La durée du travail se caractérise par une tendance séculaire à la baisse observable dans tous les pays industrialisés et donc bien sûr en France. La réduction du temps de travail (RTT) apparaît comme une tendance de long terme - un « trend » (Guedj, Vindt, 1997 68 ) - suffisamment affirmé pour qu’on ne puisse ignorer l’importance de ce mouvement socio-économique que certains analystes qualifient de séculaire. A. Maddison (1991, 1995 69 ) fournit une référence précieuse sur ce point. Il y a toujours eu, au moins d’une génération à l’autre, une réduction du temps de travail, si l’on mesure cette dernière avec l’indicateur le plus large dont on puisse disposer : le nombre d’heures travaillées.
Quelles que soient les mesures de son évolution, variant selon les sources, les méthodes de calcul et les définitions statistiques, on observe une certaine convergence des études sur la réduction de la durée annuelle du travail. Les analyses sur les longues périodes montrent que le temps de travail a diminué de moitié en 130 ans, ce qui amène Rigaudiat (1996 70 ) à écrire que « nous travaillons à mi-temps » aujourd’hui. Selon l’étude de Marchand D. et Thélot C. (1991, 1997 71 ), en prenant en compte l’ensemble des actifs occupés, il est possible de retracer l’évolution de la durée du travail depuis 150 ans. On travaillait 3021 heures par an en 1851, contre 1642 heures aujourd’hui.
Le rapport de la commission présidée par Jean Boissonnat sur Le travail dans vingt ans estime que la durée moyenne de travail productif est tombée d’environ 3000 heures au début du XXème siècle à environ 1650 à la fin de celui-ci, soit une réduction de 45% (Boissonnat, 1995 72 ). Ce mouvement de baisse collective du temps de travail doit être lié aux gains de productivité. Selon Marchand et Thélot (1991, 1997 73 ), « l’heure de travail en 1995 est 28 fois plus productive que celle de 1930 ». Dans la plupart des cas, cette réduction du temps de travail a été obtenue contre le gré des employeurs par l’action syndicale et/ou les interventions des pouvoirs publics.
Par ailleurs, durant ces différentes évolutions, le temps de travail a diminué suivant quatre modes successifs (Roche, Fynes, Morrissey, 1998 74 ) :
GUEDJ F. et VINDT G., « Le temps de travail une histoire conflictuelle », Syros, Paris, 1997.
Maddison A. « Dynamics forces in capitalist development », Oxford University Press, New York., 1991 ; et « L’économie mondiale 1820-1992 », OCDE, 1995.
RIGAUDIAT J., « Réduire le temps de travail », Syros, 2ème édition, 1996, p.219, p. 193.
Marchand D. et TheloT C. « Deux siècles de travail en France », INSEE, Col. Etudes 1991, 2ème édition 1997.
Boissonnat J., « L e travail dans vingt ans », Paris, Editions Odila Jacob, La documentation Française, 1995, 373 p., pp. 266-267.
Marchand D. et Thélot c., « D eux siècles de travail en France », INSEE, Col. Etudes Nathan, op. cit., p. 10.
ROCHE W., FYNES B. et MORRISSEY T., « Un tour d’horizon international », in Defalvard H. et Guienne, V. (sous la direction de), « Le partage du travail : bilan et perspectives », Sociologie Economique, Desclée de Brouwer, Paris, 1998.
Cette, G. et Taddei, D., « Réduire la durée du travail. Les 35 heures », Paris, Librairie Générale Française, coll. Le Livre de poche., 1998, 377 p. , p.41.