Les événements liés à cette fonction indirecte sont décrits comme mettant en jeu 3 participants, un agissant, un subissant et un bénéficiaire/récepteur. Dans ces constructions, au niveau sémantique, les rôles agent et bénéficiaire sont cumulés sur l'argument sujet. Dans les constructions actives correspondantes, l'agent et le bénéficiaire/récepteur ont des référents distincts.
Certains de ces prédicats ont, en wolof, une structure de base ditransitive. Le prédicat may 'donner, offrir' (exemple 164) régit, au niveau syntaxique, 3 arguments : un sujet et deux objets directs auxquels, au niveau sémantique, sont rattachés les rôles d'agent, patient et récepteur, mais on ne trouve pas de constructions réfléchies indirectes avec ce type de prédicat.
‘164 a. May na ma jara ju rafet jiiCependant, lorsque l'agent et le bénéficiaire sont co-référentiels et que le prédicat n'a pas une structure de base ditransitive mais transitive, l'expression de ce type d'événement est marquée, en wolof, par le marqueur réfléchi. Mais on voit également apparaître sur le prédicat un suffixe de dérivation, il s'agit du marqueur d'une des voix applicatives de cette langue, le suffixe –al 23 .
‘165 a. Nanga jënd lañset bu ñaw. (Fal)Avec un verbe bivalent d'un point de vue sémantique et syntaxique, dans la construction active, le sujet est agent et l'objet est patient. Dans la construction réfléchie indirecte, il y a, d'une part, une augmentation de la valence due au suffixe –al qui permet à ce verbe de régir un bénéficiaire, d'autre part, cet argument est dans l'expression linguistique représenté par la forme boppam qui indique que l'argument bénéficiaire est co-référentiel avec le sujet de la proposition.
À travers ces exemples, on peut constater que les constructions réfléchies indirectes fonctionnent seulement lorsque la coréférence tient entre l'agent et le bénéficiaire. L'impossibilité d'avoir des constructions de ce type lorsque la coréférence est entre l'agent et le récepteur se voit tout d'abord avec l'impossibilité d'introduire le pronom réfléchi avec les verbes ditransitifs de don où le récepteur est un argument de la structure non dérivée.
C'est pourquoi, nous considérons que les constructions réfléchies indirectes en wolof sont restreintes à la coréférence agent/bénéficiaire et font obligatoirement intervenir la dérivation applicative. En effet, le bénéficiaire n'a pas en wolof de marquage spécifique, il ne peut apparaître dans une proposition sans faire intervenir la dérivation applicative, de plus les trivalents bien que compatibles sémantiquement avec la dérivation applicative ne l'autorisent que très rarement, nous y reviendrons plus en détails dans le chapitre 5.
Dans la partie suivante, nous allons présenter la voix moyenne. Avant de présenter les données du wolof, nous allons présenter cette voix sur le plan typologique sous deux axes : la forme et les différentes fonctions que les marqueurs moyens peuvent véhiculer à travers les langues.
Les fonctions de ce suffixe sont analysées en détail dans le chapitre 5.