4 - 4 Traitement des scripts individuels

Nous avons, post-expérience, écrit un logiciel spécifique de traitement des scripts individuels afin d’analyser de façon détaillée les conditions de traitement perceptif des stimuli (cf.annexe 3). Nous donnerons deux exemples pour illustrer l’utilité de ce dépouillement supplémentaire.

Nous avons observé, à l’examen de l’échantillon, que plusieurs sujets joueurs avaient mieux rappelé certains carrés que d’autres, les identifiant sans doute à des pièces ayant un plus large potentiel de mouvement, Fous et Tours, par opposition avec Cavaliers et pions. Il y aurait donc un double phénomène : d’une part, la similarité entre objets et pièces d’échecs, d’autre part, une valorisation et donc une mémorisation plus fortes des pièces à grand rayon d’action.

Le deuxième exemple a trait au rapport entre l’ordre dans lequel les objets ont été rappelés et le décours temporel. La pratique du jeu d’échecs conduit à la séparation en deux temps de l’évaluation d’une position : l’identification des chunks et patterns, très rapide, puis la mise en relations de ceux-ci par une vision globale de la Position, afin d’en dégager le sens, de l’évaluer et d’orienter la recherche de variantes des coups possibles. Les études des mouvements oculaires permettent de distinguer nettement la durée de ces deux temps du regard (Tikhomirov & Poznyanskaya, 1966). On pouvait émettre l’hypothèse que nous trouverions une corrélation entre le niveau de performance dans le rappel et ces deux phénomènes du traitement chez les joueurs. Le premier d’entre eux illustre parfaitement le facteur principal du traitement de la similarité du modèle de Nosofsky (1986). Les chunks perçus activent des traces multiples et composites, spécifiques aux sujets et non prototypées abstraitement. Certains joueurs, qui préfèrent sans doute jouer avec les Tours, ont mieux rappelé les carrés situés sur la première ou la dernière rangée dans le cas où leur colonne était libre. D’autres joueurs, dans notre deuxième exemple, lorsqu’on lit le tempo de leur script, enchaînent le placement de deux chunks reliés par une connexion, un objet qui couvre deux parties de l’échiquier. Ceci confirme que la similarité que nous avions cherché dans l’élaboration des stimuli a joué : quadrillage de 64 cases comme support, certes aux seules cases blanches; objets de deux catégories, carrés et ronds, semblables aux pièces et pions; de deux couleurs, blanc et noir, comme les deux camps échiquéens ; répartition des objets spatialement en fonction de leur couleur, comme sur un échiquier, les Blancs d’un côté les Noirs de l’autre ; écoulement du temps apparent sur l’écran, comme la pendule utilisée dans les parties de compétition ; et surtout, configurations correspondant à de vraies Positions de parties ayant été jouées, à de très minimes modifications près, et simple translation des Positions pour les configurations dites neutres.