4.3.1. Rapprochement de la notion de plasticité organisationnelle au concept de coûts-performances cachés

L’ARTT entraîne des changements majeurs qui affectent les choix stratégiques de l’entreprise, les configurations organisationnelles et interrogent la nature même du travail humain et sa réelle contribution à la valeur ajoutée, raison d’être de l’activité d’une entreprise ou organisation. La flexibilité voire la plasticité devient une compétence à la fois individuelle et collective à développer dans le cadre d’un dispositif d’ARTT, il s’agit précisément de la capacité à changer de priorité, de méthodes ainsi que la capacité de réaction à une situation donnée.

Les nombreuses recherches-interventions effectuées par l’ISEOR (Savall, 1975, 1977, 1979 516  ; Savall et Zardet, 1987, 1992, 1995 517 ) dans des entreprises et des organisations d’acteurs très variés (dirigeants, cadres, encadrants de proximité, ouvriers et employés) autorisent le pronostic suivant :

Toute personne est occupée 10 à 25% de son temps quotidien à corriger des dysfonctionnements, compte tenu de la plasticité de la productivité mesurée par les coûts cachés, il est possible, grâce à des actions de dynamisation, de réaliser le même volume de production avec le même effectif dont l’horaire aura été réduit de 10% (passage de 39 h à 35 h).

Figure n°4-4 : Composants surtemps et non-production
Figure n°4-4 : Composants surtemps et non-production

Source : Savall et Noguera (2001)

L’existence de cette réserve de productivité importante dans les entreprises et les organisations permet de réduire le temps de travail en rendant un volume et une qualité de service et de produit inchangés. Cette réserve de productivité peut être mesurée approximativement avec la méthode des coûts-performances cachés. La création de valeur ajoutée repose sur la mise en évidence de gisements de gains potentiels convertis en performances par une réorganisation des activités et l’élimination des inefficacités : la réduction des coûts de fonctionnements accroît la valeur organisationnelle (Van Loye, 1998 518  ; Khouatra et Cappelletti, 2001 519 ). Les réductions de coûts (de surtemps, de non-production), peuvent en effet servir un projet d’ARTT par la réallocation des ressources économisées dans de nouvelles activités.

L’analyse socio-économique représente l’activité comme l’interaction de structures et de comportements humains. Cette interaction est en partie orthofonctionnelle (conforme au fonctionnement attendu) et en partie dysfonctionnelle.

La problématique de l’ARTT est l’étude des écarts entre le fonctionnement souhaité par les acteurs de l’entreprise et le fonctionnement constaté. L'ARTT ne peut se mettre en place qu'à la condition d'une transformation globale de l'organisation qui est un moyen de faire émerger des gisements de productivité et de compétitivité qui se trouvent enfouis dans l'entreprise.

Notes
516.

SAVALL H., Ibid., 1975, 1989, 269 p., « Propos d’étape sur la régulation socio-économique de l’entreprise par la recherche de la compatibilité de l’efficience économique et du développement humain », op.cit., décembre 1977, Revue Economie Appliquée, n°4, 1978, 36 p.

517.

SAVALL H. et ZARDET V., « Maîtriser les coûts et les performances cachés », op.cit., 1995, 401 p., « Le nouveau contrôle de gestion. Méthodes des coûts-performances cachés », Editions comptables Malesherbes, Eyrolles, 1992, 399 p. ; SAVALL H. et ZARDET V., « Ingénierie stratégique du roseau », Economica, 1995, op.cit.

518.

Van Loye G. « Finance et théorie des organisations », Economica, 1998, p.197

519.

Khouatra & Cappelletti, « Le concept de contrôle de gestion créatif : illustration par une recherche-intervention dans un cabinet d’audit et de conseil », AFC, 2001, 21 p.