4.10) Risque et routines de travail : le cas du Secteur d’Enlèvement de Déchets.

Le troisième secteur que nous analyserons est le service d’enlèvement de déchets. Ce secteur se charge de la circulation et de l’évacuation du matériel contaminé de l’hôpital, ce qui lui donne un rôle stratégique dans la gestion du risque organisationnel. Les dernières années l’utilisation croissante de matériel jetable a augmenté considérablement le volume des ordures à l’hôpital. Actuellement l’hôpital met en sacs, en moyenne, 7.000 kilos d’ordures chaque jour. L’institution ne dispose pas des ressources nécessaires pour acheter des conteneurs à parois rigides pour y entreposer les ordures. Il y a un certain temps, les déchets étaient versés dans des réservoirs à gas-oil sans couvercle où le personnel versait aussi les déchets contaminés. A l’heure actuelle, l’hôpital a développé des procédés techniques plus élaborés, comme l’utilisation de sacs et des ascenseurs spéciaux pour les transporter.

L’enlèvement des déchets se fait, en grande partie, le matin, parce qu’à cette heure-là l’activité diminue considérablement, ce qui facilite la tâche. La concentration du travail dans cet horaire a impliqué une modification globale des emplois du temps, changement qui a rencontré, au début, une certaine résistance de la part des travailleurs. Après de nombreuses réunions et discussions, les travailleurs ont admis l’avantage de ce nouveau système.

En ce qui concerne le traitement des ordures, l’hôpital semble suivre les critères définis par la “ Intendencia Municipal de Montevideo ” (la Municipalité) : utiliser des sacs jaunes pour enlever les ordures contaminantes et des sacs noirs pour les autres. Cependant, jusqu’à présent il n’existe pas de contrôle de ce qui se passe avec les ordures pendant qu’elles restent déposées en attendant d’être emportées par les camions des éboueurs. 217 La possibilité que les chiffonniers emportent des déchets contaminés a obligé l’hôpital à établir une zone protégée, fermée à l’extérieur et avec des tuyaux pour le lavage. Cette décision semble contredire l’orientation générale qui valorise plus les risques immédiats sur les médiats. L’explication semble être que ce risque est plus visible que les autres. La présence des ordures dans les lieux publics et le trafic qu’effectuent les chiffonniers constitue des éléments qui exercent une pression et obligent à destiner des ressources pour obtenir des solutions. Cette issue est due aussi à la pression exercée de l’extérieur de l’hôpital par les autorités municipales chargées du traitement des déchets hospitaliers. La pression externe tient aussi à la plus grande visibilité de ce risque spécifique.

L’organisation du travail et des routines quotidiennes constitue une des principales sources de risque de ce secteur. Une autre source de risque est la distance entre les normes prescrites pour le travail et le comportement réel des individus. Ces deux composantes sont présentes dans le travail d’enlèvement de déchets.

En relation au décalage entre les normes prescrites et le comportement productif, dans le secteur, on constate que les normes d’enlèvement des déchets ne sont pas suivies de manière systématique, ce qui donne lieu à une zone de risque systémique. Souvent on traîne les ordures au long des étages sans tenir compte des possibilités de contagion que cela comporte. Le classement des déchets n’est pas fait, non plus, d’une manière correcte. Les travailleurs ne mettent pas toujours le matériel contaminé dans les sacs jaunes car ces sacs-là sont plus résistants et, par conséquent, plus recherchés et remplis aussi avec des déchets non contaminants. Il faudrait trier les déchets avant de les mettre en sacs, mais, cette tâche comportant beaucoup de risques, les travailleurs n’en font rien.

 Les travailleurs qui enlèvent les déchets sont exposés à des piqûres, principalement aux mains. La routine recommandée par la Direction de l’hôpital qui consiste à éviter d’écraser les ordures avec les mains a fait diminuer le nombre de piqûres. Une autre recommandation : prévenir les autorités en cas de piqûre de manière à essayer de repérer l’origine des aiguilles. Cette recommandation n’est pas toujours respectée bien qu’il existe l’obligation formelle de le faire. ” 218

