A – 4.4. Le suffixe –loo

Les propositions dérivées par –loo montrent des structures causatives plus banales. Il y a dans toutes ces propositions ajout d'un causateur et l'ancien sujet/agent devient un objet/causataire. L'ancien objet reste objet. Ainsi, avec les verbes transitifs nous avons des propositions ditransitives. Dans l'exemple 284a., nous avons un verbe bivalent gor 'abattre', la forme dérivée gorloo 'faire abattre' régit trois arguments. Dans la proposition 284b., la question porte sur le causateur repris par le pronom interrogatif sujet ku, l'agent de l'action 'abattre', le causataire, correspond au pronom objet la de deuxième personne du singulier et le patient suma dëkku garde la fonction syntaxique d'objet.

‘284 a. Tere nañu ku gor garab te amuloo ndigal. (Fal)
interdire P3P pro. abattre arbre conj. avoir-Nég2S autorisation
On interdit d'abattre les arbres sans autorisation.

b. Ku la gorloo suma dëkku ? (Contes)
inter. 2S abattre-loo poss1S concession
Qui t'a fait abattre ma concession ?’

Ce suffixe peut s'appliquer également à des verbes intransitifs d'activité ou inchoatifs, les propositions dérivées ont alors des structures transitives (285 à 287), et le sujet cumule le rôle de causateur et de causataire, il est à la fois l'initiateur de l'action causée et l'agent immédiat de cette action. En d'autres termes, il s'agit ici de causation directe.

‘285 a. Boo ma nuyoo te reewuloo, damay defe ni danga mer
Hyp.N2S 1S saluer conj. rire-Nég2S EVerb1S-inacc. croire compl. EVerb2S ê.fâché
Si tu me salues et (que) tu ne souris pas, je vais croire que tu es fâché. (Fal)

b. Waxambaane bilee reeloo mbooloo mi ak gaññaxoom yi. (Fal)
jeune.homme dém. rire-loo assemblée déf. avec grimace déf.P.
Ce jeune homme a fait rire l'assistance avec ses grimaces.’ ‘286 a. Kuy wut du gaaw a yoqi. (Fal)
pro.-inacc. chercher ENég3S ê.rapide d.v. se.décourager
Celui qui cherche ne se décourage pas vite.

b. Li ngeen déggowul ci seen biir a ma yoqiloo. (Fal)
pro. N2P entendre-oo-nég. loc. poss2P intérieur ESuj 1S se.décourager-loo
C'est le fait que vous ne vous entendez pas entre vous qui m'a découragé.’ ‘287 Toogloo na ko
asseoir-loo P3S 3S
Il l'a fait s'asseoir.’

À la différence du suffixe –lu, la non apparition de l'agent de l'action provoquée est optionnelle avec –loo. Avec ce dernier, seul le contexte permet de ne pas le définir.

‘288 a. Duus bi yóbbu na samay yëre. (Fal)
vague déf. emporter P3S poss1S-P habit
La vague a emporté mes habits.

b. mu laaj yaayam mburaake ag soow mu mu yóbbuloo 44 )
N3S demander mère-poss3S mburaké avec lait.caillé rel. N3S emporter-loo
elle demanda à sa mère du mburaké et du lait caillé qu'elle fit envoyer.’

L'analyse du suffixe –loo conduit à plusieurs remarques. Il s'agit du seul suffixe présenté qui montre une dérivation causative traditionnelle. Toutes les autres formes décrites jusqu'à présent présentent des particularités par rapport au causatif prototypique. De plus, même si la dérivation en –loo ne peut s'appliquer sur les verbes d'état, les autres dérivations ont un champ d'action plus restreint. Avant de faire un véritable récapitulatif sur les causatives morphologiques de cette langue, il nous reste à voir le suffixe –le. Nous avons déjà eu un aperçu de cette forme dans la description des causatives périphrastiques. Nous avons alors précisé que les causatives du type 'aider quelqu'un à faire quelque chose' sont exprimées dans cette langue par un outil morphologique spécial, le suffixe–le.

Notes
44.

Exemple tiré des contes. Contexte. Elle (= Nguilane) se prépare à partir pour venger sa sœur. Cette phrase décrit les préparatifs du départ, même en contexte, il est difficile de savoir qui l'envoie et où c'est envoyé.