Les travaux de Shavelson (1972)

Shavelson (1972) a utilisé cette méthode pour évaluer la structure de connaissances que des sujets ont formée durant l’apprentissage à partir de textes à visée didactique (sur la physique moderne), et pour comparer cette structure à celle du contenu sémantique des textes. Pour effectuer cette comparaison, Shavelson (1972) s’est basé sur les travaux de Rothkopf et Thurner (1970). Ces derniers ont montré que la fréquence d’occurrence de concepts-clé dans un texte expérimental (sur la physique newtonienne) était corrélée à celle des concepts-clé dans les essais que les sujets ont rédigés après la lecture du texte expérimental à propos de notions basiques de physique (accélération, force, gravité).

Les mots-clé (n = 14) de la tâche d’association utilisée par Shavelson (1972) ont été obtenus par l’intermédiaire d’une transformation en digraphe de chaque phrase des textes proposés, le digraphe étant un formalisme supposé rendre compte des interactions entre les différents concepts de la phrase (Cf. figure 3).

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FIGURE 3. Le digraphe qui traduit la phrase ’La force est le produit de la masse par l’accélération’.

Les digraphes qui ont été obtenus pour chaque phrase des textes ont été convertis en une matrice adjacente unique, qui est censée représenter la structure du contenu sémantique textuel. La matrice comprenait les concepts-clé et les concepts de liaison. Les distances euclidiennes entre chaque concept ont été calculées : la distance entre deux concepts était définie par le nombre de liens qui ont été identifiés dans le chemin le plus court reliant ces deux concepts. Par ailleurs, le nombre de concepts avec lesquels était relié un concept donné (total degree) était égal à la somme des liens en provenance (outdegree) et à destination (indegree) de ce concept (i.e., la fréquence d’occurrence de ces concepts dans le texte).

Dans cette expérience, les sujets ont été répartis en deux groupes, l’un assigné à la condition ’apprentissage’, l’autre à la condition ’contrôle’. Au cours du premier jour de l’expérience, les deux groupes étaient soumis à la tâche d’association de mots : les 14 concepts-clé sélectionnés étaient présentés un à un aux sujets, lesquels devaient écrire tous les mots (i.e., 15 mots au maximum) que chacun de ces concepts leur évoquait. Du 2e au 6e jour, le groupe ’apprentissage’ lisait un texte (avec pour consigne d’apprendre à partir de ce texte), puis effectuait la tâche d’association de mots. Cinq textes au total ont été présentés aux sujets, ainsi que six versions de la tâche d’association de mots qui ont été construites en modifiant l’ordre de présentation des concepts-clé. Pour déterminer les effets d’une exposition répétée des concepts-clé, le groupe ’contrôle’ participait à plusieurs tâches d’association de mots (avec pour consigne de mémoriser les concepts) qui étaient distribuées dans une période de temps plus condensée (3 jours).

Ainsi, les résultats ont pu montrer que la structure de connaissances du groupe expérimental s’est modifiée de façon considérable tout au long de l’apprentissage. A la fin de l’apprentissage, Shavelson (1972) a observé que : [1] les concepts-clé étaient plus étroitement interconnectés, les sujets tendant en effet à évoquer les mêmes mots, et [2] la matrice des coefficients de liaison entre les concepts-clé (i.e., le nombre de mots communs qui ont été évoqués par les concepts-clé), qui représente la structure cognitive des apprenants, était plus fortement similaire à la matrice des distances euclidiennes entre les concepts-clé dans le digraphe, qui représente la structure du contenu textuel.