la transformation de la pulsion, de l’environnement primaire indifférencié du point de vue subjectif, dans l’élaboration intra-psychique du sujet. Mais en insistant sur l’aspect imaginaire de la relation, n’est-ce-pas une façon de souligner que l’objet objectif se différencie de l’objet subjectif sur le terrain de l’illusion suffisamment partageable. Dans cette perspective, la projection n’est pas seulement un mécanisme de défense , elle participe au processus de mise en représentation de l’expérience . Et nous percevons bien l’importance des modes de présence de l’objet pour que le sujet puisse, dans les réponses qui lui auront été adressées en retour, se dégager de l’omnipotence primitive. A. Ciccone 412 a notamment montré comment les processus à l’oeuvre dans l’identification projective non pathologique permet à l’enfant d’éprouver l’intériorité de l’objet, de reconstruire à l’intérieur de lui la qualité émotionnelle de l’expérience et d’installer en lui un objet subjectif sans que le contact avec l’objet objectif soit perdu. L’ensemble de ces processus constitue une introjection de l’objet qui conserve le contact à la fois avec la réalité interne et avec la réalité externe ”.’

Dans son article de 1994, consacré à la fonction organisatrice du fantasme dans l’élaboration des liens à l’objet, Michèle Perron-Borelli tient une position qui s’intègre bien dans une telle perspective.

Elle envisage en effet le fantasme comme une structure de transformation 413 dans l’élaboration dynamique des représentations conscientes et inconscientes. Cette structure fondamentale constitue “‘le contenant représentatif de la relation d’objet’ ‘ ’ ‘dès lors que celle-ci articule clairement les positions du sujet et de l’objet autour d’une représentation de la motion pulsionnelle ou du désir’ ‘ ”’. En ce sens, ce n’est pas l’objet en tant que tel qui organise la représentation inaugurale de la relation d’objet mais le fantasme, “celui de l’incorporation de l’objet” – articulant d’emblée deux représentations, celle de l’action d’incorporation elle-même et celle de l’objet incorporé – qui constituerait “‘le premier élément d’une organisation intra-psychique en même temps que le noyau archaïque de toute formation fantasmatique ultérieure’”.

Utilisant la métaphore “de matrice originelle du fantasme“ et s’intéressant plus “au contenant qu’au contenu”, elle en vient à dégager “un modèle processuel dans lequel convergent l’investissement de l’objet et l’investissement de la pensée”, en reconnaissant toute l’importance des conditions historiques et conjoncturelles qui ont présidé, pour chaque sujet, à l’instauration d’une représentation et d’une fonction symbolisante : “‘On comprend aisément toute la conflictualité qui peut s’attacher à ces premières expériences fondatrices de l’autonomie psychique. ’ ‘C’est là que se jouent les premiers conflits d’ambivalence’ ‘,’ ‘ avec d’autant plus de violence que l’appareil psychique ne dispose encore que de précaires ressources d’organisation autonome. ’ ‘La force brutale de l’économique’ ‘ ’ ‘prévaut alors sur la souplesse des aménagements dynamiques’ ‘, les raz-de-marée de l’affect’ ‘ ne trouvant encore que de bien fragiles remparts d’organisation pour les endiguer. C’est donc aussi ’ ‘dans cette matrice originelle que vont s’inscrire les premières modalités d’aménagements défensifs de cette conflictualité archaïque.’ ‘ ’ ‘Ces modalités, dans leurs aspects les plus négatifs ou les plus précaires, peuvent entraîner des failles durables concernant aussi bien la qualité et la stabilité des investissements objectaux que les ’ ‘assises narcissiques’ ‘ de la personnalité et de l’identité’”.

