3.3. Prédictions théoriques

Dans le traitement SP, les sujets doivent décider simultanément à chaque période combien d’ECU (Experimental currency Unit) allouer à un bien public. Chaque ECU affecté au bien public procure un rendement de 0.4 ECU à chacun des 4 sujets. Les sujets conservent les ECU qu’ils n’ont pas affecté au bien public. Soit la fonction de gain individuel pour chaque sujet i à chaque période :

g i représente la contribution au bien public du sujet i. Puisque 0.4<1, l’investissement dans le bien public génère une perte monétaire de (1-0.4).

La stratégie dominante d’un agent supposé rationnel est donc de ne pas contribuer au bien public ( soit g i =0 pour tout sujet i={1,..4}). Cependant, le gain agrégé monétaire serait maximisé si chaque sujet choisissait d’affecter toute sa dotation (soit g i =20). Donc, d’après les prédictions théoriques, aucun sujet ne devrait contribuer au financement du bien public.

Encadré II.1 Définition de l’équilibre parfait en sous jeu (Selten, 1965) 
Un équilibre de Nash est parfait en sous jeu si les stratégies des joueurs constituent un équilibre de Nash à chaque sous-jeu.

Dans le traitement MP, les sujets jouent un jeu répété de 10 périodes. A chaque période, le jeu comprend 2 étapes. La première étape est identique à la session sans sanction. Dans la deuxième étape, chaque sujet est informé de la contribution totale au bien public mais également de la contribution individuelle de chacun des autres membres de son groupe. Les sujets ont alors l’opportunité de sanctionner les autres sujets en leur affectant des points de sanction (entre 0 et 10 points). Chaque point que reçoit un sujet réduit son gain issu de la première étape du jeu de 10%. Le sujet qui décide de sanctionner un ou plusieurs autres sujet subit un coût proportionnel au nombre de points imposés. Le tableau 2 illustre la relation entre le nombre de points donnés par un sujet et le coût de sanctionner 22 .

Tableau II.2 : Coût associé aux points de sanction donnés
Points 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Coût des points 0 1 2 4 6 9 12 16 20 25 30

La fonction de gain de chaque joueur i à chaque période dans cette session s’écrit de la façon suivante :

P ik représente le nombre de points que l’agent i assigne à chaque sujet k et K(P ik ) le coût pour l’agent i à assigner ces points.

Résolvons ce jeu par induction à rebours. En dernière étape de chaque période du jeu, les sujets décident de leur sanction envers les autres sujets. Puisque punir est coûteux, le modèle prédit qu’un sujet rationnel et égoïste ne punira jamais. En première étape de chaque période du jeu, les sujets, supposés rationnels s’attendent à ne jamais être sanctionnés en deuxième étape. Par conséquent, ils choisiront de contribuer le moins possible au bien public en première étape tel que g i =0. L’existence de la deuxième étape du jeu ne modifie donc en rien le comportement des sujets en première étape du jeu. Il ne devrait donc pas exister de différence entre les traitements sans sanction et avec sanction monétaire. La combinaison de stratégies qui consiste à ne pas contribuer au bien public et à ne pas sanctionner se répète sur l’ensemble des périodes du jeu répété un nombre fini de fois.

Encadré II.2 Jeux répétés un nombre fini de fois (Gibbons, 1992)
Si un jeu G a un seul équilibre de Nash, alors l’équilibre de Nash est joué à chaque période du jeu G(T) répété un nombre fini T de fois.

Le traitement NP consiste également en un jeu répété de 10 périodes. Comme dans le traitement avec sanction monétaire, le jeu se déroule en deux étapes. La première étape de ce traitement est identique à la première étape du traitement précédent. Dans la deuxième étape, les sujets observent le niveau de contribution de leurs pairs et peuvent leur affecter des points de sanction non monétaire. Contrairement aux points de sanction monétaire, les points de sanction non monétaire n’affectent ni les gains du sujet sanctionné ni ceux du sujet qui sanctionne. Ils indiquent seulement le sentiment de désapprobation que ressent celui qui sanctionne. Soit la fonction de gain de chaque sujet i à chaque période pour cette session :

La fonction de gain dans le traitement avec sanction non monétaire est strictement identique à celle du traitement sans sanction puisque les sanctions non monétaires n’ont aucune influence sur les gains des sujets. Si l’on suppose que les sujets ne cherchent que la maximisation de leurs gains monétaires, le problème de maximisation dans ce traitement est alors le même que dans la session sans sanction. Les agents fournissent l’effort de contribution le plus faible possible qui maximise leurs gains. L’équilibre parfait en sous jeu est le même quel que soit le nombre de points de sanction.

Notes
22.

En notant Pij le nombre de points que le sujet i assigne à un sujet j, le tableau 3 illustre le coût K(Pij ).