Chapitre 2 : le traitement perceptif des objets.

Lorsque nous étudions la reconnaissance des objets, nous analysons l’objet en fonction de ses propriétés. Les principales dimensions que nous recherchons sont la forme, la longueur et l’orientation.

1- La propriété de forme

La propriété de forme se décline en trois axes principaux, la courbure, les angles et la symétrie. Nous retrouvons d’ailleurs ces trois critères dans les géons de Biederman (1987) qui sont des formes géométriques. Nous avons déjà abordé la perception des courbes avec l’incidence du mouvement (morphocinèse), de la vitesse du mouvement et de l’angle de courbure, nous n’y reviendrons pas. Précisons seulement que l’estimation de la taille angulaire est peu performante en modalité tactile, avec une sous-estimation de l’angle et une perturbation de l’estimation angulaire liée à la présence de courbes attenantes aux intersections (Lakatos et Marks, 1998). Cependant, lorsque les angles ne sont pas suivis de courbes, l’estimation est relativement précise (Klatzky, 1999).

Au niveau de la symétrie, les données expérimentales montrent une facilitation de l’asymétrie pour des stimuli bi-dimensionnels (Locher et Simmons, 1978). Ainsi, Ballesteros, Manga et Reales (1997) observent que les figures symétriques sont plus difficilement identifiables que les figures asymétriques pour des stimuli bi-dimensionnels, mais que l’effet est inversé pour des stimuli tridimensionnels. En revanche, si la discrimination de formes asymétriques est plus rapide que la discrimination de formes symétriques, la reconnaissance des formes symétriques est plus rapide que la reconnaissance des formes asymétriques (Locher et Simmons, 1978). En effet, si quelques mouvements exploratoires suffisent à repérer les asymétries de la figure, une exploration plus complète sera nécessaire pour vérifier la symétrie. Néanmoins, la symétrie est mieux perçue lorsque l’exploration des figures bi-dimensionnelles est bimanuelle. L’exploration uni ou bimanuelle n’a pas d’impact sur la perception de l’asymétrie de figures bi- et tridimensionnelles ni sur la perception de la symétrie pour des figures tridimensionnelles.

Les figures que nous proposerons lors de la phase expérimentale, seront toutes symétriques et l’exploration sera unimanuelle. Par conséquent, la tâche sera plus difficile que pour des stimuli asymétriques. Toutefois, l’entraînement devrait permettre aux sujets de se rendre compte que le critère de symétrie n’est pas un critère pertinent dans cette situation. Nous pensons donc, que la symétrie ne sera pas pénalisante pour notre tâche. Symétrie ou non, les sujets devront trouver un autre critère de différenciation des figures s’ils veulent réussir la tâche.

Ballesteros, Millar et Reales (1998) expliquent les différences entre stimuli symétriques et asymétriques, par le cadre de référence multiple pour des objets en trois dimensions (verticale gravitaire, axe médian du corps, position de la main par rapport au tronc) et unique et égocentré (axe médian du corps) pour de petites figures bi-dimensionnelles. De ce fait, la symétrie dans la condition bimanuelle permet de centrer l’objet par rapport au corps et donc de coder plus précisément les mouvements.

Toutefois, nous pensons que la symétrie favorise la mise en place des procédés métriques, en permettant aux sujets de faire glisser leurs doigts sur la longueur et ou la largeur, sans être perturbés par des informations discordantes en provenance des doigts et dues à une asymétrie de la figure. En effet, si pendant le parcours, les doigts recueillent des informations différentes, le sujet devra inhiber ou recalculer la longueur en pondérant les distances selon le décalage entre les informations, avant de parvenir à l’extraction des informations métriques. Le traitement sera donc plus difficile dans cette situation particulière.