4. Efficacité réelle des sanctions : aversion à la baisse des gains et à la désapprobation

4.1. Observations des niveaux de contributions individuels

Nous avons dans un premier temps étudié l’impact des sanctions monétaires et non monétaires sur le niveau de contribution des sujets. Si les sujets étaient uniquement motivés par leurs gains pécuniaires, on ne devrait pas observer de différence entre les traitements avec et sans sanction. Contrairement aux prédictions théoriques, on observe que les sanctions monétaires ont un effet positif sur le niveau de contribution des sujets. Ce résultat confirme le résultat de Fehr et Gächter (2000). On observe également que les sanctions non monétaires augmentent le niveau de contribution des sujets.

RESULTAT 1 : lorsque les agents ont l’opportunité d’affecter des points de sanction monétaire aux autres membres du groupe, alors le niveau des contributions augmente fortement.

Le tableau 3 ci-dessous présente les niveaux moyens de contribution dans la session MP. Dans les colonnes 2 à 3 apparaissent les niveaux des contributions individuelles moyennes des expériences menées à Purdue pour chacune des trois sessions (SP, MP et de nouveau SP). Les colonnes 4 à 6 donnent les contributions individuelles moyennes des expériences conduites au GATE. Le tableau 4 reporte les contributions individuelles moyennes en dernière période de chaque session (voir annexe B).

Tableau II.3 : contributions moyenne dans les sessions avec sanctions monétaires
  Sessions avec traitement MP (Purdue) Sessions avec traitement MP (GATE)
Groupes Sans sanction
Périodes 1-10
Sanctions monétaires
Périodes 11-20
Sans sanction
Périodes 21-30
Sans sanction
Périodes 1-10
Sanctions monétaires
Périodes 11-20
Sans sanction
Périodes 21-30
1
4.20 2.73 1.50 6.63 18.83 10.63
(3.74) (2.69) (2.12) (4.72) (2.83) (7.16)
2
7.15 7.33 4.28 5.33 2.33 1.35
(6.29) (4.69) (4.66) (4.96) (3.18) (1.59)
3
9.68 15.89 7.05 5.50 12.68 5.25
(8.01) (7.41) (8.78) (4.62) (3.45) (3.73)
4
6.00 19.05 3.85 6.05 6.73 4.33
(6.14) (3.19) (5.63) (6.30) (6.25) (5.42)
5
4.20 9.28 0.75 7.20 9.48 6.63
(5.76) (2.16) (1.98) (4.97) (4.34) (4.05)
6
3.05 16.35 7.09 7.35 13.03 5.44
(3.37) (5.62) (5.74) (4.82) (6.38) (6.13)
Moyenne 5.71 11.77 4.09 6.34 10.51 5.60
  (5.55) (4.29) (4.81) (5.06) (4.40) (4.68)
Note  : Les écarts types sont en parenthèse
Tableau II.4 : contributions moyenne en dernière période dans les sessions avec sanctions monétaires
  Sessions avec traitement MP (Purdue) Sessions avec traitement MP (GATE)
Groupes Sans sanctions
Période 10
Sanctions
monétaires
Période 20
Sans sanction
Période 30
Sans sanctions
Période 10
Sanctions monétaires
Période 20
Sans sanction
Période 30
1
2.25 0.75 0.5 3 20 10
(1.7) (0.5) (1) (2.5) (0) (10.4)
2
3.75 8 1.5 1.75 0.5 0.5
(4.7) (2.4) (2.4) (2) (0.5) (0.5)
3
10 20 5 2.5 15.75 5
(8.1) (0) (10) (2) (3.4) (5.7)
4
3 20 0.75 6.75 6.5 1.5
(2.4) (0) (0.9) (9) (9.2) (2.3)
5
5 9.5 0 3.75 9.75 5.5
(10) (0.5) (0) (2.5) (5) (4.4)
6
1 15 2.5 8.5 19 2.5
(1.4) (10) (3.3) (6.4) (1.4) (2.8)
Moyenne 4.16 12.2 1.7 4.375 11.91 4.166
  (4.71) (2.23) (2.93) (4.06) (3.25) (4.35)
Note  : les écarts types sont en parenthèse

Le graphique 1 montre l’évolution dans le temps des contributions des groupes pour l’ensemble des sessions.

