Les implications des productions projectives

Rappelons que l’identification projective (M. Klein, 1946) consiste en une projection fantasmatique à l’intérieur du corps maternel de parties clivées de la personne propre du sujet de façon à léser et à contrôler la mère de l’intérieur. Notre méthodologie, avec l’épreuve des choix telle que nous l’envisageons au Rorschach97, nous permet de lier le fantasme de destruction omnipotent et la géographie du corps maternel.

La Planche X du Rorschach d’Henry est intégrée à une symbolique corporelle maternelle. Dans une tentative de globalisation, la dernière réponse du test fait germer l’interprétation suivante : « Donc avec les deux yeux, le soutien-gorge et le sexe de la femme, ça prend la forme du bassin, de l’intérieur d’une femme avec les deux ovaires ». Ce qui est complété à l’enquête : « comme s’il y avait eu une pénétration, un viol, il y a de la violence là parce que ces choses ont été tirées, déchirées, comme un slip et là des gouttes de sperme à l’intérieur ».

Le fantasme de viol, d’intrusion sadique dans le corps est convoqué a minima Planche VII avec l’apparition d’organes génitaux féminins. A la Planche VII c’est d’abord l’absence de consistance de l’enveloppe (« nuage », « souffle », « forme bizarre ») qui sera ensuite traitée en association à la transparence d’organes génitaux (« utérus », « vagin ») qui, repris à la Planche X, correspondent à une fantasmatique d’intrusion agie.

Nous pouvons aussi relever d’autres réponses mettant en scène la destruction de l’intérieur de l’enveloppe corporelle quand celle-ci n’est pas directement connotée par des associations sexuelles, exemple :

Henry , Planche III
« Mais qu’est-ce qu’il vient faire ce rouge là ? ». Rouge, qui à l’enquête est repris : « Ce serait peut-être du sang qui vient de ces deux femmes qui se tapent la tête contre les murs ». Le déterminant sensoriel - C - traduit les failles considérables de l’enveloppe maternelle primitive dans laquelle sont déversées les attaques destructrices. La Planche III est aussi choisie en référence à l’univers maternel.

D’autres exemples, que nous avons déjà cités, désignent des contenus « éclatés » ou ayant « explosé à l’intérieur » (Cf. Rorschach de Rachid, Hervé, ou Karim) devenant synonyme de l’intrusion fantasmatique dans le corps maternel quand la Planche est d’emblée choisie en référence à l’imago maternelle (Cf. Rorschach de Sébastien, Planche II).

La projection agressive de contenus destructeurs correspond au fantasme omnipotent de pénétration intrusive tel que D. Meltzer l’a mis en évidence sous le terme d’identification intrusive. Les conséquences pathologiques en sont les suivantes : la dimension de « bonté » du contenant restera déficiente pour permettre de contenir les capacités destructrices. Dès lors le contenant psychiquement réel, c’est-à-dire fantasmé, sera habité par des contenus intrusés (le claustrum). Dans ce domaine les stimulations sensorielles garderont un caractère inapproprié et seront ressenties comme une frustration intolérable. Une autre conséquence est la dépendance absolue à l’égard de l’objet réel maternel et le renforcement du clivage des objets, et corrélativement, du Moi. C’est de là que nous devons considérer les phénomènes identificatoires mis en oeuvre par l’identification projective pathologique.

Notes
97.

Cf. partie méthodologique concernant le test de Rorschach et l’utilisation de planches “ maternelles ” et “ paternelles ” (p. 33-37).