4.3.1. Le processus de définition d'un concept

Lorsque nous analysons les différentes approches du processus de production de connaissances en sciences de gestion, nous constatons que l’utilisation du langage renvoie à des problématiques de type différent :

  • Ontologique : approche réaliste/nominaliste,
  • Epistémologique : approche positiviste/constructiviste,
  • Praxéologique : le rôle de la métaphore en tant qu’outil de compréhension de la réalité ;
  • Paradigmatique : utilisation d’une ou de plusieurs métaphores.

Pour Desreumaux 140 (1998), deux premiers conflits sont d'ordre ontologique et renvoient à la question de savoir si la réalité organisationnelle est produite par la métaphore ou bien si elle existe indépendamment des descriptions métaphoriques que l'on peut en faire.

Pour Nietzche 141 (1979), le processus de connaissance n’est rien d’autre que travailler avec des métaphores, la vérité étant une illusion, un ensemble mouvant de métaphores de métonymies et d’anthropomorphisme.

Dans une approche réaliste, la métaphore s’apprécie par rapport à sa capacité à retraduire l’essence d’une réalité donnée : existence d’une réalité en soi que la métaphore va éclairer. Dans une approche nominaliste, l’usage multiple de métaphores doit permettre d’éviter un cloisonnement et de privilégier à l’excès un point de vue parmi les autres : pas de réalité en soi mais une multitude d’interprétations de la réalité. Nous avons déjà soulevé les problèmes épistémologiques que pose l’utilisation de la métaphore, selon que l’on s’inscrit dans une logique constructiviste ou positiviste. Nous reviendrons sur ces aspects de façon plus détaillée dans le chapitre suivant.

Dans la phase de définition des concepts, nous voyons poindre une autre source d’interrogation. Les sciences de gestion sont à la croisée des sciences dites dures et des sciences dites molles. De plus elles intègrent des éléments théoriques ainsi que des éléments pratiques.

Figure 4.12. : Sciences de gestion et modèles théoriques
Figure 4.12. : Sciences de gestion et modèles théoriques

Une dichotomie entre ces différents pôles est donc possible. Il existerait alors des zones dans lesquelles certains aspects auraient un poids supérieur à d’autres. Cela revient à dire que sur un axe donné, le processus de définition d’un concept peut évoluer entre deux bornes, l’une praxéologique, la seconde plus théorique. De même, les concepts utilisés en sciences de gestion peuvent dériver d’une analyse avec une formalisation mathématique très poussée ou au contraire trouver leur genèse dans une approche beaucoup plus qualitative. Dans ce cas, la majorité des modèles théoriques passe par une phase de verbalisation : processus par lequel des mots sont associés à une idée. C’est à cette phase que nous allons maintenant nous intéresser.

Notes
140.

Desreumaux, A., 1998, Théories des organisations, Paris , Editions Management Sociétés

141.

Nietzsche, F.W., 1979, Philosophy and Truth : Nietzsche’s Notebooks of the early 1870’s, D. Breazeale, ed., Atlantic Highlands, NJ, Humanities Press