Dans l’enlèvement des ordures, les travailleurs emploient des pratiques incorrectes qui augmentent l’exposition aux risques. Pour ne pas charrier les récipients, ils transvasent les déchets dans les sacs dans les étages même, augmentant ainsi le risque de contamination. Les sacs-poubelle sont descendus fermés, cependant la fermeture des sacs jaunes présente des difficultés. C’est pour cette raison que l’hôpital a acheté des plombs spéciaux mais ils ne sont pas toujours posés. Conséquence : bien souvent les travailleurs transportent les sacs jaunes contenant du matériel contaminé ouverts, ce qui implique une exposition permanente aux risques de contamination pour le travailleur et pour l’environnement. Une pratique qui pourrait minimiser les risques ce serait de charrier les ordures avec des moyens adéquats, mais l’hôpital n’en a pas. Une autre option, ce serait de réduire la taille des sacs, mais cela impliquerait plus de personnel pour couvrir les 24 heures de service, ce qui représente un accroissement des dépenses que l’hôpital ne peut pas se permettre.

Les travailleurs ne respectent pas non plus les temps et les rythmes dans l’enlèvement des déchets qui sont, pourtant, clairement spécifiés dans les routines de travail. Il arrive souvent que l’on trouve des sacs jetés par terre aussi bien dans l’hôpital que dehors. Il est fréquent aussi qu’on tarde plusieurs jours à enlever les ordures.

Une autre pratique quotidienne qui constitue un risque pour l’environnement se produit au moment où l’on dépose les sacs dans les bennes de la voirie municipale. Les déchets, comme nous l’avons dit plus haut, sont séparés et mis dans des sacs jaunes ceux qui contiennent du matériel contaminé et dans des sacs noirs ceux qui contiennent.des ordures courantes. Cependant dans le camion de la voirie qui compacte les ordures, on mélange les différents types de déchets qui seront brûlés plus tard. Pour couronner toute l’opération, on finit par annuler toutes les préventions qui accompagnaient la mise en sacs des déchets et, par là, on produit une autre zone de risque.

Une norme des travailleurs, qui n’est pas écrite mais qui fait partie de leur routine de travail, consiste à essayer de finir le travail le plus vite possible. Une tâche programmée pour être accomplie en 5 heures est terminée au bout de 3 heures de sorte que les travailleurs se reposent les 2 heures restantes. Cette pratique est la plus nuisible du point de vue santé et risque car elle exige plus d’effort et le travailleur prête moins attention à sa tâche.

Le travail d’enlèvement de déchets a un composant important de charge physique. L’utilisation d’ascenseurs pour le transport des ordures a supposé un progrès dans cet aspect. Les travailleurs de ce secteur disposent actuellement d’un ascenseur pour eux, contrôlé par le groupe. La mise en sacs des déchets est faite par les nettoyeurs et les travailleurs du secteur d’enlèvement des déchets les transportent jusqu’au rez-de-chaussée et, après, jusqu’à la benne de la Voirie Municipale.

Un travailleur explique :

 On transporte, en moyenne, dix sacs par étage, mais, des fois, ça varie. On essaie de retirer les ordures chaque jour. A une époque, on n’avait pas d’ascenseur, on traînait les sacs dans tout l’hôpital. Maintenant on en a réparé un exprès pour nous. Ce n’est pas nous qui mettons en sacs les ordures, c’est le secteur nettoyage.” 219

L’installation d’ascenseurs a supposé un changement dans l’organisation du travail et a réduit l’effort physique mais a favorisé de nouvelles zones de risques. Bien qu’ils aient leur propre ascenseur, souvent, pour transporter les déchets, les travailleurs doivent traverser des salles en exposant ainsi malades et visiteurs : le système de circulation des déchets hospitaliers se transforme en une zone de risque.

 Des fois, il faut traverser des salles pleines de malades à cause de l’ascenseur au 16e et aux 11e étages ; pour nous il n’y a pas de risque, le risque est pour le patient. Mais le plus gros problème, c’est avec les cabines : quand une cabine tombe en panne il faut utiliser un autre ascenseur et le laver après.” 220

Les ascenseurs (cabines) ne sont pas utilisés seulement pour le transport des ordures. Ils sont utilisés par d’autres services de différentes sortes. Cela constitue aussi un facteur de risque malgré les préventions des travailleurs en ce qui concerne le nettoyage.

