On considère dans cette sous-section le cas où la pénalité Y reçue par un passager clandestin est indépendante du nombre de sanctionneurs 50 . Le jeu d’ostracisme présenté dans le chapitre précédent est un exemple d’une telle sanction puisqu’il suffit qu’un seul joueur décide d’exclure un autre joueur pour que la décision soit effective. Un problème de passager clandestin affecte alors les décisions des sanctions d’exclusion. En effet, sanctionner les passagers clandestins est efficient au sens de Pareto puisque les inégalités de gains avec les passagers clandestins sont alors réduites. Cependant, comme les sanctions sont indépendantes du nombre de sanctionneurs, chaque joueur espère que les autres excluent les passagers clandestins à sa place. Chaque joueur pris individuellement a donc intérêt à adopter un comportement de passager clandestin, c’est à dire à ne pas sanctionner. En conséquence, personne ne devrait coopérer en première étape puisque personne ne sanctionne en deuxième étape.
Proposition 4 : lorsque les sanctions sont indépendantes du nombre de sanctionneurs, les menaces de punition ne sont pas crédibles.
Preuve :réécrivons la condition (8) sous l’hypothèse d’indépendance des sanctions vis à vis du nombre de sanctionneurs :
Il apparaît clairement que cette condition n’est jamais vérifiée.
Donc la coopération est soutenue si les agents sont suffisamment sensibles à l’inégalité des gains relatifs et s’ils désirent réduire cette dissonance de gains en punissant les autres joueurs. En effet, même s’il est coûteux de punir les autres agents, les sujets peuvent gagner en utilité à punir les passagers clandestins. En comparant les cas avec et sans opportunité de sanctionner, il est aisé de voir que la coopération est considérablement améliorée s’il existe une opportunité de sanctionner les passagers clandestins. Sans punition, aucun joueur ne coopérera. A l’inverse, avec punition les mêmes joueurs coopéreront.
Coleman, J. (1990) distingue un comportement de sanction incrémental d’un comportement de sanction héroïque. Un comportement de sanction incrémental suppose un coût de sanctionner faible et l’effet d’une sanction également faible mais qui s’additionne à l’effet des sanctions imposées par les autres sanctionneurs. Au contraire, dans le cas des comportements de sanction héroïque, l’effet total de la sanction émane d’un seul acteur (par exemple, la fable d’Aesop’s, “The mice in council”). La différence principale entre ces deux types de sanction repose sur l’amplitude des sanctions.