Mais ne pouvait-on pas déjà reconnaître, dans le concept d’hallucination négative de la mère proposé en 1966 par A. Green,414 dans Narcissisme de vie, narcissisme de mort, cet espace en creux médiatisé par l’objet, permettant d’assurer la conjonction de sa présence et de son absence comme structure encadrante de la symbolisation, susceptible de recueillir, d’inscrire et de faire jouer entre elles les représentations ? : “‘La mère est prise dans le cadre vide de l’hallucination négative et devient structure encadrante pour le sujet lui-même. Le sujet s’édifie là où l’investiture de l’objet a été consacrée au lieu de son investissement’ ”. Modèle fondé à la fois sur le double retournement de la pulsion et sur l’investissement pulsionnel primaire confondu aux premières modalités identificatoires à l’objet, créant à la fois un système clôturant et réorganisé par la capacité de l’objet à “s’absentifierdans les réponses adressées au sujet, phénomène de “décussation” dont il reprend la description en 1993 dans Le travail du négatif 415 : “‘Dans ce retournement par décussation, c’est en quelque sorte comme si la réponse attendue de l’objet se trouvait entraînée dans ce mouvement où s’échangent, dans le courant pulsionnel, les positions extrêmes de l’intérieur et de l’extérieur. [...] Ce qui se constituerait ainsi est un circuit qui ne portera pas sur les propriétés de l’objet, mais sur la réponse de celui-ci, qui ’ ‘tout en maintenant l’objet dans son absence, le déléguera auprès du sujet, comme si c’était l’objet qui en accomplissait la réalisation’ ‘ ’ ‘; où l’on pourrait voir ici une opération de métaphore. Je poursuivrais en comparant pare-excitation’ ‘ et refoulement’ ‘, affirmant qu’il n’y a pas de correspondance, comme entre un extérieur et un intérieur, mais [...] entre eux se réalise un croisement afin que ce qui est intérieur puisse être traité comme est traité ce qui est issu de l’extérieur, à la condition, pour l’intérieur, de pouvoir être perçu comme de l’extérieur, sans fusion de l’un et de l’autre. Ceci éclaire et prolonge la formule de Freud selon laquelle le ça est le second monde extérieur du moi’”.

Les propositions formulées par A. Green, dans son article de 1999, Sur la discrimination et l’indiscrimination affect -représentation – s’appuyant sur la définition du représentant psychique de la pulsion proposé par S. Freud en 1915 dans l’article sur Le refoulement comme une composante primairement indifférenciée des versants idéïque et affectif du mouvement pulsionnel – poursuivent l’élaboration théorique de ce rapport présence/absence de l’objet qui délimite, pour le sujet, la possibilité de se construire une représentation de l’objet sur la base des expériences affectives support des investissements ; travail d’étayage des transformations de la pulsion au cours duquel vont se différencier le représentant affect et le représentant-représentation de la pulsion416 :

‘“En fin de compte, nous dirons que la motion pulsionnelle est ce qui donnera naissance à l’affect , une fois que la rencontre avec la représentation d’objet sera intervenue [...] Le représentant-représentation est la représentation d’objet investie par la part du représentant pulsionnel psychique venu du corps, sollicitant ce qui est extérieur à lui-même afin qu’un changement survienne dans le psychisme tout au moins, tandis que l’affect est la poursuite dynamique de ce qui, parti du corps, y fait retour, en étant porteur de manière immédiate des attentes, des espérances et des craintes de la rencontre souhaitée avec l’objet417.’

Nous sommes, encore ici, très proche du modèle proposé par D. Winnicott du trouvé-créé, qui consiste à suspendre la question d’un moi passif ou actif à l’origine des expériences primaires. Cette position permet de soutenir l’idée, déjà soulignée, que le sujet va s’identifier aux processus psychiques de l’objet mis à disposition dans la façon dont ce dernier autorise sa découverte. Et nous le vérifions régulièrement dans la clinique : l’exercice de la pulsion, et la mise en oeuvre de la destructivité qu’elle implique dans l’utilisation de l’objet, peut contraindre le moi à un travail psychique dépassant ses capacités d’organisation, lorsque l’objet ne peut en défléchir l’énergie nécessaire à son investissement.

Et A. Green se montre particulièrement sensible à la convergence de leurs points de vue, dans ce domaine, lorsqu’il écrit : “‘Winnicott’ ‘ aura une formulation parente par l’esprit quand il nous proposera l’image du voyage de l’objet subjectif’ ‘ à l’objet objectivement perçu, l’enfant créant l’objet au voisinage de sa rencontre avec lui, avant que celle-ci n’ait lieu. Un tel modèle prend sa valeur du fait qu’en l’absence de rencontre avec l’objet de la réalité, ce sera la capture du mouvement par les processus primaire’ ‘s qui s’offrira comme substitut provisoire, qui, certes, n’apportera pas la satisfaction voulue, mais enrichira la complexité de l’appareil psychique en assurant la possibilité de développements quasi illimités par les connexions établies entre inconscient, préconscient et conscient. Toutefois, ce qui modifie radicalement les descriptions de 1923 par rapport aux précédentes, ’ ‘c’est que les motions pourront être aussi porteuses d’une destructivité qu’on ne peut plus rattacher à un type de satisfaction’ ‘ et qui menace de défaire la complexité dont nous venons de parler. Telle est l’ouverture que permet la motion pulsionnelle en deçà de la représentation’”418.

