14- Discussion

  1. Nous avions posé avec prudence notre hypothèse expérimentale relative à un possible effet de la pratique pour le groupe méthode transfert. Les résultats n’établissent pas de façon significative cet effet.

  2. L’habileté à construire un modèle pour mieux retenir la macro-structure d’un texte n’est pas encore présente de façon significative après seulement sept mois de pratique des échecs, celle-ci fût-elle enseignée par une méthode intégrant l’objectif du transfert. On trouve certes des résultats tous concordants qui attestent d’une certaine tendance, mais sans que l’analyse de variance soit significative. A cet âge, et à ce niveau de développement cognitif, la compréhension semble donc être en voie de consolidation. Certains sujets dans les trois groupes ont en effet obtenus des scores élevés dès le premier essai.

  3. Sommes-nous en présence d’un effet qui se construit, et aurions-nous obtenu un effet significatif avec des sujets ayant plus de sept mois de pratique ? Seule une nouvelle expérimentation permettrait de trancher.

  4. Cette capacité de construction-intégration selon le modèle de Kintsch correspond à une opération qui est, à titre principal, d’ordre métacognitif. Le sujet doit, de façon consciente, établir des liens entre les éléments clés qu’il aura dégagés du texte, afin de bâtir un modèle de la situation. Il s’agit typiquement d’opérations mentales complexes qui sont effectuées, nous l’avons dit, tout au long de la tâche de découverte du texte. Durant la lecture, le sujet construit l’histoire autour des repères structurants. La mémoire de travail est mobilisée dans un travail métacognitif en ce qu’il s’accomplit concomitamment à la lecture en cours.

  5. On doit cependant relever un résultat intéressant, celui qui établit l’inversion des scores obtenus par filles et garçons entre les groupes 3 et 1 (cf. le tableau 47). L’avantage en faveur des filles, + 8.4% pour le groupe 1, et + 18.4% pour le groupe 2, s’inverse au profit des garçons chez les sujets du groupe 3 (+ 3.1%). Ce résultat est dû essentiellement à l’augmentation sensible du score des garçons. Les garçons auraient donc plus que leurs camarades féminines bénéficié de la pratique.
    Pour mettre en perspective ce résultat, il n’est pas inutile de rappeler les données de l’expérience 3 sur la reconnaissance des mots, qui allaient dans le même sens.
    Nous avions observé une interaction significative des variables Genre et Pratique, avec une progression très forte chez les joueurs, comparativement aux sujets non-joueurs. La pratique avait donc profité, de façon sensible, aux garçons, alors que chez les filles, joueuses ou non, le niveau restait à peu près égal.
    Ceci était vrai pour les sujets ayant deux ans et plus de pratique échiquéenne, mais également chez les sujets élèves de CM1 n’ayant que sept mois de pratique :

Filles Garçons
Taux de reconnaissance Joueurs 77.1% 76.5%
Non-joueurs 71.1% 60.7%

La pratique permettrait aux garçons de combler l’écart existant entre les deux sexes.