Des oppositions fréquentes se cristallisent autour de l’intérêt de ce concept de syllabe. A-t-elle une place dans la découverte du « lire-écrire »? Ne faut-il pas privilégier le phonème sur la syllabe ? Notre point de vue est de considérer la syllabe comme une entrée en matière, une amorce de la conscience phonographique. A ce titre, elle est utile pour beaucoup d’enfants mais non indispensable dans la mesure où il n’est pas rare de voir des élèves accéder, assez rapidement et directement, à la notion de phonème, élément linguistique fondamental.
Les élèves de grande section et même de moyenne section entrent très aisément dans ce travail sur la syllabe. Cette étape participe à la compréhension du système linguistique, en ce qui concerne la relation entre le mot oralisé (une seule unité de sens) et sa composition sonore (plusieurs unités phonologiques). En effet, il arrive parfois que l’énonciation d’un objet ou de toute autre chose soit satisfaisante sans que l’enfant comprenne que le signifiant intègre différents éléments sonores. Cette absence de segmentation s’observe quelques fois chez les enfants en début de CP alors qu’ils vont aborder l’étude des phonèmes. En écho à ce constat, Savin se positionne nettement: « ‘il n’y pas lieu d’essayer d’enseigner à un enfant qui n’arrive pas à prendre conscience des phonèmes que la lettre s a pour son /s/’ »132.
Ce qui caractérise donc la segmentation syllabique est d’être pensée comme une introduction, un entraînement à l’analyse de la langue orale, moins complexe que ne le serait un travail directement axé sur les phonèmes. Par ailleurs, la conscience phonographique va faire en sorte que cette analyse associe à la fois langue orale et langue écrite et se constitue en élément passerelle au profit, nous le souhaitons, d’un accès facilité au « lire-écrire ».
SAVIN HB, in lire et raisonner de John Downing et Jacques Fijalkow, Op. Cit., page 41