3.1.2.5.c Apprentissage à partir du texte et Réseaux ’Pathfinder’

Afin de rendre compte des différences entre les structures de connaissances initiales des experts et des débutants du domaine, et des modifications (qualitatives) de ces structures à l’issue de la lecture du texte, les données issues de la tâche de classification ont été converties en valeurs de proximité puis dérivées en réseaux associatifs de connaissances à partir du logiciel ’Pathfinder’ (Schvaneveldt & al., 1989).

Ainsi, pour chacun des quatre phénomènes bioélectriques (i.e., le potentiel de repos, le potentiel d’action, la repolarisation et la période réfractaire) que les sujets ont définis avant et après la lecture à partir des 28 concepts proposés, nous avons construit six matrices de distances à n lignes et n colonnes (n = 29, n étant le nombre de concepts proposés plus le phénomène à définir). Dans les matrices, deux types de paires d’items ont été distingués : [1] des paires qui représentaient les liens entre un phénomène et les concepts sélectionnés pour le définir (e.g., lien <potentiel de repos-négativité intracellulaire>), et [2] des paires qui représentaient les liens entre deux concepts sélectionnés ensemble pour définir un phénomène (e.g., lien <négativité intracellulaire-positivité extracellulaire>). A chaque paire d’items, une valeur de proximité a été assignée en appliquant deux règles de conversion des données brutes de la tâche de classification. Selon la première règle, la fréquence avec laquelle un concept a été sélectionné pour définir l’un des quatre phénomènes détermine le poids du lien entre ces deux items. Par exemple, 67% des sujets ont choisi la carte ’négativité intracellulaire’ pour définir le phénomène ’potentiel de repos’. Nous avons considéré cette proportion comme étant équivalente à la force de liaison entre ces deux items dans la matrice. Ce poids a été transformé en une estimation de distance en le soustrayant à la valeur 100 qui est la valeur théorique de la force de liaison maximale entre deux items. Ainsi, la valeur de proximité assignée à la paire ’potentiel de repos-négativité intracellulaire’ était égale à 33. Selon la seconde règle, la fréquence avec laquelle deux concepts ont été sélectionnés ensemble pour définir un phénomène détermine le poids du lien entre les deux concepts. Par exemple, 71% des sujets ont choisi à la fois la carte ’négativité intracellulaire’ et la carte ’positivité extracellulaire’ pour définir le phénomène ’potentiel de repos’. De la même façon que précédemment, cette proportion a été transformée en une estimation de distance en la soustrayant à la valeur 100. Ainsi, la valeur de proximité assignée à la paire ’négativité intracellulaire-positivité extracellulaire’ était égale à 29. A partir des valeurs de proximité que nous avons calculées, le logiciel Pathfinder (Schvaneveldt & al., 1989) a été utilisé pour dériver des réseaux dans lesquels les items étaient représentés par des noeuds reliés par des liens indirects. Nous avons affecté la valeur ∞ au paramètre r pour préserver l’ordre des relations dans les chemins. La valeur du paramètre q a été fixée à 28 (égale à n-1). Pour chaque phénomène, six réseaux ont donc été dérivés, représentant : [1] les structures de connaissances des experts et des débutants avant l’apprentissage (soit deux réseaux), les structures des experts et des débutants à l’issue de la lecture de la version structurée (deux réseaux), et les structures des experts et des débutants à l’issue de la lecture de la version non-structurée (deux réseaux). Nous présentons, à titre d’exemples, les réseaux des experts et des débutants qui ont été dérivés des données de la classification obtenues pour le phénomène ’potentiel de repos’ avant la lecture (Cf. figure 9).

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FIGURE 9. Les réseaux Pathfinder des experts et des débutants obtenus avant la lecture pour le ’potentiel de repos’. Notez que les deux réseaux diffèrent dans le nombre de liens et de concepts du groupement principal (formé par les concepts directement reliés au phénomène et leurs voisins)

Pour chaque phénomène (le potentiel de repos, le potentiel d’action, la repolarisation, et la période réfractaire), nous avons procédé à une analyse descriptive des réseaux des experts et des débutants qui ont été dérivés avant (pré-test) et après (post-test) la lecture du texte (version structurée et version non-structurée). Cette description (Cf. tableaux I à IV) a été effectuée sur la base de critères tels que : [1] le nombre total de liens dans le réseau (Cf. colonne 2 des tableaux), [2] le nombre de groupements de concepts dans le réseau (Cf. colonne 3), [3] le nombre de concepts d’état et d’événement corrects qui étaient directement reliés au phénomène et qui constituaient sa signification centrale (Cf. colonnes 4 et 5), et [4] le nombre de concepts incorrects dans le groupement principal (i.e., celui qui contenait le phénomène à définir) (Cf. colonne 6). Enfin, pour chaque phénomène, nous avons pu évaluer la similarité structurale entre les réseaux des experts et des débutants avant et après l’apprentissage, en calculant à partir du logiciel Pathfinder l’indice C (Goldsmith & Davenport, 1991) qui détermine le nombre de liens communs aux deux réseaux. Les valeurs de l’indice varient entre 0 (réseaux différents) et 1 (réseaux identiques) (remarque : ces valeurs ne paraissent pas dans les tableaux, et sont données directement dans l’analyse descriptive des réseaux).

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TABLEAU I. Analyse des réseaux Pathfinder des experts et des débutants obtenus pour le phénomène ’potentiel de repos’
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TABLEAU II. Analyse des réseaux Pathfinder des experts et des débutants obtenus pour le phénomène ’potentiel d’action’
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TABLEAU III. Analyse descriptive des réseaux Pathfinder des experts et des débutants obtenus pour le phénomène ’repolarisation’
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TABLEAU IV. Analyse descriptive des réseaux Pathfinder des experts et des débutants obtenus pour le phénomène ’période réfractaire’

En résumé, avant la lecture, les réseaux des débutants étaient constitués d’un plus grand nombre soit de liens, soit de groupements de concepts que ceux des experts. Dans les réseaux des débutants, le phénomène à définir était soit connecté à des concepts incorrects, soit non-relié et isolé des autres groupements de concepts. Conformément à nos attentes, la similarité structurale entre les réseaux des experts et des débutants a augmenté après la lecture, et ce de façon plus importante après celle de la version structurée. Pour les experts, le nombre de concepts directement reliés au phénomène à définir et de liens dans leurs réseaux a augmenté de façon plus importante après la lecture de la version structurée qu’après celle de la version non-structurée. D’autre part, nous avons remarqué que pour les experts qui ont étudié la version structurée, leurs réseaux avaient tendance à comporter des concepts incorrects tandis qu’il n’y en avait pas dans les réseaux des experts de la version non-structurée.