2- La propriété de longueur

Les travaux sur l’estimation des distances euclidiennes débouchent sur des résultats contradictoires. En effet, selon la modalité de réponse, les auteurs montrent une sous-estimation dans le cadre d’une réponse motrice (Klatzky, 1999) et une surestimation dans le cadre d’une réponse verbale (Lederman et al, 1987). De plus, le mode exploratoire influence la perception des longueurs. Ainsi, lorsque les sujets utilisent un mode exploratoire statique, les amplitudes d’erreurs sont plus élevées que pour une exploration dynamique de la longueur (Lederman, Klatzky et Barber, 1985). Lanca et Bryant (2001) étudient également l’incidence de l’imagerie visuelle sur les performances des sujets. Les résultats montrent que l’imagerie visuelle aide la perception de représentations euclidiennes. Toutefois, cette aide ne permet pas d’améliorer l’estimation de la taille réelle. Elle permet seulement de préciser celle de la taille relative. De plus, l’usage de l’imagerie visuelle est variable selon les sujets. Ces auteurs interprètent ces résultats comme une validation du modèle par médiation visuelle développé par Klatzky et Lederman (1987). Ce modèle postule que les informations haptiques sont traduites en images visuelles. De nombreux travaux montrent d’ailleurs le rôle de l’expérience visuelle sur les performances haptiques des sujets (Lederman, Klatzky, Chataway et Summers, 1990 ; Heller, 1989, De Beni et Cornoldi, 1988 ; Cornoldi et Vecchi, 2000). Cependant, Lanca et Bryant (2001) montrent également que les erreurs systématiques observées dans une tâche de complétion de chemin peuvent très souvent être attribuées au mode de réponse verbal ou moteur, comme nous l’avons vu ci-dessus. Les erreurs sont donc tardives et ne peuvent donc pas être expliquées par la traduction visuelle précoce des informations haptiques. Ces données sont en désaccord avec le postulat de Fujita, Klatzky, Loomis et Golledge (1993) selon lequel les erreurs interviendraient au moment de la perception, de la création de la trace mentale du chemin parcouru ou de la formation d’une représentation de l’espace appris, soit avant la construction d’inférences et de calculs de la trajectoire. Ainsi, si l’imagerie visuelle a une incidence sur les performances en proposant un cadre de référence dans lequel le sujet peut tester ses inférences, nous ne pensons pas que cet effet soit dû à une traduction précoce de l’information haptique en information visuelle. En revanche, l’expérience visuelle et le cadre de référence visuelle qui s’ensuit, va permettre d’activer des traces communes aux différentes modalités (Ninio, 1996). Ces traces pourront alors faciliter le traitement des informations haptiques.