Et nous sommes aussi très proche du modèle théorisé à la suite par R. Roussillon du trouvé-créé/détruit-retrouvé, pour lequel l’auteur reconnaît, dans le travail d’effacement de l’altérité de l’objet impliqué par le travail de la symbolisation primaire, cette nécessité repérée par A. Green dans ce qu’il a nommé “hallucination négative de la mère”419.

R. Roussillon prolonge le questionnement en interrogeant, chez l’objet, ce qui va permettre au sujet de faire cette expérience symbolisante  et nous amène à retravailler, dans l’article de S. Freud de 1925, La négation, la question de l’épreuve de réalité, qui est au principe de la différenciation soi/autre.

‘“L’opposition entre subjectif et objectif n’existe pas dès le début. Elle s’établit seulement par le fait que la pensée possède la capacité de rendre à nouveau présent ce qui a été une fois perçu, par reproduction dans la représentation, sans que l’objet ait besoin d’être encore présent au dehors. La fin première et immédiate de l’épreuve de réalité n’est donc pas de trouver dans la perception réelle un objet correspondant au représenté mais de le retrouver, de se convaincre qu’il est encore présent”.420

R. Roussillon est amené à souligner la conséquence implicite dans la phrase de S. Freud à savoir que “‘la formation d’une représentation interne’ ‘ de l’objet semble s’accompagner du sentiment d’avoir fait disparaître celui-ci au dehors’ ‘”’ ‘, sinon pourquoi s’agirait-il de ’ ‘“’ ‘se persuader qu’il existe encore’”?

En ce sens, la symbolisation contient, par essence, la menace du meurtre de l’objet. Et nous sommes alors en mesure de mieux saisir en quoi les réponses de l’objet, la façon dont il va être retrouvé au dehors, les modalités de sa présence vont permettre l’élaboration du sentiment de culpabilité qui nécessairement accompagne l’expérience de représentation. En ce sens, la culpabilité est originaire, en ce sens elle est un organisateur psychique. Mais si les jeux de la symbolisation primaire ne peuvent éviter que vienne se fixer un point de culpabilité qui donne au sujet le sentiment de détruire l’objet, entraînant une expérience de perte venant désorganiser le processus de symbolisation, alors, en ce sens, la culpabilité primaire est un désorganisateur pour la psyché : “‘Si l’objet ne se montre pas ’ ‘“’ ‘atteint’ ‘”’ ‘ par sa réponse, c’est-à-dire s’il n’accepte pas de transformer quelque-chose de lui, alors le processus de symbolisation du sujet se trouve être de fait disqualifié dans sa valeur d’accomplissement transformatoire, il glisse sur l’objet, n’a pas de prise. Si à l’inverse l’objet se montre ’ ‘“’ ‘trop atteint’ ‘”’ ‘, voire détruit – c’est-à-dire s’il devient trop difficile de faire le lien entre l’objet perçu actuellement et l’objet antérieur – ’ ‘la symbolisation devient un équivalent hallucinatoire, un équivalent d’acte effectif, se fixe un point de culpabilité primaire’ ‘ ; la destruction est accomplie’ ‘. La symbolisation est alors vécue comme destructrice et coupable, ce qui enferme le sujet dans ’ ‘l’alternative d’avoir à choisir entre le maintien du lien à l’objet ou l’appropriation de la représentation interne’ ‘ de l’objet’ ‘. Alternative qui désorganise la transitionnalité’ ‘ de la relation’”. Position tenue par R. Roussillon421 en 1995 ; position qu’il met au travail et qu’il reprend dans les ouvrages suivants auxquels nous avons fait référence, qui se complète en 2002, à partir d’une réflexion centrée sur les liens précoces, dans l’affirmation que, lorsque les défenses sont débordées, le sujet a plus tendance, comme il l’a déjà noté - (voir p. 196) - à s’attribuer la cause du mal-être : “ ‘ce qui va dans le sens d’une culpabilité primaire et permet de compléter l’hypothèse de Freud (1925), d’un ’ ‘“’ ‘masochisme primaire’ ‘”’ ‘ en fait ’ ‘réactionnel et post traumatique’ ‘”’ ‘ [...] ’ ‘“’ ‘Le premier mouvement post-traumatique est auto’”.422

Notes
409.

A. Green 1997 - Sur la discrimination et l’indiscrimination affect-représentation in L’affect et sa perversion - R. F. P. 1999 - opus cité - p. 243 

410.

