2.1.2. La théorie des relations humaines : l’organisation est le resultat d’une pluralite d’operations individuelles et collectives

Contrairement aux théories classiques de l’organisation, la théorie des relations humaines porte une attention particulière aux comportements des individus qui modèlent la structure organisationnelle. Il s’agit dans cette théorie de rompre avec le taylorisme afin de dynamiser les comportements grâce à une nouvelle conception des rapports humains dans l’entreprise. L’école des relations humaines favorise donc la confiance dans les personnes, les initiatives, la communication, mais aussi la négociation entre les individus, quel que soit leur niveau hiérarchique (Friedberg, 1983 180 ). Les expériences de Mayo 181 (1927) (« effet Hawthorne ») sont surtout connues pour avoir montré le rôle de la reconnaissance des salariés dans les entreprises. Le mouvement des relations humaines met en évidence l’importance du facteur humain dans les organisations et la nécessité de prendre en compte les besoins sociaux et d’estime des individus pour accroître la productivité.

Les expériences de Mayo ont aussi contribué à démontrer l’existence des gisements d’efficacité dans le fonctionnement des organisations. Les acteurs (individu ou groupe) établissent des marges de manœuvre, des normes de groupe, des organisations informelles et ce quel que soit le niveau de spécialisation du travail. Dans ce cadre, l’organisation est le résultat d’une pluralité d’opérations individuelles et collectives, elle est donc l’œuvre d’une communauté de personnes.

Dans la même lignée, Argyris et Schön (1978 182 ) recommandent d’une part de percevoir l’organisation comme une configuration formée par un ensemble de composantes (et avoir une vision plurielle des composantes de l’organisation) et de gérer les interrelations entre les composantes de l’organisation. Cela rejoint l’idée de Likert (1961 183 ) où toute personne est un lien entre deux groupes. Argyris préconise une décentralisation des pouvoirs de direction vers les employés. Son projet est de réduire le décalage qui existe entre les aspirations des employés et celles de la hiérarchie. Cet écart crée des activités adaptatrices nuisibles et consommatrices d’énergie tel que l’absentéisme, l’émergence de normes informelles, etc. De ce courant, nous reprenons l’idée que les processus normalisés de fonctionnement subissent, tout comme les processus naturels de fonctionnement, un phénomène d’érosion du fait de la composante humaine des organisations. Cela crée des écarts entre une volonté d’un certain fonctionnement souhaité et un fonctionnement effectif.

Toutefois, nos travaux ne s’arrêtent pas à la recherche d’une valorisation des ressources humaines. Ils souhaitent répondre à des exigences économiques et prendre en compte à la fois l’environnement interne et l’environnement externe que nous plaçons en continuum.

Dans le cadre de nos travaux, l’intégration au cœur des organisations d’une ingénierie de l’ARTT est une des réponses à la problématique d’apprentissage organisationnel (Argyris (1978 184 ) ; Midler et Charrue (1993 185 ), Koenig (1994 186 )). Nous avons relevé dans cette approche la volonté de développer, au cœur des organisations, la capacité à changer les activités orientées vers l’intérieur (affectations de poste, restructuration de services) et vers l’extérieur (adaptation à un marché) et à modifier le fonctionnement. L’ingénierie du management stratégique de l’ARTT peut servir l’apprentissage organisationnel. Dans le sens, où le processus itératif de conception, construction, mise en œuvre et évaluation permet de faire évoluer et donc de modifier le comportement de l’entité (Hubert, 1991 187 ).

La mise en œuvre de l’ingénierie du management de l’ARTT est une proposition qui entre dans cette ligne de pensée. L’objectif est de permettre aux entreprises de réfléchir et d’agir sur leur fonctionnement de façon permanente. L’ARTT peut être un « instrument de la mise en œuvre » de l’apprentissage organisationnel.

Notes
180.

FRIEDBERG E., « La dimension sociale de la qualité », Enjeux, n°33, février 1983, p. 59.

181.

In MORGAN G. « Images de l’organisation », traduit de « Images of organizations » 1986, éditions Eska, 1989, pp. 36-39.

182.

ARGYRIS C. et Schön D., « Organizational Learning : a theory of Action Perspective », Addison-Wesley, 1978, 450 p.

183.

Likert in Scheid J.-C., « Les grands auteurs en organisation » 1991, pp. 194-199

184.

ARGYRIS C. et Schön, « Organizational Learning : a theory of Action Perspective », op.cit.

185.

CHARUE F. et MIDLER C., « Conduite du changement et apprentissage », Gestion 2000, Management & Prospective, Vol. 9, n°2, 1993, 215p, pp.167-190

186.

KOENIG G., « L’apprentissage organisationnel : repérage des lieux », Dossier sur l’apprentissage organisationnel, Revue Française de Gestion, n°97, janvier-février 1994, pp. 76-83.

187.

HUBER G., « Organizational Learning : the contributing processes and the literatures », Organization Science, Vol. 2, n°1, février, pp. 88-115 in KOENIG G., « L’apprentissage organisationnel : repérage des lieux », op.cit., p. 77.