- Les signifiants formels

Ces signifiants sont des représentations de choses, formels parce qu’ils se rapprochent plus particulièrement des représentations de l’espace et des états des corps en général. Ce sont des signifiants de configuration, de la chose-espace qui s’inscrit comme contenant : ‘« les signifiants formels sont principalement des représentations des contenants psychiques’  » (p. 1). Ces signifiants se développent sous forme d’opposition, par la présence ou l’absence d’un trait distinctif pertinent. Ils marquent la diversité et la difficulté de la différenciation entre l’espace bi-dimensionnel et l’espace tri-dimensionnel. Ils possèdent chacun une propriété relative à une transformation. Ils se situent en deçà de la structure du fantasme, mais s’inscrivent dans «  ‘le cadre d’une exigence fantasmatique originaire’  » 123. Ils ne sont donc pas refoulables et peuvent s’imposer sous forme de vécu hallucinatoire : «  ‘le signifiant formel est souvent vécu par le patient comme un rêve particulièrement angoissant, comme un cauchemar éveillé ’ » (p. 14). Dans sa forme pathologique (D. Anzieu prend pour exemple la relation à une imago « promesse de vie et menace de mort »), le signifiant formel reste une ‘« tentative pour border ce vide en même temps qu’une réalisation imaginaire des diverses façons dont le Moi-corporel de l’enfant peut se sentir aspiré par ce vide’  » (p. 13). En ce sens, il est le support formel représentant la représentation-chose. Dans leur développement pathologique, leur déformation acquiert un caractère irréversible124. Ils sont constitués d’images proprioceptives, tactiles, coenesthésiques, kinesthésiques, posturales, d’équilibration ; ils ne se rapportent pas aux organes des sens à distance (p. 14). Leur mise en mots se limite au syntagme verbal : le sujet grammatical est une forme physique isolée ou un morceau de corps, le verbe est réfléchi. Ils mettent en figuration la transformation d’une caractéristique géométrique ou physique d’un corps «  ‘transformation qui entraîne une déformation voire une destruction de la forme (...) elle est souvent ressentie par le patient comme étrangère à lui-même’  » (p. 15). Ces signifiants formels sont répétitifs et identiques pour un même patient.

Notes
123.

Nous les rapprocherons par la suite du pictogramme (P. Aulagnier, 1975).

124.

D. Anzieu en donne trois exemples cliniques : l’observation de Marie, état limite, dans laquelle l’interprétation du signifiant formel est “ une peau qui se rétrécie ”. Chez Nathalie l’observation permet de préciser des épisodes autistiques traduits par le signifiant : “ une ligne droite s’incurve ”. Dans le cas d’une névrose, Gérard, la déformation de l’espace psychique opère sur la frustration de la pulsion d’attachement : “ un bras s’allonge ” (p. 2-8).