2.2.3. L'absence de pilotage stratégique

Le pilotage stratégique s’axe autour de deux composantes majeures :

Deux séries d’actes de pilotage découlent de cette définition :

Nous soulignerons ici que la réalisation de ces actes, et à fortiori leur non-réalisation, sont indépendantes du niveau hiérarchique.

La déclinaison du pilotage stratégique en instrument direct d’observation des remontées terrains est l’un des aspects qui laisse le plus souvent à désirer dans les entreprises. Cela est attesté notamment par :

Si nous interprétons ces phrases témoins à la lumière de la définition citée précédemment, nous pouvons affirmer qu’elles dénotent une absence totale d’actes de prévention, et sont principalement centrées sur des actes de régulation ou de corrections. Selon Lavalette et Niculescu 58 (1999), nous ne pourrions invoquer un pilotage stratégique puisque «le contrôle ne peut se faire qu'après l'action accomplie. Le pilotage se réfère à des indicateurs qui permettent de réagir avant que les effets de l'action ne soient devenus irréversibles.»

Le manque de temps dévolu au pilotage stratégique se traduit par une absence de formalisation des informations, et donc de valorisation de ces dernières. Les mêmes auteurs 59 rappellent que «le rapprochement des résultats formels et dérivés aux différentes actions engagées pour les mettre en œuvre permet le pilotage ». Si ce rapprochement n’existe pas, faute de temps ou de savoir- faire, il n’y a plus lieu de parler de pilotage. Il advient alors ce que Jullien 60 (1996) désigne comme une «méthode dont l'application constante et uniforme vient à engendrer une sorte d'aptitude mécanique de moins en moins adaptée à mesure qu'on s'élève dans la hiérarchie des responsabilités et qu'on quitte le plan tactique pour celui de la stratégie ». Se mettent alors en place des actions directement contradictoires avec la stratégie présentée comme étant celle à initier. Sur le terrain, les effets de ce manque sont très fortement ressentis et affectent l’organisation de façon transversale. A partir des observations directes, les différentes sphères concernées par cette absence de pilotage peuvent être identifiées comme suit :

Divers enseignements peuvent être tirés du décodage de ces expressions et déclinés de façon très concrète :

De nombreux projets ont été lancés et de nombreuses formations ont été suivies par l’ensemble du personnel, mais il semble que peu d’améliorations visibles soient recensées sur le terrain. Toute action de progrès nécessite un pilotage persévérant de la hiérarchie.

La mise en place de méthodes de travail communes, au moyen de l’utilisation d’outils structurants, a été rendue difficile par manque de réel consensus et de cohésion de l’équipe. L’inexistence d’indicateurs (balances économiques, grilles de coûts cachés, paniers,…) de suivi des projets tend à rendre malaisée l’évaluation des actions menées et leur contribution à la performance de l’entreprise.

Le non-respect des résolutions prises, ainsi que le manque de portage par le personnel, plusieurs fois évoqués en groupe de projet, sont symptomatiques de l’absence de pilotage concret.

L’utilisation systématique d’outils de pilotage et de suivi n’est pas encore acquise alors que ces outils devraient permettre de renforcer la synergie entre les différents axes :

Figure 2.3. : Liaisons problématique de gestion et outils manageriaux
Figure 2.3. : Liaisons problématique de gestion et outils manageriaux

Exiger que ces outils soient automatiquement utilisés pourrait non seulement aider à structurer l’activité et le rôle des cadres, mais aussi à limiter la familiarité dans les relations au sein de l’encadrement et de la direction.

Le tableau suivant récapitule les principaux dysfonctionnements élémentaires, recensés dans ces entités concernant l’absence de pilotage stratégique, dont les répercussions ont été estimées à 983 000 F pour l’entité A et à 199 800 francs pour l’entité B.

Figure 2.4. : Dysfonctionnements élémentaires liés à l’absence de pilotage stratégique
Figure 2.4. : Dysfonctionnements élémentaires liés à l’absence de pilotage stratégique

Nous voyons bien que la conjonction de ces lacunes occasionne une perte d’opportunités ou une dépense d’énergie qui pourrait être plus utilement dirigée vers la création de potentiel et de valeur au lieu d’être consacrée à des actions de régulation récurrentes.

Notes
58.

Lavalette G et Niculescu M (1999) ; Les stratégies de croissances, ibid.

59.

Lavalette G et Niculescu M (1999) ; Les stratégies de croissances, ibid.

60.

Jullien, F.1996, Traité de l’efficacité, ibid.