ANNEXE III.B1

Encadré III.B1.théorème (Fudenberg et Tirole (1991)
S’il existe dans un sous jeu une multiplicité d’équilibre, alors il est désormais possible de punir un joueur qui a dévié à l’étape précédente en choisissant l’équilibre pareto dominé. Au contraire l’équilibre préféré est choisi s’il ne dévie pas.

Considérons ici une version simplifiée du jeu d’ostracisme avec uniquement deux sujets qui prennent trois décisions successives : dans un premier temps, les deux sujets choisissent de contribuer (C) ou de ne pas contribuer (NC) à un premier projet commun (gi,1=y1 ou gi,1=0, avec y1=20). Dans un deuxième temps, chaque sujet observe la contribution individuelle de l’autre sujet au projet commun et peut décider de sanctionner ou pas l’autre sujet en l’excluant. Dans une troisième étape, seuls les sujets non exclus peuvent participer à un deuxième projet. Les sujets non exclus décident alors de contribuer (C) ou de ne pas contribuer (NC) à un deuxième projet commun (gi,2=y1 ou gi,2=0, avec y2=20).

On cherche à montrer que la solution de coopération (C1,C2) qui n’est pas à priori un équilibre de Nash peut être atteinte en première étape du fait de l’existence de deux équilibres de Nash au deuxième jeu.Afin de résoudre le jeu, procédons par récurrence à rebours. En dernière période, les agents non exclus jouent de façon simultanée un jeu de contribution.

Jeu de troisième étape
    Joueur 1
    C1 NC1
Joueur 2
C1 1,1+32, 2,1+32, 1,1+16, 2,1+36
NC1 1,1+36, 2,1+16 1,1+20, 2,1+20

Où i,1 représente le gain du sujet 1 issu du premier projet. Donc la stratégie dominante est de ne pas contribuer au deuxième projet. Chaque sujet garde alors sa dotation initiale y2=20 qui s’ajoute à ses gains de première étape. En deuxième étape du jeu, les sujets décident de façon simultanée de sanctionner (S) ou de ne pas sanctionner (NS) l’autre sujet. Soit la représentation du jeu sous forme stratégique :

Jeu de deuxième étape
    Joueur 1
    S NS
Joueur 2
S 1,1,2,1 1,1+20, 2,1
NS 1,1, 2,1+20 1,1+20, 2,1+20

Il existe au moins deux équilibres de Nash en stratégie pure correspondant au sous jeu de deuxième étape du jeu : (S1,S2) et (NS1,NS2). L’équilibre (NS1,NS2) domine (S1,S2) (au sens de Pareto). Soient les gains associés à chacun des équilibres: pi(NS1,NS2)=i,1+20>pi(S,S)= i,1i=1,2. Puisqu’il existe deux équilibres de Nash dans le jeu de deuxième étape, les sujets peuvent anticiper que les différentes issues du premier jeu seront suivies par différents équilibres en sous jeu dans la deuxième étape (cf van Damme, 1991, Gibbons, 1992). Supposons que chaque sujet i, i=1,2, anticipe que l’autre sujet joue Sj en deuxième étape si le sujet i joue NCi et qu’au contraire que j joue NSj en deuxième étape si le sujet i joue Ci au premier jeu. En notant b* la stratégie d’équilibre pour les deux sujets, on peut écrire :

 En première étape, les sujets doivent décider de leur effort de contribution au premier projet. On peut alors représenter le jeu de première étape de la façon suivante :

Jeu de première étape
    Joueur 1
    C2 NC2
Joueur 2
C2 52,52 36,36
NC2 36,36 20,20

Il existe un seul équilibre de Nash : (C1,C2). Donc la coopération peut être atteinte du fait de l’existence de multiples équilibres parfaits en sous de deuxième étape du jeu. On vérifie que la meilleure déviation possible pour un sujet consiste à sujet NC en première étape et S en deuxième étape. Soit les gains pour le sujet 1 :

Alors que la stratégie d’équilibre conduit à :

Donc la stratégie b1* est la meilleure réponse à b2* dans un jeu séquentiel à deux étapes avec multiplicité d’équilibre en deuxième étape. Par symétrie, le même argument tient pour le sujet 2. Il est donc possible d’atteindre l’issue (C1,C2) en première étape du fait de la menace qui pèse que l’équilibre Pareto dominé soit joué en deuxième étape au lieu de l’équilibre Pareto dominant. Donc la menace d’exclusion est une menace crédible pour les sujets puisqu’elle n’est pas directement coûteuse pour ceux qui l’applique. La coopération peut alors être soutenue en première étape.