3 - Au stade concret, de sept-huit ans à onze-douze ans.

A ce niveau l’enfant pense au moyen d’opérations concrètes issues de l’action. Il ne bâtit pas de système, il pense concrètement, problème par problème à mesure que la réalité les propose. Il ne sait pas relier ses solutions au moyen de théories générales qui en dégageraient le principe. Au stade concret, les opérations de l’intelligence ne portent que sur la réalité et en particulier sur les objets tangibles susceptibles d’être manipulés et soumis à des expériences effectives. L’enfant sait penser ce qu’il voit et manipule dans son environnement immédiat.

A partir de sept-huit ans, l’assimilation égocentrique se transforme en assimilation rationnelle, ‘« c’est-à-dire en structuration de la réalité par la raison elle-même’ »356. Si on interroge les enfants de cet âge non sur les réalités éloignées, mais sur les faits tangibles et palpables, on découvre qu’ils sont capables de construire des explications valables.

Les notions de conservation du poids, du volume, des longueurs, des surfaces... s’élaborent dans le jeu d’opérations coordonnées entre elles en systèmes d’ensemble dont la propriété remarquable est d’être réversible, en opposition à la pensée intuitive de la petite enfance qui est irréversible. La réversibilité donne en effet la possibilité d’un retour rigoureux au point de départ357.

Au cours de ce stade on constate le progrès de la conduite et de la socialisation. L’enfant est devenu capable d’une certaine réflexion, il arrive à coordonner ses activités avec celles des autres. Et parce qu’il y a progrès de la socialisation, la pensée est renforcée par l’intériorisation. L’enfant peut se concentrer quand il travaille seul, et collaborer lorsqu’il a une vie commune.

L’enfant est désormais capable de coopération, dans la mesure où il ne confond plus son point de vue et celui des autres. Les discussions deviennent possibles. Les enfants essaient de comprendre le point de vue des autres et recherchent des preuves pour justifier leurs affirmations358. Ils tiennent compte de leur environnement humain, ce qui les développe mentalement011

A cet âge (de sept à douze ans), la coopération entre les enfants coordonne leurs points de vue en une réciprocité qui assure à la fois leur autonomie et leur cohésion. Le groupement des opérations intellectuelles situe leurs divers points de vue intuitifs en un ensemble réversible dépourvu de contradiction, du même coup leur affectivité se trouve enrichie de nouveaux sentiments moraux et surtout d’une organisation convenable de la volonté qui aboutissent à une bonne intégration du moi et à un réglage plus effectif de la vie affective.

Notes
356.

PIAGET (J.), Six études de psychologie, p. 64.

357.

PIAGET (J.), Six études de psychologie, p. 69.

358.

PIAGET (J.), Six études de psychologie, p. 59.