3.1.2.4.b La classification de concepts

Une analyse de variance a été calculée sur le nombre de concepts correctement choisis durant la tâche de classification, selon le plan expérimental suivant :

  • S < C2*Ne2 > *Cs3*P2

  • dans lequel les lettres S, C, Ne, Cs et P renvoient respectivement aux facteurs Sujet (source de variation aléatoire) ; Cohérence du texte (C1 = Version structurée, C2 = Version non-structurée) ; Niveau d’expertise (NE1 = Experts, NE2 = Débutants) ; Catégorie sémantique des concepts (CS1 = Constituants anatomiques du neurone, CS2 = Etats, CS3 = Evénements) ; Passation (P1 = Avant la lecture, P2 = Après la lecture)

La proportion de concepts correctement sélectionnés augmentait significativement après la lecture (F(1, 34) = 21.17, p<.01) ; les moyennes aux pré- et post-test étaient égales à 0.24 et 0.31, respectivement.

L’effet du facteur Catégorie Sémantique des concepts était significatif : F(2, 34) = 89.10, p<.01. Les sujets sélectionnaient plus de concepts-état (M = 0.42) que de concepts-événement (M = 0.31) : F(1, 34) = 17.56, p<.01, la proportion la plus faible étant observée pour les concepts-constituant (M = 0.09). L’apprentissage à partir du texte était par ailleurs significatif uniquement pour les concepts-état : F(1, 34) = 48.47, p<.01, les moyennes aux pré- et post-tests étant égales à 0.33 et 0.50, respectivement.

Le facteur Cohérence du texte exerçait un effet proche du seuil de signification : F(1, 34) = 3.17, p = .08. Les performances des lecteurs de la version structurée (M = 0.31) tendaient à être supérieures à celles des lecteurs de la version non-structurée (M = 0.25). L’interaction entre les facteurs Cohérence du texte et Catégorie Sémantique des concepts avait également un effet significatif sur l’apprentissage : F(1, 34) = 3.54, p = .04. Les contrastes calculés ont montré que les lecteurs de la version structurée acquéraient plus de concepts-état que ceux de la version non-structurée : F(1, 34) = 4.18, p<.05. Les différences dans la proportion de concepts-état correctement choisis entre les pré- et post-tests étaient les suivantes : 0.24 pour la version structurée, et 0.11 pour celle non-structurée. Pour les autres catégories sémantiques, aucun autre contraste entre les deux groupes de lecture n’a été significatif.

Le facteur Niveau d’Expertise exerçait également un effet significatif : F(1, 34) = 7.62, p<.01. Les performances des experts (M = 0.32) étaient supérieures à celles des débutants (M = 0.23). Nous avons obtenu une interaction significative entre les facteurs Niveau d’Expertise et Catégorie sémantique des concepts : F(2, 34) = 4.65, p<.05. Les contrastes effectués ont montré que les experts sélectionnaient plus de concepts-état (M = 0.51) que de concepts-événement (M = 0.36) (F(1, 34) = 10.72, p<.01), tandis qu’il n’y avait pas de différence entre les deux catégories de concepts pour les débutants (les moyennes pour les états et les événements étant égales à 0.33 et 0.27, respectivement). Enfin, les experts et débutants ne se différenciaient pas dans la proportion de concepts-constituant correctement sélectionnés, les moyennes pour les experts et les débutants étant égales à 0.10 et 0.09, respectivement. Aucun autre facteur simple ou en interaction n’était significatif.

En résumé, ces résultats mettent en évidence un effet de la structure du domaine. Il semble que les sujets se représentent mieux les aspects statiques du domaine (les états dans lesquels se trouvent le neurone et ses composants durant le fonctionnement) que ses aspects dynamiques (les événements qui entraînent des modifications d’états). De plus, en accord avec ce qui a été prédit, l’apprentissage de la structure fonctionnelle du neurone semble nécessiter la construction de la représentation mentale des états relatifs au domaine avant celle de la représentation mentale des événements. Par ailleurs, les résultats rendent compte d’une interaction entre les connaissances initiales des lecteurs et la structure du domaine. Pour représenter le fonctionnement du domaine, les experts semblent sélectionner davantage de concepts relatifs à des états que de concepts relatifs à des événements du domaine. En revanche, les débutants semblent ne pas procéder à une sélection des concepts en fonction de leur catégorie sémantique. Ce résultat peut être interprété en supposant que les experts ont élaboré une représentation mentale condensée (ou encapsulée) du fonctionnement du neurone (Cf. Schmidt & Boshuizen, 1993) : les concepts relatifs aux événements auraient tendance à se regrouper autour des concepts relatifs aux états, lesquels formeraient les points d’ancrage de la représentation mentale du fonctionnement du neurone.

Enfin, les résultats montrent une interaction entre la structure du domaine, et la structure temporo-causale du texte. Alors que nous ne l’avions pas prédit, il semble que la version structurée soit plus bénéfique à l’apprentissage des concepts relatifs aux états du domaine que la version non-structurée. En revanche, l’apprentissage des concepts relatifs aux événements ne semble pas dépendre de la cohérence causale du texte.