2. L’état des recherches sur la conscience métaphonologique

La dimension métalinguistique et, à travers elle, la conscience métaphonologique semblent offrir à l’élève un soutien non négligeable dans l’apprentissage du « lire-écrire ». La prise en considération de la réalité sonore de la langue permet à l’apprenant de comprendre, plus précisément, le fonctionnement linguistique. Une relation d’influence réciproque entre les capacités métaphonologiques et la découverte du « lire-écrire » est évoquée comme une sorte de déterminant mutuel. Au demeurant, les avis restent très partagés sur la nature de ce lien qui oscille entre causalité ou conséquence. Pourtant, un certain consensus se dessine pour défendre l’importance de cette voie psycholinguistique. Jacqueline Massonet et Marie Françoise Jeanjean concluent, sur la base de leur étude, « ‘qu’un point charnière pour le passage à l’écriture se situerait autour de la prise de conscience de l’aspect phonique de l’écriture ’»116. La prudence exprimée dans leur propos montre combien l’ambiguïté demeure entre apprentissage du « lire-écrire » et métaphonologie, entre une réalité sonore et une réalité graphique.

De notre côté, sans remettre en cause l’intérêt d’une telle orientation, nous exprimons une évidente réserve, non sur les finalités de compréhension, mais sur la mise en pratique de la métaphonologie. Viser une conscience de l’existence des sons dans les mots oralisés s’apparente à un objectif louable à la seule condition que, dans cet exercice, l’élève y voit la présence d’une langue écrite. Autrement dit, les activités destinées à analyser des syllabes et des phonèmes, sans que l’élève ne pense à leur transcription future, pourraient ne pas répondre à l’attente de notre population de recherche, particulièrement sensible en la mise en lettres et en mots d’un message oral, de leur propre langage. Or, la conscience phonique ne dit rien de l’organisation que prendra à l’écrit les syllabes et les phonèmes comme si leur perception auditive suffisait.

Afin de lever le doute sur une possible inadaptation de la métaphonologie au regard des élèves de notre étude, nous optons, tout d’abord, pour la description des actions développées sur la compétence métaphonologique. A partir des recherches entreprises, l’intention consiste à mettre en évidence, dans les exercices de conscience métaphonologique, la présence ou l’absence de relations entre l’oral et l’écrit.011Deux recherches alimentent notre observation sur les activités métaphonologiques. L’étude américaine de Liberman et Shankweiler, l’une des premières sur le sujet, introduit la notion de segmentation syllabique et phonémique. Plus récemment, la recherche française d’Elisabeth Demont complète l’évaluation par d’autres exercices de manipulation.

Notes
116.

MASSONET Jacqueline et JEANJEAN Marie-Françoise, Premiers pas dans l’écrit à l’école maternelle, pp 175-204, in L’enfant apprenti lecteur, sous la direction de Gérard Chauveau, Martine Rémond et Liliane Rogovas-Chauveau, Op. Cit., page 196.