 Quand on utilise un ascenseur, on le lave complètement, on le prépare pour être utilisé par un autre service. Avant on travaillait avec des bacs, maintenant on sort les déchets dans des sacs. Les déchets de nourriture vont dans un autre camion.” 221

Les travailleurs de ce secteur ont une claire perception des risques liés à leur tâche. D’un côté il y a une perception des risques diffus liés au travail dans un hôpital.

 Ici, la contamination est dans l’air, les risques, on les connaît, plus ou moins. Nous disons qu’il faut utiliser couvre-bouches, mais on ne nous laisse pas entrer pour que nous ne contaminions pas les patients.” 222

D’un autre côté il existe une perception des risques spécifiques liés au travail. Les éléments de risque les plus importants sont associés à la manipulation des sacs de déchets et à la possibilité qu’ils se déchirent ; toutefois, les travailleurs voient là un risque très peu probable.

 On est exposé tous les jours ; il y a des sacs qui contiennent on ne sait pas quoi, il y a des sacs avec des bouteilles contaminées qui peuvent se casser ; il faut être très prudent . Il faut prendre des précautions avec les déchets. Maintenant, les infirmières jettent les aiguilles. Il y a eu des collègues qui se sont blessés, mais il est rare qu’un sac se déchire.” 223

La perception des risques semble plus homogène parmi les travailleurs du secteur d’enlèvement de déchets que parmi les travailleurs du Centre de Matériel et du secteur de nettoyage. Cette homogénéité plus grande paraît être associée, comme nous le verrons ultérieurement, à une forte cohésion au niveau du groupe et à une plus haute légitimité de la part des supérieurs hiérarchiques du secteur.

Une autre source de risque est associée à la négligence ou à des erreurs dans le travail effectué dans d’autres secteurs de l’hôpital. En particulier, ceux qui enlèvent les ordures critiquent beaucoup ceux qui sont chargés de les mettre en sacs et de sceller les sacs. Les travailleurs de ce secteur ont acquis dans l’apprentissage du travail une connaissance pratique extrêmement sensible qui leur permet de prévenir les négligences au moment de sceller les sacs.

 On doit contrôler que les sacs sont scellés ; on y fait très attention ; des fois, ils mettent du sparadrap, on remarque qu’il y a un peu de négligence ; tous les jours on découvre des endroits où ils ne font pas suffisamment attention. Dès que tu prends un sac tu sais ce qu’il y a dedans, si c’est un simple volume ou s’il y a un autre matériel ; depuis le temps qu’on est là, on sait bien, c’est notre expérience ; ce qu’on sait c’est que tout déchet contaminant, il faut l’enlever tout de suite, par exemple le matériel qui vient du bloc opératoire ou de la maternité, où il y a du sang.” 224

A l’instar de ce qui se passe dans le Centre de Matériel, le secteur d’enlèvement de déchets souffre de toutes les déficiences structurelles dans les formes d’organisation du travail propres à l’institution. Cette surcharge est compensée par le développement d’une capacité pratique qui leur permet de détecter les composantes du risque présentes dans leur travail.

La circulation des déchets se termine avec leur charge dans le camion de la Municipalité qui les transporte hors de l’hôpital afin de les éliminer. Il s’agit d’un camion conçu spécialement pour le transport des déchets hospitaliers. Souvent, le camion ne passe ni à l’heure ni le jour prévus, ce qui signifie que les ordures s’accumulent et se décomposent. Il y a aussi des conflits par rapport à la charge des déchets dans les camions. Ce travail est de la responsabilité de la Municipalité, mais souvent le chauffeur du camion vient tout seul, sans les hommes de peine, ce qui oblige les travailleurs de l’hôpital à effectuer ce travail qui ne leur revient pas.

 On a des problèmes avec le camion de la Municipalité ; on en a déjà parlé au Directeur, on ne sait pas s’ils sont en train de faire le jeu pour privatiser le secteur... c’est le chef qui le sait et c’est comme ça, c’est compliqué avec la Municipalité ; avant il y avait des conteneurs et ils envoyaient le chauffeur avec deux hommes de peine ; maintenant qu’ils ont supprimé les conteneurs, on ne sait pas pourquoi ils n’envoient que le chauffeur et c’est nous qui devons leur courir après pour qu’ils viennent enlever les ordures ; c’est un problème, si le camion ne les enlève pas elles s’entassent et, après, le travail est double. C’est un camion spécial qui enlève les ordures hospitalières ; des fois c’est notre problème: il y a des collègues qui, quand le camion arrive, se refusent à le charger, ça arrive aussi. Ce sont des camions qui rendent compactes les ordures, le chauffeur lui-même vérifie que les ordures sont pressées. ” 225

La surcharge de travail est un facteur qui augmente les risques, bien que, dans ce cas, cette affirmation doit être relativisée. Les travailleurs d’enlèvement de déchets, malgré leurs plaintes, ont une charge de travail relativement légère ce qui facilite la prévention des risques.

