2.1. Avantages compétitifs et avantages distinctifs

Pendant de nombreuses années, la notion d’avantages compétitifs a été au cœur de l’analyse économique et stratégique. Dans cette partie, nous introduirons une notion nouvelle, celle des avantages distinctifs qui nous parait mieux adaptée au contexte actuel et constitue l’un des piliers de la proactivité.

2.1.1. Définition des concepts

Les théories concernant la gestion des avantages trouvent leurs sources dans l’analyse économique de production développée par Smith ou Ricardo. A ce niveau, l’analyse porte uniquement sur les coûts de production, chaque pays devant rechercher quels sont ses avantages comparatifs (par rapport aux autres pays) ou ses avantages absolus. Si la démonstration se fait au niveau macro-économique, il n’est pas difficile de la transférer au niveau micro-économique. Une entreprise détiendra un avantage comparatif par rapport à d’autres si ses coûts de production sont moindres. Ce type d’analyse a donné naissance à une vision purement analytique basée sur le contrôle des coûts, la maîtrise des économies d’échelles et des dépenses, négligeant certains éléments tels que la création de valeur.

La chaîne de valeur développée par Porter permet d’introduire une grille d’interprétation différente et déplace la notion d’avantages compétitifs vers celle d’avantages concurrentiels. Cette méthode distingue deux objectifs différents :

  • soit un objectif d’avantages dérivant d’une maîtrise des coûts,
  • soit un objectif d’avantages par différenciation.

Dans les deux cas, l’analyse débute par une identification de la chaîne de valeur de l’entreprise. Ensuite deux scénarii sont envisageables selon l’objectif que l’on se propose d’atteindre :

Figure 2.1. : Schéma d’analyse suivant l’objectif concurrentiel à atteindre
Figure 2.1. : Schéma d’analyse suivant l’objectif concurrentiel à atteindre

Nous dirons que le premier type d’objectif est caractéristique d’une stratégie linéaire et/ou adaptative. L’entreprise doit en effet s’adapter à ses concurrents et transformer sa chaîne de valeur en fonction de ces derniers pour maintenir des avantages compétitifs. C’est une tactique à court terme (l’adaptation étant sans cesse remise en cause par les variations du marché) et qui repose sur des avantages facilement transférables : la maîtrise des coûts. Le second type d’objectif s’apparente plutôt à une politique d’avantages distinctifs. L’ensemble des propositions faites par Porter s’applique à tisser des liens entre l’entreprise et ses clients. Ces liens seront par définition uniques, chacune des chaînes de valeur s’imbriquant dans l’autre. L’avantage qui en découle est donc difficilement transférable et copiable.

Les avantages distinctifs, pour leur part, sont orientés vers la mise en place de liaisons entre les différentes compétences de l’entreprise. C’est dans la densité de ce maillage que se lit la caractérisation de l’avantage distinctif. D’après Lavalette et Niculescu 52 «s’il est toujours possible de copier une compétence, la capacité à les interrelier dans le cadre d'un système d'information interne à l'entreprise s'avère quasiment impossible. Nous dirons qu'il s'agit du noyau dur de compétences ». La notion d’avantages distinctifs va plus loin encore et implique que ces compétences doivent être reliées, non seulement entre elles en interne, mais également connectées à l’externe. C’est précisément dans cette connexité que nous retrouvons l’essence même de l’avantage distinctif : non transférable et propre à chaque entreprise.

Notes
52.

Lavalette G et Niculescu M., Les stratégies de croissance, ibid, p.32