6.1.1. Notion de Ki (chi ou Prana) (énergie)

Le concept de Ki est présent sous différentes appellations dans l’ensemble du bassin asiatique et peut revêtir des acceptions différentes. On en retrouve l’essence dans le Prana en Inde, le Qi ou Chi en Chine et le Ki au Japon. En japonais, le terme est composé de deux idéogrammes. Le regard pictographique classique nous en fournit une image très révélatrice : deux radicaux liés, le riz et la vapeur. Ces deux idéogrammes ont fait l’objet de recherches pointues, portant sur leur signification, et dont les conclusions varient d’un auteur à l’autre.

Pour Cauhépé et Kuang 238 (1998), le terme Ki peut être interprété comme un synonyme des mots suivants :

  • esprit,
  • énergie vitale,
  • habileté,
  • opportunité,
  • instant favorable.

Pour d’autres auteurs, le Ki est principalement centré sur la notion d’énergie et plus particulièrement sur celle d’énergie vitale. ( Wesbrook et Ratti 239 (1996) ou Protin 240 (1977)). Cette dernière est appréciée comme la résultante de l’harmonisation et de la coordination des composantes physiques et mentales préalablement rassemblées et centralisées dans le hara (le ventre, les entrailles). Pour Tohei 241 (1978), ancien chef instructeur de l’Aikikai (maison mère) et fondateur de l’école du Ki, cette énergie, qui reflète le parfait équilibre entre l’esprit et le corps, est symbolisée, au niveau physique, par le flux de la respiration.

Uemura 242 (2000) soumet à notre réflexion un autre axe de définition du concept. Pour lui, le Ki doit être compris comme « l’information et / ou le caractère même que l’on envoie généralement par l’intermédiaire des ondes électromagnétiques de son corps. » Il s’agit là de l’introduction récente d’une différenciation fondamentale, car cet auteur spécifie que la notion n’est pas synonyme d’énergie mais bien d’information, et que c’est précisément cette information qui va générer l’énergie.

En règle générale, il est communément admis que le terme Ki est impossible à traduire. On le retrouve dans diverses expressions japonaises avec un sens différent à chaque fois. Nous pouvons cependant dresser avec Ueshiba 243 (2001) l’archétype sur lequel repose cette notion, et qui comprend :

  • une dimension spirituelle : âme, esprit ,
  • un niveau affectif : instinct, intuition, sentiment,
  • un axe psychophysiologique : respiration, souffle.

D’une façon plus ésotérique, le même auteur 244 (1981) définit le Ki comme «le principe et l’harmonie, la source de la créativité exprimée dans le Yin et le Yang (Laozi), la vacuité vitale (Huinanzi), le courage né de la rectitude morale (Mengzi) et la force divine pénétrant toute chose ».

Dès à présent, nous conviendrons d’utiliser ce terme sachant qu’il agrège les trois aspects évoqués précédemment. Nous verrons, dans une prochaine partie, l’apport concret de ce concept à la compréhension du monde organisationnel.

Notes
238.

Cauhépé J-D & Kuang A., (1998), Métamorphose de la violence par l’aïkido de Surikiri, Guy Trédaniel Editeur

239.

Westbrook a. & Ratti O.Aïkido, (1996), introduction à la sphère dynamique, Vigot

240.

Protin, A.,(1977) Aïkido, un art martial, une autre manière d’être, Collection « horizons spirituels » Editions Dangles

241.

Tohei, K.,(1978), Ki in Daily Life, Tokyo : K. N. Kenkyukai HQ

242.

Uemura Shigueru,(2000), Le ki dans la vie quotidienne, , Arts Martiaux traditionnels d’Asie, Septembre-Octobre , p 34

243.

Ueshiba, K ; (2001), Aïkido et Aikibudo, Les dossiers de Karaté Bushido, Avril

244.

Ueshiba, K ; (1981) The spirit of aikido, Kodansha Int.Ltd