En dépit des risques du travail, il n’y a pas, de la part des travailleurs, la perception de l’existence, dans le secteur, des maladies professionnelles importantes. Les seules allusions sont liées à la possibilité d’attraper des rhumes du fait des mauvaises conditions de l’infrastructure.

 Il n’y a pas eu de transfert de travailleurs pour des problèmes de santé. Les effectifs sont stables. Pourtant, c’est ici que nous prenons une douche après le travail et ici il y a un vent terrible et l’on peut tomber malade. On nous a fait une salle de bains à notre demande... il peut y avoir quelques problèmes, mais il faut avoir de la bonne volonté... ici le problème c’est le manque d’argent et nous savons ce qu’il faut faire. ” 226

Cette situation est similaire à celle que nous avons vue dans le Centre de Matériel et dans le secteur du nettoyage. La perception des risques est dissociée des torts soufferts par les travailleurs, ce qui montre l’existence d’une conscience des risque relativement développée chez les ramasseurs.

La formation se fait pendant le travail en échangeant des connaissances avec les autres travailleurs. La maîtrise des situations de risque fait partie de cette formation où le travailleur apprend à prendre les précautions nécessaires et à mesurer le rythme du travail.

 Moi, j’ai appris à travailler avec l’équipe, je n’ai pas eu de formation préalable. Avant, j’étais au nettoyage, ici je suis mieux. Il faut plus d’effort physique mais moins qu’à l’époque des cuves. On est exposés tous les jours, il y a des sacs qu’on ne sait pas ce qu’ils contiennent, il y a des sacs avec des bouteilles contaminées qui peuvent se casser ; il faut faire très attention.” 227

A la différence de ce qui se passe dans le secteur du nettoyage, le manque de formation spécifique en ce qui concerne les tâches n’est pas considéré par les travailleurs du secteur d’enlèvement de déchets comme une carence importante ; ils estiment la formation pratique suffisante pour la prévention des risques. Cette différence dans l’évaluation de la formation est associée à la relation avec les hiérarchies directes du secteur. Dans le cas du secteur de nettoyage, le manque d’autorité et d’encadrement entraîne une situation d’insécurité chez les travailleurs par rapport aux situations de risque. La formation est vue comme une compensation de cette insécurité qui a son origine et ses fondements dans l’organisation du travail. Par contre, dans le secteur d’enlèvement des déchets, le rapport avec les supérieurs immédiats est positif. Ils éprouvent du respect envers le contremaître qui leur donne son appui et sa collaboration au-delà des fonctions spécifiques de sa charge. Les relations informelles dans le groupe d’enlèvement des déchets sont positives aussi. Il y a l’esprit d’équipe et il n’existe pas de conflits importants.

 Les rapports entre les travailleurs sont bons. Avec les supérieurs aussi ; ici il faut venir faire sa tâche, un point, c’est tout ; si l’on respecte l’horaire et que l’on fait sa tâche, il n’y a pas de problème. Le problème est qu’il n’y a pas suffisamment de gens. Des fois, je vois que la direction a du mal à assurer le service dans certaines aires, faute de personnel; ici, au Clínicas, beaucoup de gens sont partis et il est impossible de les remplacer.” 228

La légitimité de l’autorité hiérarchique immédiate et les liens formels et informels qui s’établissent entre les chefs et les employés conditionnent l’attitude de tout le groupe de travail face au risque. La légitimité des normes d’autorité permet la construction de relations de confiance, en réduisant les possibilités de risque.

Le secteur d’enlèvement des déchets se caractérise par un important roulement du personnel. De même que dans d’autres secteurs de l’ “ Hospital de Clínicas ”, il existe un rapide processus initial de sélection. Ceux qui peuvent endurer l’effort physique et les conditions du travail demeurent pendant longtemps parmi le personnel stable. Ceux qui n’y arrivent pas abandonnent rapidement le secteur.

