11-2 Le modèle de Karmiloff-Smith (1986)

Pour Karmiloff-Smith (1986), le développement de l’apprentissage crée de l’automatisation, laquelle conduit à une réorganisation des stratégies dont le sujet a conscience. L’accessibilité à la conscience du sujet étant le point novateur de son approche.

Karmiloff-Smith considère trois étapes dans le développement d’une habileté cognitive, dont la première recouvre les étapes 1 et 2 d’Anderson, la seconde la phase 3 du modèle de cet auteur, et la troisième, originale, qu’elle appelle ré-organisation des structures mentales. Ces étapes correspondent à des changements des structures, c’est-à-dire des représentations mentales internes.

  • dans la phase 1 de la compétence procédurale, l’enfant accumule les stratégies spécifiques lui permettant de produire des résultats après les avoir validées par feed-back externe lui confirmant de façon répétée sa réussite ;

  • dans la phase 2, l’enfant, fort de sa réussite grâce au recours à des procédures automatiques, éprouve le besoin de contrôler le traitement automatique pour le transposer à d’autres situations et le généraliser ; il a besoin pour cela de savoir comment sa stratégie opère, et de se construire une sorte de méta-processus (cf. la phase 3 d’Anderson de composition et de généralisation) c’est-à-dire d’élaborer des stratégies plus globales. Il y a dé-compilation des procédures automatiques et extraction de leurs points communs pour reconstituer une méta-procédure. Durant cette phase de ré-organisation qui consomme beaucoup de ressources, le niveau de performances peut diminuer, phénomène classique que l’on observe dans les processus d’apprentissage (Ackerman, 1989) ;

  • enfin, la phase 3 de compétence conceptuelle voit le sujet retrouver son niveau de performance par stabilisation de la stratégie généralisée ; il pourra alors avoir conscience de ce qu’il fait, c’est-à-dire de la manière dont est constituée au plan interne sa stratégie.

  • Ces trois phases sont récurrentes et, selon les sous-habiletés, un sujet pourra en être à des stades différents. Certaines données comportementales éclairent sur les changements en train de s’opérer chez le sujet : la verbalisation qui change, ou le contrôle par le dessin (cf. la capacité d’interrompre la procédure de dessin chez des enfants de 5 et 9 ans ayant à dessiner « l’homme qui n’existe pas »).