CHAPITRE 2
Les pauses

1. REMARQUES PRÉLIMINAIRES

La définition de la pause au moyen d’une formulation aussi succincte que « temps d’arrêt dans les paroles, le discours » (Robert 1979: 1381) peut donner l’impression qu’il s’agit d’un concept simple. Étant donné qu’un « arrêt » comporte la « fin ou interruption d’une activité, d’un processus » (Robert 1979: 103), une perspective possible sur les pauses consiste à ne les considérer que comme des vides dans la chaîne parlée. Une telle assimilation des pauses aux arrêts de l’activité langagière donne à penser qu’elles n’ont guère d’intérêt aux fins de l’analyse linguistique, par rapport aux éléments du discours qui ont une fonction grammaticale ou sémantique évidente. Toutefois, la simplicité apparente de la définition citée ci-dessus est trompeuse, en ce sens que la formulation ne rend compte ni des optiques différentes dans lesquelles les pauses peuvent être considérées ni des façons différentes dont elles peuvent être identifiées et décrites.

L’étude des pauses peut se baser soit sur leurs caractéristiques objectives (par ex., durée) soit sur la perception de l’auditeur. Les deux perspectives ne sont pas en réalité totalement distinctes, en ce sens que l’audibilité d’une pause dépend dans une certaine mesure de sa longueur et de son caractère voisé ou non voisé. Toutefois, la perception des pauses dépend également des attentes de l’auditeur, créées entre autres par le contexte syntaxique (voir section 4 du présent chapitre). Pour cette raison, elle s’évalue généralement au moyen d’un critère « consensuel » ; ainsi, un « blanc » est considéré comme pause si un certain pourcentage d’un groupe d’auditeurs-évaluateurs (50 %, voire 75 %) l’identifient comme telle (Drommel 1980: 229 ; voir section 4 du présent chapitre).

La technique d’identification des pauses reflète généralement les priorités de l’étude. Par exemple, l’évaluation objective de la fréquence, de la durée et de la distribution des pauses permet de les examiner en tant qu’indices de l’aisance dans la production du discours (voir ch. 1, section 4.3). Ces données permettent également d’étudier le rôle des pauses, en tant que phases de planification du discours, dans les processus d’encodage linguistique (voir section 5.1 du présent chapitre). En revanche, il est approprié d’évaluer l’impact stylistique des pauses, ou les processus de décodage du langage, à travers la perception des auditeurs (voir section 5.2 du présent chapitre).