 En une année, 32 personnes sont passées par ce service. Les gens ne s’y habituaient pas, beaucoup manquaient ou ne faisaient pas le travail dans les temps requis. Le nettoyage est plus valorisé que notre travail, ça se voit au manque d’intérêt de venir travailler ici .Ce n’est pas un endroit recherché par d’autres travailleurs. Une fois on m’a demandé d’aller dans un autre service et ils ont amené ici d’autres gens ; on a vu que personne ne restait, les gens ne s’habituaient pas et ils partaient ; en une année 32 personnes sont passées par là, des gens qui manquent tout le temps, n’aiment pas le travail, qui laissent accumuler deux ou trois jours et après le boulot est très dur, et, à la fin, c’était la pagaille et il a fallu former une équipe de travail plus consciencieuse. ” 229

Ce fréquent roulement du personnel ne favorise pas le développement de routines de prévention de risques car les nouveaux venus sont plus exposés aux risques étant donné leur manque de connaissances et d’expérience. Curieusement les travailleurs du secteur d’enlèvement de déchets considèrent que leur travail est moins valorisé que le nettoyage, tandis que les travailleurs de ce secteur perçoivent la situation d’une manière opposée.

 Le nettoyage est plus valorisé parce que ça se voit mieux et puis, les travailleurs ne montrent pas beaucoup d’intérêt de venir travailler ici.  Les gens ne valorisent pas beaucoup notre travail, mais ils observent, ils se rendent compte quand les ordures disparaissent ; ce qu’il faut, c’est former de bonnes équipes. ” 230

De la même façon que dans le secteur de nettoyage, le sentiment de dévalorisation des ramasseurs de résidus empêche qu’ils aient des relations intenses et positives avec d’autres secteurs de l’institution. Ces difficultés de communication bloquent le développement de savoirs et d’attitudes qui puissent contribuer de manière positive à développer des apprentissages organisationnels, afin d’améliorer la gestion du risque dans l’institution.

La forte légitimité des chefs engendre des espaces de confiance importants qui s’opposent aux composants de dévalorisation remarqués précédemment. L’attitude des travailleurs face aux situations de risque semble être le résultat, pour ce secteur, d’un bilan entre les composants positifs, comme la légitimité de l’autorité et la construction d’espaces de confiance, et les composants négatifs, comme la dévalorisation et le fréquent roulement du personnel.

L’absence de formation spécialisée est compensée par un savoir pratique qui entraîne des attitudes de protection, mais qui est insuffisant pour engendrer des routines stables qui rendent compte des risques inhérents au travail. Les routines quotidiennes, construites de manière autonome par les employés, fixant leur rythme de travail et leurs pratiques, sont une source de risques systémiques pour l’organisation. La légitimité de l’autorité des chefs directs s’exprime par l’existence des normes partagées de travail, mais ces normes auto-entretenues, 231 paradoxalement, ont pour conséquence d’augmenter l’exposition au risque.

Cette situation montre les difficultés de la part de l’institution pour mettre en oeuvre des apprentissages organisationnels qui minimisent les possibilités de risque, même dans des contextes marqués par la confiance et la légitimité des relations de pouvoir. A l’inverse du secteur de nettoyage et de celui du Centre de Matériel, pour lesquels le manque de légitimité de l’autorité était une source de risque, dans ce cas, le risque réside dans l’organisation du travail à l’hôpital, et dans l’absence de normes générales qui prescrivent les routines de travail. L’autonomie des travailleurs ne se traduit pas en réponses positives face au risque mais au contraire, reproduit les conditions du risque structurel de l’institution.

Notes
217.

Interview réalisé avec le médecin Directeur de la Direction de Santé au Travail de l’Hôpital. Novembre 1998

218.

Interview réalisé avec la Directrice de la Direction d’Hygiène Ambiante. Avril 1999.

219.

Interview collectif réalisé avec les travailleurs du Secteur d’Enlèvement de Déchets. Avril 1999

220.

Idem.

221.

Idem.

222.

Idem.

223.

Idem.

224.

Idem.

225.

Idem.

226.

Idem.

227.

Idem.

228.

Idem.

229.

Idem.

230.

Idem.

231.

Voir REYNAUD pgs. 76-77