Etude du seuil fréquentiel sous-tendant l’identification d’images

1- Justification de l’étude

Il est généralement admis que la plupart des défauts oculaires qui affectent l’acuité visuelle ont également un impact sur la fonction de sensibilité au contraste (Arden, 1978) et donc, sur la vision spatiale. En limitant fortement le pouvoir de résolution, la dégénérescence maculaire liée à l’âge prive le patient des détails de l’image, véhiculés par les hautes fréquences spatiales. Il est ainsi possible d’envisager par exemple que, même si le pic de sensibilité se maintient dans les fréquences intermédiaires, la sensibilité au contraste diminue de façon “ anormalement ” drastique dans les HFS.

D’autre part, comprendre l’impact de ce flou sur une activité particulière permet de mieux appréhender les performances des patients atteints de basse vision à cette tâche. La lecture constitue l’activité visuelle la plus communément étudiée, les stimulus alphanumériques présentant des caractéristiques constitutives fondamentales sur lesquelles s’appuie la démarche expérimentale (géométrie, symétrie, standardisation et calibration). Afin d’étudier le rôle des mécanismes fréquentiels sélectifs intervenant dans cette activité, Legge, Pelli et collaborateurs (1985) ont déterminé la largeur de bande minimale (ou critique) qui permet une lecture optimale, en filtrant le texte proposé. Les résultats montrent que le taux de lecture augmente avec l’augmentation de la largeur de bande jusqu’à la valeur critique de 2 cycles / caractère, au-delà de laquelle le taux de lecture optimal se stabilise. Notons que cette largeur de bande critique est indépendante de la taille des caractères (Legge, Pelli et al., 1985). Selon ces auteurs, lorsque les caractères sont filtrés en passe-bas à une largeur de bande de 2 cycles / caractère 28 , l’information spectrale relative au caractère est contenue dans une largeur de bande d’une octave, entre 1 cycle / caractère (fréquence fondamentale) et 2 cycles / caractère. L’information disponible dans cette largeur de bande permet la lecture. Puisqu’il est généralement admis que les canaux fréquentiels visuels ont une largeur de bande d’environ une octave, Legge, Pelli et collaborateurs (1985) suggèrent qu’un seul canal fréquentiel est suffisant pour lire.

En ce qui concerne les formes complexes, de nombreuses études (Parker et al., 1992 ; Schyns & Oliva, 1994) ont mis en évidence une asymétrie temporelle de prise d’information en faveur des basses fréquences spatiales d’un signal naturel. Cette dominance des BFS explique en partie notre capacité à reconnaître des formes, même dans des conditions dégradées par une contrainte externe (diminution de la luminance, brouillard…) ou interne (déficience visuelle).

Cependant, la littérature témoigne d’une grande variabilité en ce qui concerne le poids relatif des différentes gammes de fréquences spatiales impliquées dans une tâche de reconnaissance de formes. La reconnaissance ou l’identification d’objets ou de formes ne semble ainsi pas reposer sur une unique gamme de fréquences mais dépendre des informations disponibles et de la demande visuelle.

Notes
28.

Cette notion de cycles / caractère réfère au nombre de cycles d’un réseau sinusoïdal contenu dans un caractère dont la taille est spécifiée par l’espacement entre les centres d’une lettre à l’autre. Cette notation est indépendante de la distance d’observation. Elle est centrée sur l’objet plutôt que sur l’image rétinienne.