Graphique II.1 : contribution totale des groupes pour les sessions avec sanctions monétaires (données américaines et françaises cumulées)

Le niveau moyen de contribution de groupe pour les données française et américaines cumulées est environ de 24 ECU sur l’ensemble des périodes (1) à (10) et de 44 ECU sur l’ensemble des périodes (11) à (20). L’opportunité d’attribuer des points de sanction monétaire accroît de façon significative le niveau moyen de contribution. Dans 9 groupes sur 12 le niveau de contribution augmente lorsque les sujets ont l’opportunité de sanctionner les autres membres de leur groupe. D’après le test non paramétrique Wilcoxon signed rank, les niveaux de contribution pour les périodes (11) à (20) sont significativement plus élevés que pour les périodes (1) à (10), (p<0.05). Si l’on compare maintenant le traitement MP (périodes 11-20) aux deux traitements SP (périodes 1-10 et 21-30), il apparaît que les sujets contribuent deux fois plus en traitement MP qu’en SP. Cette différence est significative (p<0.05).

L’effet des sanctions monétaires est immédiat. Ainsi, le niveau moyen de contribution de groupe augmente significativement entre les périodes (10) et (11), (p<0.01) pour atteindre un niveau similaire à celui de la période (1), [(11)=(1), p>0.1]. Il convient toutefois d’être prudent quant à l’interprétation de ce résultat. En effet, il faut tenir compte de l’effet « redémarrage du jeu », selon les termes employés par Andreoni (1988) 23 . En dernière période du traitement MP (période 20), la moitié des groupes contribue 15 ECU ou plus au bien public. La comparaison des périodes (10) et (20) montre que les niveaux de contribution en période (20) sont significativement plus élevés qu’en période (10) (p<0.01).

On observe que le niveau de contribution chute de façon significative lorsque l’opportunité de sanction monétaire disparaît, [(21-30)<(11-20), p<0.01]. Les niveaux de contribution pour les périodes (21) à (30) ne sont pas significativement différents des niveaux de contribution pour les périodes (1) à (10), [(21-30)=(1-10), p>0.05]. Lorsque les sanctions disparaissent, les sujets adoptent de nouveau un comportement non coopératif. Donc l’effet des sanctions monétaires ne semble pas être persistant dans le temps. Ce résultat met en évidence la fragilité de la coopération. En effet, il apparaît que les agents sont potentiellement coopérateurs et que cette coopération dépend fortement de l’environnement dans lequel évoluent les sujets.

Existe-il des différences significatives entre les observations françaises (GATE) et américaines (Purdue) pour les sessions avec traitement MP ? Les graphiques 2 et 3 montrent l’évolution dans le temps des contributions des groupes ayant participé à l’expérimentation à Purdue et au GATE.

Graphique II.2 : contribution totale des groupes pour les sessions avec sanctions monétaires (Purdue)
Graphique II.3 : contribution totale des groupes pour les sessions avec sanctions monétaires (GATE)

La comparaison des niveaux moyens de contribution de groupe sur l’ensemble des périodes (1) à (10) ne montre pas de différence significative entre la France et les Etats-Unis (d’après le test de Wilcoxon Mann-Whitney [(1-10,F)=(1-10,US), p>0.1]). Les comparaisons entre pays sur les périodes (11) à (20) et (21) à (30) donnent des résultats identiques [(11-20,F)=(11-20,US), p>0.1 ; (21-30, F)=(21-30, US), p>0.1]. Il n’apparaît pas non plus de différence significative entre la France et les Etats-Unis si l’on considère uniquement la première période du jeu [(1,F)=(1,US), p>0.1] ou les dernières périodes des trois traitements [(10,F)=(10,US), p>0.1 ; (20,F)=(20,US), p>0.1 ; (30,F)=(30,US), p>0.1]. Il n’existe donc pas de différences significatives entre les deux pays pour le traitement MP.

