7.2.3.outils et instrumentation de gestion

Pour Gilbert (1998 648 ), le gestionnaire (individu ou groupe) est porteur de buts organisationnels. Il n’est pas un simple actionneur de l’instrument. Sa principale mission à l’égard de l’instrumentation relève de l’ingénierie : préparer et mettre en place les conditions nécessaires à l’atteinte du but de gestion (positionner un produit, assurer le plein emploi d’une ressource, mesurer la performance, e tc.) qui a justifié le recours à l’instrument. Selon cet auteur, l’instrument n’existe qu’à travers un ensemble de données, à la fois sociales et organisationnelles. Toutefois, David (1996 649 ) précise que l’instrument de gestion est toujours au moins partiellement, transposable. Il n’est pas complètement liés au contexte d’utilisation. Puisque, nous l’avons vu, les instruments de gestion sont des « artefacts » c’est-à-dire des phénomènes d’origine artificielle, ils ont les propriétés et justifient des modes d’analyse qui s’appliquent à ceux-là. D’où l’intérêt d’approcher les instruments par leurs usages sociaux et les fonctions qu’ils assurent, de dépasser l’instrument élémentaire pour l’appréhender dans un ensemble plus global que l’on appellera « instrumentation ».

L’instrumentation de gestion que Berry (1983 650 ) définit comme des « moyens conceptuels ou matériels visant à réduire la complexité et à simplifier le réel dans la conduite des entreprises, occupe une place centrale dans le pilotage des organisations ». Les aspects de réduction de la complexité et de simplification du réel constituent selon nous des propriétés intrinsèques à l’instrumentation, plutôt que des fonctions qui lui sont explicitement assignées. Les travaux de Berry sur la « technologie invisible » montre que les instruments de gestion jouent un rôle sous-estimé et pourtant crucial dans la marche des entreprises. Simplifiant le réel, ils sont une réponse à la complexité des situations de gestion et à l’urgence des choix.

Le rôle de l’instrumentation dans un processus stratégique tel que la mise en œuvre de l’ARTT devient une question primordiale. Pour Martinet (1984 651 ), si les individus de l’entreprise disposent d’un projet stratégique pertinent, ils doivent également disposer d’outils nécessaires à la légitimation de leur projet. Ils participent en réalité à l’enracinement, la connaissance et l’intériorisation des décisions stratégiques par les différentes catégories de personnel (Savall et Zardet, 1996 652 ).

Nous considérons l’instrumentation comme l'action de fournir des outils, méthodes et techniques mais aussi des modes de management (comme des indicateurs, plan d'actions, outils et méthodes de motivation, de pilotage des compétences….).

Ainsi l’instrumentation managériale telle que les méthodes de construction de plans d’actions stratégiques, des outils de gestion et de pilotage des compétences est nécessaire pour faciliter la mise en œuvre de l’ARTT. Nous développons dans les paragraphes suivants un outil de formalisation et de pilotage du projet stratégique d’une organisation : le plan d’actions stratégiques ; et un outil de pilotage social : la grille de compétences.

Notes
648.

GILBERT P. « L’instrumentation de gestion. La technologie de gestion science humaine ? », Economica, 1998, 149 p, p.24

649.

David A., « L’aide à la décision entre outils et organisation », Entreprises et Histoire, n°13, 1996, pp.9-29

650.

Berry M., « Une technologie invisible ? L’impact des instruments de gestion sur l’évolution des systèmes humains », Ecole Polytechnique, 1983, 93p.

651.

MARTINET A.-C., « Management stratégique : organisation et politique », 1984, 118 p.

652.

SAVALL H et ZARDET V., « Pour des stratégies d’entreprise à la fois économiques et sociales », ANDCP. Personnel n°367, février 1996, p.51