7. Conclusion

Aux fins de la recherche sur les pauses en interprétation de conférence, décrite dans la Deuxième Partie de la thèse, l’examen de la littérature spécialisée en « pausologie » suggère plusieurs observations.

Premièrement, malgré la variété des études sur les pauses, il s’agit d’un thème relativement marginal de la linguistique. Selon R. Griffiths (1991), ces études n’ont représenté pendant les années 70 et 80 qu’un champ d’exploration limité.

Deuxièmement, le statut des pauses est controversé, en ce sens qu’elles sont considérées tantôt comme pertinentes à l’encodage linguistique, tantôt comme utiles aux fins du décodage, tantôt dans les deux optiques. Les différents classements qui cherchent à différencier les hésitations, par rapport à d’autres pauses, utilisent une variété de traits distinctifs des pauses (position, durée, caractère vide ou plein). Toutefois, il n’y a pas de consensus à cet égard.

Troisièmement, le statut des pauses pleines est un autre point controversé. Certains (par ex., Drommel 1980, Duez 1982) les considèrent comme des hésitations ; d’autres (F. Grosjean & A. Deschamps 1973, 1975) les incluent dans le comptage des syllabes qui sert à calculer la vitesse d’articulation.

Quatrièmement, il paraît approprié que les études des pauses considèrent le degré de formalité du contexte ou des circonstances.

Enfin, la recherche sur les pauses peut utiliser différentes approches:

  1. l’optique de l’étude peut être, d’une part, descriptive/pédagogique (analyse quantitative et/ou distributionnelle) ou, d’autre part, psycholinguistique (hypothèses sur les processus d’encodage, basées sur les « variables temporelles ») ;
  2. il est possible d’examiner les pauses ou dans la production langagière, en tant qu’indices de l’aisance, ou dans la réception du message ;
  3. l’analyse peut avoir pour objet des données acoustiques ou perceptives ;
  4. pour l’analyse acoustique, il existe des appareils et des logiciels qui permettent des études de haute précision ;
  5. il est possible d’étudier les pauses vides et/ou pleines, ainsi que d’autres variables temporelles (« drawls » etc.) ;
  6. l’analyse peut porter sur différents types de production (improvisation, lecture etc.), ainsi que sur différentes langues maternelles et/ou étrangères ;
  7. les études des pausologues, évoquées dans les sections précédentes, ne représentent pas nécessairement toutes les méthodologies envisageables. Par exemple, une démarche possible consiste à recueillir, auprès des sujets, des commentaires « introspectifs » sur leur perception des pauses. Cela peut fournir une perspective intéressante sur les pauses, par exemple en ce qui concerne leur caractère volontaire ou involontaire.

Dans la présente étude, les pauses sont considérées comme des indices de l’aisance du débit. Ce choix méthodologique est basé sur la considération qu’un débit aisé comporte moins d’interruptions qu’un parler hésitant. Théoriquement, il serait plus exact de ne considérer, en tant qu’indices d’un manque d’aisance, que les pauses d’hésitation. En réalité, il est quasiment impossible de distinguer celles-ci, de façon sûre, par rapport aux autres pauses. Toutefois, l’étude des pauses revêt un intérêt considérable, en tant que première étape d’un examen des variables temporelles en interprétation de conférence. Bien que ce thème soit de pertinence aussi bien de la formation des interprètes que de l’évaluation qualitative de l’interprétation (par ex., Kopczynski 1981), il n’a été examiné que dans des études relativement peu nombreuses (voir section précédente).

La présente étude comporte l’identification des pauses au moyen d’une analyse acoustique, aux fins d’une comparaison quantitative entre différents échantillons. L’analyse porte aussi bien sur les pauses vides que sur les pauses pleines. Le type de production orale considérée est l’interprétation consécutive, en italien (langue maternelle) et anglais (première langue étrangère). Les raisons auxquelles les sujets attribuent leurs pauses font également l’objet d’une comparaison entre les différents échantillons considérés.