Considérons maintenant la régression suivante :

(4)

où représente la période (de 1 à 30), est la contribution totale du groupe j à la période t, et une variable dummy en cas d’opportunité de sanctionner.

est le coefficient qui mesure l’évolution du niveau des contributions dans le temps sur l’ensemble des périodes. On devrait observer un coefficient

négatif si le niveau des contributions diminue dans le temps comme cela a déjà été observé dans un certain nombre d’études expérimentales de jeu de bien public répété sur plusieurs périodes. mesure l’effet des sanctions sur le niveau de contribution, indépendamment de l’effet trend. Un coefficient positif traduit le fait que le niveau des contributions augmente en présence de sanction. Enfin, le coefficient mesure le trend du niveau des contributions individuelles durant les 10 périodes du traitement avec opportunité de sanction. Un coefficient significativement positif signifie que la diminution du niveau des contributions individuelles (si<0) est plus modérée dans le traitement avec sanction que dans les traitements sans sanction [périodes (1-10) et (21-30)]. Si , alors le trend des contributions dans le traitement avec sanction est positif. L’estimation de cette régression pour le traitement avec sanctions monétaires est donnée dans le tableau 5 (données cumulées) et dans le tableau 6 (données non cumulées).

Tableau II.5: Régression sur le niveau des contributions (données françaises et américaines cumulées)
Données cumulées Variable expliquée :
Contribution totale du groupe
  MP NP NS
Constante (0)
26.854*** 31.153*** 9.294***
(2.058) (1.842) (0.348)
       
(1) trend sur l’ensemble des périodes
-0.317*** -0.640*** -0.270***
(0.110) (0.099) (0.021)
       
(2) effet des sanctions
11.638*** 18.057*** 1.688***
(3.742) (3.344) (0.644)
       
(3) trend sur les périodes 21-30
1.998*** -0.620 -0.391***
(0.575) (0.515) (0.107)
       
R2 0.292 0.263 0.424
F 48.759 38.699 72.127
Observations 359 330 298
***significativité au seuil de 1% , ** : significativité au seuil de 5%, * : significativité au seuil de 10% . Les écarts types sont entre parenthèses
Tableau II.6: Régression sur le niveau des contributions (données non cumulées)
Données non cumulées Variable expliquée : Contribution totale du groupe
  Purdue GATE
  MP NP MP NP
Constante (0)
26.191*** 28.007*** 27.562*** 34.927***
(2.937) (2.761) (2.824) (2.000)
         
(1) trend sur l’ensemble des périodes
-0.466*** -0.431*** -0.172 -0.880***
(0.157) (0.148) (0.151) (0.107)
         
(2) effet des sanctions
15.725*** 20.451*** 7.594* 15.184***
(5.348) (5.012) (5.128) (3.632)
         
(3) trend sur les périodes 21-30 2.261***
(0.821)
0.109
(0.772)
1.736**
(0.790)
-1.500***
(0.560)
         
R2 0.389 0.289 0.203 0.405
F Statistic 37.120 23.802 14.965 33.082
Observations 179 180 180 150
***significativité au seuil de 1% , ** : significativité au seuil de 5%, * : significativité au seuil de 10% . Les écarts types sont entre parenthèses

Considérons dans un premier temps uniquement les estimations pour le traitement MP. La constante est positive et significative. Cela montre que le niveau initial des contributions individuelles est non nul. Le coefficient est significativement négatif pour les données cumulées (Purdue et GATE), ce qui illustre la décroissance des contributions dans le temps généralement observée dans les expériences menées sur des jeux de biens publics répétés. Le coefficient est significativement positif, ce qui traduit que le niveau des contributions individuelles augmente en présence des sanctions monétaires. Le coefficient est également significativement positif pour les sessions MP. Il indique que le niveau de contribution augmente entre les périodes 11-20 avec possibilité de sanction monétaire.

