9.3.2. Actions directes, destructrices et actions indirectes destructuratrices

La proactivité ne se compose pas uniquement d'actions directes ayant un impact immédiat et destructeur sur l'environnement. Des actions indirectes sont à mettre en œuvre pour induire des effets destructurateurs sur l'environnement.

Cette analyse figure dans la stratégie militaire sous l’appellation : stratégie indirecte.

Comme le rappelle Le Roy 311 (1999), dans ce type de conduite de la guerre (style stratégique qualifié d'indirect), il ne faut livrer bataille que quand tous les autres moyens possibles pour imposer sa volonté à l'adversaire ont été épuisés. De même, la bataille doit être réduite le plus possible, car peu de résultats probants s'ensuivent d'un affrontement frontal. Nous noterons l’opposition flagrante de ce type d’analyse aux développements occidentaux tels que ceux de Clauzewitz 312 qui spécifie que la destruction des forces armées ennemies doit être recherchée principalement par de grandes batailles et le but des grandes batailles doit être la destruction des forces armées de l'ennemi.

Dans ce cadre, seule l'offensive permet d'atteindre un objectif valable ou de détruire les forces ennemies. Le concept de base est dénommé Doctrine de la Bataille Aéroterrestre. Le but de cette doctrine est de saisir ou de garder la liberté d'action (doctrine américaine)(Colson 313 (1993)).

A l’inverse, Liddle Hart 314 (1962) remarque que les résultats les plus significatifs ont été obtenus par une approche se refusant à la décision par la bataille. Il baptise alors ce type de stratégie : approche indirecte

Pour Fuller 315 (1963), il existe deux façons de détruire l’organisation de l’armée ennemie :

Dans le cadre de la gestion, Koenig 316 (1990) rappelle le conflit n'est que l’une des situations relationnelles que peuvent entretenir ses producteurs. Il souligne que trois attitudes sont possibles : l'affrontement, l'évitement et la coopération.

Cet auteur renvoie aussi à Perroux qui soutient que la relation sociale entre les agents pour la disposition des choses ne peut être un conflit pur, destructeur, qui limiterait la disponibilité des biens. Elle ne peut non plus s'assimiler à une coopération pure.

Nous assistons donc à l’apparition de méthodes dont l’objectif n’est pas de produire un effet direct sur l’environnement mais plutôt de créer un climat favorable. A ce titre et par exemple, la dissuasion est une stratégie de prévention des conflits, qui consiste à persuader un concurrent potentiel que vous êtes «disposé à» et «capable de» le punir sans merci, simplement au moyen de votre volonté clairement exprimée et comprise (James 317 (1984)).

Il est alors logique de souligner avec Jullien 318 (1996) que tandis que l'objectif de la guerre, envisagée du point de vue de l'action, est la destruction de l'adversaire, il devient, quand elle est envisagée du point de vue de la transformation, sa déstructuration. Toute la stratégie chinoise repose sur l’art de faire évoluer - à titre préalable - le rapport antagoniste, de façon que finalement, le conflit soit réglé avant même d’avoir reçu un début d’engagement.

Notes
311.

Le Roy F, 1999, Stratégie militaire et management stratégique des entreprises, ibid.

312.

Clauzewitz, 1955De la guerre, Minuit paris

313.

Colson B. 1993,La culture stratégique américaine, Economica Paris

314.

Liddle Hart B.H. 1962, Histoire mondiale de al stratégie, , Plon, Paris

315.

Fuller J.F.C,1963, La conduite de la guerre de 1798 à nos jours, Payot Paris

316.

Koenig G, 1990, Management stratégique, Nathan Paris

317.

James B.G., 1984, Business Wargames, Abacus Press, Trundbridge Well

318.

Jullien F, 1996, Traité de l’efficacité , ibid.