A. Green 1973 - Le discours vivant - opus cité - p. 248 : ’Ce rôle que nous assignons à l’absence est capital dans toute la théorie psychanalytique. C’est l’absence de l’objet qui fait naître à la fois l’affect de déplaisir, la représentation de la satisfaction et de l’objet qui la conditionne. C’est encore lors de cette absence que la tension est l’aiguillon du fantasme . Il n’est pas sans intérêt de faire intervenir ici les notions de seuil et de réponse de l’objet. A cet égard, le rôle de l’environnement, passé sous silence par Freud, négligé par M. Klein , a été au contraire souligné par A. Freud et Winnicott . L’absence temporaire limitée de l’objet qui permet au seuil atteint par la tension de ne pas dépasser l’intolérable, a des conséquences indéniablement structurantes, dans la mesure où cette absence est un facteur d’élaboration du moi.

411.

A. Green 1999 - Sur la discrimination et l’indiscrimination affect-représentation in L’affect et sa perversion - R. F. P. 1999 - opus cité - p. 257

412.

A. Ciccone 1999 - La transmission psychique inconsciente - Dunod - p.59

413.

M. Perron-Borelli 1994 - Fonction du fantasme : élaboration des liens à l’objet in R. F. P.  n° 2 1994 - pp. 533 à 547

414.

A. Green 1966 - Narcissisme de vie, narcissisme de mort - Editions de Minuit - 1982 . Dans A. Green 1973 - Le discours vivant - opus cité : Nous pouvons relever deux conceptions de l’hallucination négative de l’objet dans cet ouvrage, l’une au Chapitre V, Deuxième topique : L’affect et le moi, (l’hallucination négative) - pp. 270 à 276, passage dans lequel elle est décrite en terme de défense organisée contre l’absence de l’objet  qui n’est pas médiatisée dans l’expérience du sujet : ’Là ou devrait apparaître l’image du sujet dans le miroir, rien ne se montre [...] Ce cadre vide évoque un autre vide, le vide de l’Autre [...] Il manque à lui-même, car ce reflet vide est vécu non comme une pure absence mais comme une hallucination d’absence. C’est parce que l’image est recouverte par une hallucination de manque que le sujet cherche, par de-delà cette hallucination, la retrouvaille de sa représentation’. Alors que dans la Postface - L’hallucination négative - (p. 335) ce concept est retravaillé dans un contexte qui sous-entend le modèle historico-génétique de1966, mais s’intéresse plus à son aspect structural: ’Nous nous sommes ainsi refusé à limiter l’hallucination négative à un mécanisme de défense tout au moins dans l’acception restreinte de l’expression [...]La fréquence de ces états corrélatifs de l’activité fantasmatique nous a fait penser que ceux-ci représentent en quelque sorte des processus de réinvestissement non pas de désinvestissements représentatifs mais d’une exclusion de processus d’investissement s où l’hallucination opère [...] Dans une optique structurale nous comprenons l’hallucination négative non pas comme l’absence de représentation, mais comme la représentation de l’absence de représentation, qui se traduit cliniquement par un excédent d’affect, dont l’effet par rapport à son corrélat représentatif peut être comparé à l’effet de l’agressivité lorsque celle-ci est désintriquée d’avec la libido érotique. Formulé théoriquement, ceci revient à dire que l’hallucination négative est le revers dont la réalisation hallucinatoire est l’avers’. En 1977, article paru dans les annexes au Travail du négatif, (A. Green 1993) il intensifie sa position sur la structure constituante de l’hallucination négative, qui ne peut être considérée comme un phénomène pathologique en soi, dans la conception qu’il présente : ’Elle n’est pas l’absence de représentation comme le suggère l’absence de l’image dans le miroir, mais représentation de l’absence de représentation. L’hallucination négative est le concept théorique qui est la pré condition à toute théorie de la représentation, qu’il s’agisse du rêve comme de l’hallucination.

415.

A Green 1993 - Le travail du négatif - opus cité - p. 280 

416.

Cette position théorique refonde la question de l’organisation du primaire et du secondaire, comme le souligne R. Roussillon (Le plaisir et la répétition – 2001 – opus cité – p. 43) et plaide en faveur d’une co-fondation structurale de ces temps organisateurs de l’épigénèse du développement psychique.

417.

A. Green 1999 - Sur la discrimination et l’indiscrimination affect-représentation – in L’affect et sa perversion – R.F.P. n°1 - p. 239

418.

A. Green 1999 - Sur la discrimination et l’indiscrimination affect-représentation - opus cité - p. 239

419.

R. Roussillon 1995 - La métapsychologie des processus et la transitionnalité in R. F. P.1995 - opus cité - p. 1489

420.

S. Freud 1925 - La négation - opus cité - p. 138

421.

R. Roussillon 1995 - La métapsychologie des processus - opus cité - p. 1491

422.

R. Roussillon 2002 - Le transitionnel et l ’indéterminé in Les processus psychiques de la médiation - Collectif dirigé par Bernard Chouvier - Dunod - p. 75