L’étude du traitement MP a donc mis en évidence que les résultats observés dans la session avec sanction monétaire sont semblables à ceux obtenus par Fehr et Gachter (2000). Ils montrent que les sujets s’engagent dans des activités de sanctions coûteuses et que l’opportunité de sanction amène les agents à augmenter leur effort de contribution. Une explication possible des niveaux de contribution élevés est que les sujets souhaitent éviter les conséquences monétaires des sanctions (effet direct des sanctions). Cette explication est-elle la seule explication du comportement de contribution des sujets ? Une façon de vérifier s’il existe ou pas d’autres explications consiste à étudier le traitement NP. En effet, si l’effet direct des sanctions est la seule explication possible pour expliquer le niveau élevé des contributions individuelles dans les traitements avec sanction, on ne devrait alors pas observer de différences significatives en terme de contribution dans les traitements NP et SP.

Contrairement aux prédictions théoriques, on observe que les sanctions non monétaires ont également un effet positif sur le niveau des contributions. Donc l’effet direct des sanctions ne permet pas à lui seul d’expliquer les niveaux de contribution observés. La possibilité pour les agents d’exprimer leur désapprobation semble jouer également un rôle majeur dans le niveau élevé des contributions (effet indirect des sanctions). Toutefois, les niveaux de contributions observés dans les sessions NP (périodes 10-20) sont significativement plus faibles que dans les sessions MP (périodes 10-20). Donc l’effet indirect des sanctions n’est pas non plus la seule explication possible.

RESULTAT 2 : Les sanctions non monétaires ont également un effet positif sur les niveaux de contribution. Contrairement aux sanctions monétaires, l’effet des sanctions non monétaires s’atténue au cours du temps.

Les tableaux 7 et 8 rapportent les niveaux de contribution individuelle moyenne pour la session avec sanction non monétaire.

Tableau II.7 : Niveaux de contribution moyenne dans les sessions avec traitement NP
  Sessions avec traitement NP (Purdue)
(condition partenaire)
Sessions avec traitement NP (GATE)
(condition partenaire)
Groupes Sans sanction
Périodes 1-10
Sanctions non monétaires
Périodes 11-20
Sans sanction
Périodes 21-30
Sans sanction
Périodes 1-10
Sanctions non monétaires
Périodes 11-20
Sans sanction
Périodes 21-30
1
3.98 10.90 3.30 7.08 7.70 5.33
(4.37) (4.72) (3.35) (6.45) (7.14) (6.20)
2
5.25 3.50 1.38 8.60 6.60 4.80
(5.91) (3.75) (2.19) (5.09) (5.48) (5.07)
3
6.05 7.25 5.68 7.08 5.63 3.30
(4.68) (4.07) (6.05) (6.01) (5.52) (3.61)
4
3.85 17.68 3.55 6.20 5.83 2.10
(4.12) (5.15) (6.26) (4.78) (3.67) (2.48)
5
5.95 10.15 2.30 6.38 9.55 2.35
(5.53) (8.51) (3.81) (4.68) (4.22) (2.59)
6
11.60 13.90 4.79      
(6.49) (6.98) (7.84)      
Moyenne 6.11 10.56 3.50 7.07 7.06 3.58
Ecart type (5.81) (7.30) (6.06) (5.46) (4.17) (4.39)
Les écarts types sont en parenthèse
Tableau II.8 : Niveaux de contribution moyenne de dernière période dans les sessions avec traitement NP
  Sessions avec traitement NP (Purdue)
(condition partenaire)
Sessions avec traitement NP (GATE)
(condition partenaire)
Groupes Sans sanction
Période 10
Sanctions non monétaires
Période 20
Sans sanction
Période 30
Sans sanction
Période 10
Sanctions non monétaires
Périodes 20
Sans sanction
Période 30
1
0.5 11 0.25 1.75 0.25 6.25
(1) (8.7) (0.5) (2.8) (0.5) (9.8)
2
0.75 5.5 0.25 3 4.74 0.75
(0.9) (5.2) (0.5) (6) (4.4) (1.5)
3
1.75 6 7.75 3.25 0 0
(0.9) (6.4) (8.5) (3.9) (0) (0)
4
0 15 0 3 3.25 0.25
(0) (10) (0) (2.9) (3.4) (0.5)
5
8.25 8 0.5 1.5 6.25 0.5
(9.1) (9.8) (1) (1.9) (6.6) (1)
6
9.25 13 7.5      
(8.7) (8.8) (9.2)      
Moyenne 3.41 9.75 2.708 2.5 2.9 1.35
Ecart type (3.43) (8.15) (3.28) (3.5) (2.98) (2.56)
Les écarts types sont en parenthèse

