3.2.2. Effet de l’organisateur initial sur les niveaux de représentation du texte subséquent : les travaux de Mannes (1987, 1994, 1996)

3.2.2.a Structure de l’organisateur initial et structure du texte

Mannes et Kintsch (1987) ont étudié l’effet de la structure de l’organisateur initial sur les deux niveaux de représentation du texte subséquent : la représentation sémantique et le modèle de situation (Cf. van Dijk & Kintsch, 1983). Deux types d’organisateurs initiaux qui apportaient des connaissances générales sur le domaine évoqué par le texte (l’application industrielle des bactéries) ont été construits. Dans le premier organisateur initial, les informations étaient structurées de la même façon que dans le texte subséquent, et portaient sur l’utilisation des bactéries en industrie (i.e., organisateur congruent). L’organisation thématique de ces mêmes informations était différente dans le second organisateur initial (les informations qui étaient centrales dans le premier organisateur initial étaient des détails dans le second) (i.e., organisateur non-congruent). Après l’étude de l’organisateur initial, les sujets devaient lire un article scientifique sur les applications industrielles des bactéries. La moitié des sujets de chaque condition effectuaient immédiatement après la lecture les épreuves suivantes : la rédaction d’un résumé, la vérification d’énoncés (phrases originales du texte, paraphrases, inférences), le rappel indicé, la résolution d’un problème spécifique, et le classement de solutions au problème. L’autre moitié des sujets complétaient ces mêmes tests deux jours après la lecture. Mannes et Kintsch (1987) ont fait l’hypothèse que l’organisateur congruent faciliterait la construction de la représentation sémantique du texte ; cet effet positif devrait se traduire par des performances élevées aux tâches mnésiques (résumé, rappel libre, vérification de phrases originales et de paraphrases). En revanche, l’organisateur non-congruent faciliterait la formation du modèle de situation ce qui devrait se traduire par des performances élevées à la vérification des inférences, aux épreuves de résolution de problèmes et au classement. En effet, les sujets de la condition de non-congruence doivent traiter activement les informations et produire des inférences pour relier les connaissances de l’organisateur à celles du texte subséquent. Les résultats ont confirmé ces prédictions. La congruence entre la structure de l’organisateur initial et celle du texte subséquent a facilité la mémorisation des informations textuelles, tandis que la non-congruence structurale a favorisé l’apprentissage à partir du texte subséquent. De plus, les résultats ont montré que la représentation mnésique du texte se modifie avec le délai. La macrostructure du texte prend ainsi plus de poids que sa microstructure (Cf. Kintsch & van Dijk, 1978), et la différenciation entre les connaissances initiales des lecteurs et les informations textuelles décline, ce déclin étant plus important pour les sujets de la condition de non-congruence que pour ceux de la condition de congruence.