B – 3. Le sémantisme des causatives en wolof

Nous rappelons ci-dessous brièvement ce que nous avons trouvé comme formes et constructions causatives en wolof d'un point de vue syntaxique.

Nous allons ici tenter d'effectuer la description du sémantisme de ces constructions causatives du wolof de la façon la plus claire possible. Pour cela, nous commencerons par décrire le sémantisme des causatives lexicales. Dans cette partie, nous insérons les causatives dérivées en –e, que nous avons posées comme causatives lexicales à cause de la non productivité de cette forme d'un point de vue synchronique. Nous abordons ensuite les différents sens qui se dégagent des différents morphèmes causatifs, à savoir le suffixe –al pour lequel nous avons posé l'hypothèse qu'il véhicule le même sens que les causatives lexicales, car il s'agit de la dérivation qui permet de créer les contreparties qui n'apparaissent pas dans le lexique, et les formes lu, loo et –le. Nous effectuons enfin la même analyse sur les causatives à prédicat complexe et les causatives périphrastiques. Dans un premier temps, nous supposons que les causatives à prédicat complexe sont sémantiquement peu différentes des causatives périphrastiques. Au niveau des causatives périphrastiques, nous observerons essentiellement les différences que l'on trouve entre les différents lexèmes verbaux qui entrent dans ces constructions. Ainsi, nous irons de la causation la plus directe vers la causation la plus indirecte. Nous tenterons au fur et à mesure d'observer si les constructions universelles (lexicales et périphrastiques) partagent en plus de leur sémantisme typique un sémantisme de type sociatif et lequel. Nous adoptons la même démarche pour les causatives intermédiaires de cette langue. Si l'on se base sur le continuum présenté dans la partie typologique pour l'instant uniquement par rapport au degré d'intégration que reflète la construction des événements causant et causé, on peut supposer que les formes causatives du wolof vont suivre la présentation suivante.

Dans cette présentation, nous reprenons les différentes informations que nous avons pu dégager dans la partie traitant sur les formes et les constructions des causatives en wolof. Les causatives lexicales labiles sont des formes qui doivent présenter une causation directe. Il nous faudra voir si elles peuvent avoir une extension vers la causation sociative. Pour les causatives lexicales en e et les causatives morphologiques en –al, le fait que ces suffixes s'appliquent à des verbes intransitifs d'activité pose un problème par rapport à ce qui est décrit habituellement pour les causatives lexicales et leur affinité avec la causation directe. La causation directe est liée aux causatives lexicales, car le causataire a un rôle de patient et ne peut réaliser l'événement causé. Or, du fait que les causatives en –e et en –al peuvent s'appliquer sur des verbes [±dynamique], la contrepartie causative transitive peut ainsi avoir deux agents. On peut ainsi supposer que ces constructions s'éloigneront de la causation directe. Il nous faudra donc voir quelle est la valeur sémantique sociative à laquelle ces constructions se rattachent et si elles peuvent tout de même exprimer une causation directe. Pour les autres causatives morphologiques, les suppositions sur le sémantisme qu'elles véhiculent sont plus difficiles. Pour les causatives dérivées en lu, ce n'est pas parce que le causataire n'est pas apparent que cela implique que le causateur effectue l'action. La construction des causatives en loo n'apporte aucune indication sur le sémantisme de cette construction, tandis que le sémantisme particulier du suffixe –le indique que la participation du causateur est de type sociatif. Il nous faudra à ce propos vérifier d'une part si la valeur sociative ne tient que pour le suffixe –le ou si elle s'étend à plus de causatives morphologiques, et d'autre part si ces causatives morphologiques se rapprochent de la causation directe ou de la causation indirecte.

Pour les causatives périphrastiques et les causatives à prédicat complexe, la fréquence d'utilisation de la forme tax implique que cette construction aura un champ sémantique large. Il s'agit donc de la construction qui pourra, très certainement, en plus d'exprimer une causation indirecte s'étendre dans l'expression d'une causation sociative. La position de def par rapport à tax reste à être éclaircie, bien que la faible utilisation de def laisse supposer qu'elle exprimera seulement une causation indirecte et/ou une causation sociative restreinte. Pour bàyyi 'laisser', le sémantisme du lexème verbal laisse supposer qu'il s'agit de la construction qui exprimera la causation la plus indirecte. Dans la section suivante, nous allons tenter de voir jusqu'où cette hiérarchisation est correcte.