Le graphique 4 décrit l’évolution des contributions de groupe dans les sessions cumulées (France et Etats-Unis) avec traitement NP en condition partenaire.

Graphique II.4 : Niveaux de contribution totale du groupe dans les sessions avec sanctions non monétaires en condition partenaire (données américaines et françaises cumulées)

La contribution moyenne du groupe est environ de 26 ECU sur l’ensemble des périodes (1) à (10). Lorsque les sujets ont l’opportunité de sanctionner leurs pairs par l’attribution de points de sanction non monétaire, le niveau moyen de contribution du groupe est de 35.24 ECU. La contribution moyenne du groupe est significativement plus élevée lorsque les agents ont l’opportunité d’assigner à leurs pairs des points de sanction non monétaires, d’après le test Wilcoxon signed rank [(1-10, 21-30) < (11-20), p<0.01]. L’effet des sanctions non monétaires est immédiat et accroît significativement le niveau des contributions entre les périodes (10) et (11) (p<0.01). On observe que le niveau de contribution à la période (11) n’est pas significativement différent de celui observé en première période du jeu [(11)=(1), p>0.1].

Comme dans les sessions avec sanctions monétaires, l’effet des sanctions non monétaires n’est pas persistant dans le temps. Ainsi, lorsque les sujets n’ont plus la possibilité de sanctionner les autres membres de leur groupe, le niveau moyen de contribution du groupe diminue. Le niveau de contribution est significativement plus élevé dans les périodes (11) à (20) que dans les périodes (21) à (30) [(21-30)<(11-20), p<0.001]. En moyenne, les sujets contribuent 14.16 ECU sur l’ensemble des périodes (21) à (30).

Les graphiques 5 et 6 décrivent l’évolution des contributions de groupe dans les sessions NP (partenaire) conduites respectivement à Purdue et au GATE.

Graphique II.5 : Niveaux de contribution totale du groupe dans les sessions avec sanction non monétaires en condition partenaire (Purdue)
Graphique II.6 : Niveaux de contribution de groupe dans les sessions avec sanction non monétaires en condition partenaire (GATE)

Existe-t-il des différences significatives pour les sessions en traitement NP entre les observations américaines (GATE) et françaises (Purdue)? Contrairement au traitement MP, il existe des différences significatives sur les données américaines et françaises dans le traitement NP. Les niveaux de contribution dans les périodes (1) à (10) sont significativement plus élevés en France qu’aux Etats-Unis, d’après le test de Wilcoxon Mann-Whitney [(1-10,F)>(1-10,US), p<0.05]. Ces différences sont également significatives si l’on considère uniquement la première période [(1,F)>(1,US), p<0.05]. Si l’on compare maintenant les niveaux de contribution dans les périodes (11) à (20), il apparaît qu’ils sont significativement plus élevés aux Etats-Unis qu’en France [(11-20, F)<(11-20,US), p<0.05]. La comparaison entre les Etats-Unis et la France montre que, pour la période (20), le niveau de contribution est significativement plus élevé aux Etats-Unis [(20,F)<(20,US), p<0.01]. La comparaison des deux pays pour les périodes (21) à (30) ne fait pas apparaître de différences significatives entre les pays [(21-30, F)=(21-30,US), p>0.05]. Il n’y a pas non plus de différence significative en comparant les niveaux de contribution en période 30 [(30,F)=(30,US), p>0.05].

