4.2.2. La notion de fertilisation croisée

Le principe de fertilisation croisée est défini par Savall et Zardet 134 (1995) comme étant une « action de production enrichie par interaction de champs d’activité et de réflexion ».

Dans un premier temps, cette définition peut s’appliquer au cœur même de l’entreprise. Pendant des années, les services fonctionnels des organisations ont peu communiqué entre eux, et il subsiste encore des séquelles de ce type de relations. La finalité du management socio-économique est avant tout de mettre en place un noyau dur de management stratégique général, basé sur l’acquisition d’un ensemble de réflexes communs à tous les acteurs. Ceci implique le renforcement des relations transversales à l’intérieur même de l’entreprise entre les différents services.

La fertilisation croisée s’obtient à partir d’une interaction entre ceux-ci et plus particulièrement de l’échange des informations qui ont fait l’objet d’un traitement spécifiques par l’une des entités de l’entreprise. Nous pourrions qualifier cette notion de fertilisation croisée interne.

D’autre part, les sciences de gestion se sont développées en faisant des emprunts majeurs à d'autres sciences. Morgan 135 s'interroge, par exemple, sur ce qu'il resterait des sciences de gestion si l'on en éliminait les concepts empruntés à la mécanique, à la biologie et aux sciences humaines. Cet apport peut être qualifié de fertilisation croisée externe (car provenant de l’extérieur de l’entreprise).

La gestion est une discipline jeune, issue en partie de l’économie, chez qui elle puise ses références. Dans son ouvrage «la richesse des Nations », Smith identifie le travail comme le principal facteur de cette richesse (faut-il rappeler ici que l’économie n’est pas exempte elle-même de recours à d’autres sciences et que Smith était avant tout un philosophe qui espérait connaître le succès avec sa «théorie des sentiments moraux » ?). Say, dans le «traité d’économie politique » analyse et définit les notions d’industrie et d’entrepreneur. Si l’on assiste, avec les néo-classiques, à une distanciation des relations entre l’économie et l’entreprise, des auteurs comme Schumpeter ou Perroux vont la replacer au centre des analyses économiques (parfois même en utilisant des concepts tels que la plasticité, concept venu des sciences dite dures).

Par ailleurs, les premiers pas en gestion ont été accompli grâce à l’impulsion d’ingénieurs (Taylor, Fayol, Mayo) qui imprimeront une orientation bien spécifique : l’organisation scientifique du travail, qui tire sa substance des sciences exactes.

Mais, alors que l’économie va chercher à modéliser des relations typiquement basées sur des coûts et des échanges (modèle classique), la gestion va, quant à elle, s’ouvrir petit à petit à d’autres domaines, englobant les phénomènes psychosociaux à l’œuvre dans tous les groupes.

Nous pensons que le concept de fertilisation croisée peut permettre :

Nous nous intéresserons maintenant à un type particulier de fertilisation qui sera développé dans le second chapitre de cette deuxième partie.

Notes
134.

Savall H.et Zardet V.,1995, l’ingénierie stratégique du roseau, op cited p 497

135.

Morgan, G., 1983, More on metaphor : why we cannot control tropes in administrative Science, Administrative Science Quaterly, 28, n°4, 601-607