Les niveaux de contribution sont-ils différents entre les sessions avec sanction monétaires et sanctions non monétaires ? Les niveaux moyens de contribution de groupe sur l’ensemble des périodes (1) à (10) avec sanctions monétaires et avec sanctions non monétaires sont respectivement 6.025 ECU et 6.54 ECU. D’après le test de Wilcoxon Man Whitney, il n’apparaît pas de différences significatives (quel que soit le seuil de significativité) entre ces niveaux moyens de contribution (z=0.246). Les niveaux moyens de contribution pour les périodes (11) à (20) avec sanctions monétaires et avec sanctions non monétaires sont respectivement 11.11 et 8.97 ECU. Il n’y a pas non plus de différence significative (quel que soit le seuil de significativité) entre le niveau de contribution moyen dans les périodes (11) à (20) des sessions avec traitement MP et traitement NP (z=-0.89). On n’observe pas de différences significatives entre les sessions avec traitement MP et avec traitement NP sur les niveaux de contribution des périodes (21) à (30), (z=-0.739).

Les estimations de la régression (4) pour les sessions NP et NS sont données par les tableaux 5 et 6. Comme dans la session avec sanction monétaire, la constante est positive et significative. Cela traduit le fait que le niveau initial des contributions est non nul. Le coefficient est également significativement négatif pour les données cumulées, ce qui illustre la décroissance des contributions dans le temps. Le coefficient est significativement positif pour l’ensemble des sessions avec sanctions non monétaires, ce qui signifie que les sanctions non monétaires ont un effet positif sur le niveau des contributions moyennes. Contrairement aux sessions MP, dans les sessions NP, le coefficient est négatif pour l’ensemble des sessions. Il indique que l’effet des sanctions non monétaires sur le niveau de coopération n’est pas aussi durable que celui de sanctions monétaires. Ainsi, l’effet des sanctions non monétaires s’atténue dans le temps.

RESULTAT 3 : le niveau de contribution est plus important dans les sessions NP que dans les sessions NS.

Le graphique 7 montre l’évolution des contributions totales des groupes pour les sessions NS.

Graphique II.7 : Niveaux de contribution totale du groupe dans les sessions avec sanctions non monétaires en condition étranger (Purdue)

L’intérêt de faire jouer les sujets en condition partenaire lors des 10 premières périodes est de pouvoir facilement comparer les comportements de contribution aux sessions NP et de vérifier qu’ils sont identiques. L’inconvénient de ce choix est qu’il rend impossible une comparaison entre les niveaux de contribution lors des périodes 1 à 10 avec les autres périodes du jeu.

Le graphique 8 compare l’évolution des contributions moyennes sur les périodes 11 à 20 pour les trois traitements : MP, NP et NS.

Graphique II.8 : Niveaux moyens de contribution dans les traitements MP,NP et NS

Le niveau moyen des contributions individuelles sur l’ensemble des périodes 1 à 20 est de 8.97 ECU en traitement NP et de 4.97 ECU en traitement NS. D’après le test non paramétrique Wilcoxon Man Whitney, les niveaux de contribution moyenne sur les périodes 11 à 20 sont significativement plus élevés dans le traitement NP que dans le traitement NS (z=1.776, p<.05). La comparaison des sessions NP et NS révèle donc davantage de coopération sous la condition partenaire que sous la condition étranger.

En conclusion de cette sous-section, il apparaît que les sanctions monétaires et non monétaires ont un impact positif sur le niveau de contribution des sujets. Les effets direct et indirect des sanctions expliquent les niveaux de contribution observés. Ainsi les sujets contribuent davantage afin de ne pas subir les conséquences monétaires des sanctions mais également afin d’éviter la désapprobation de leurs pairs. On observe par ailleurs que l’effet des sanctions non monétaires est toutefois moins persistant dans le temps.

Notes
23.

Andreoni (1988) s’est intéressé à l’impact du changement de session dans un jeu et met en évidence un « effet stratégique », positif sur le niveau de coopération. Croson (1996) obtient des résultats similaires.