4-2 Les types d’apprentissage

Voyons à présent, les grands types d’apprentissage et leurs mécanismes sous-jacents. Deux grandes catégories d’apprentissage peuvent être distinguées (Doré et Mercier, 1992 ; Richard J.F, 1998 ; Craddock et Guerrien, 1998) :

  • L’apprentissage par transmission revêt soit une fonction sociale (transmission des valeurs, des connaissances, des croyances,...) soit une fonction adaptative (apprentissage du danger avant d’en faire l’expérience, de la sécurité, de la protection, du savoir-faire,...). Ce type d’apprentissage regroupe :
    • l’apprentissage par l’observation, qui prend quelques fois la forme de l’imitation
    • l’apprentissage par enseignement où un tiers intervient directement auprès de l’apprenant, c’est l’apprentissage dispensé par les journaux, les éducateurs, les parents, les enseignants,...
    • l’apprentissage coactif dans lequel deux personnes ou plus s’influencent mutuellement.
  • L’apprentissage direct qualifié également d’apprentissage par l’action. En effet, dans cette forme d’apprentissage, les progrès sont attribués à la réalisation d’une activité. Le sujet agissant analyse les conséquences de son action ce qui lui permet d’acquérir de nouvelles connaissances. Ainsi, un mécanisme de rétroaction, la rétroaction étant une action en retour d’un effet sur sa propre cause, permet au sujet d’établir des liens entre son action et le résultat de son action. Cette nouvelle connaissance lui permet de produire des inférences afin de modifier ses actions, et donc les conséquences de celles-ci, jusqu'à l’atteinte du but fixé. Cette notion de rétroaction, n’est pas sans rappeler la loi de l’effet développée par Thorndike dans le cadre de l’apprentissage opérant. Nous reviendrons sur ce point.

L’apprentissage par l’action prend lui aussi plusieurs formes :

  • L’habituation en est la forme la plus simple. Elle vise à la diminution progressive de l’intensité d’une réponse. Cette technique est particulièrement adaptée pour l’étude des transferts intermodaux chez les bébés car elle est simple et ne nécessite pas une médiation par le langage.
  • Le conditionnement classique ou Pavlovien consiste à associer un stimulus à un autre stimulus auquel le sujet répond. Le but souhaité est que par la suite, le premier stimulus suffise à engendrer la réponse attendue.
  • Le conditionnement opérant ou instrumental pour lequel la réponse du sujet est suivie de conséquences, c’est-à-dire qu’à une réponse succéde un renforcement (positif ou négatif). L’une des formes de cet apprentissage est l’apprentissage par essais-erreurs. Dans ce dernier, la découverte de la solution est accidentelle. Thorndike (1874-1949) a proposé une loi dite loi de l’effet dont le point central est que la satisfaction suivant une action, augmente la probabilité d’apparition de celle-ci dans une situation semblable. Le problème de cette loi réside dans la difficulté à définir objectivement la notion de satisfaction. Toutefois, cette idée a été reprise et développée par la suite avec le concept de renforcement : le renforcement étant un événement survenant immédiatement après une action et capable de modifier la probabilité de cette réapparition (Doré et Mercier, 1992).
  • L’apprentissage par la découverte (Richard J.F, 1998) concerne les tâches impliquant une résolution de problème. Le mécanisme de ce type d’apprentissage nous intéressera particulièrement pour comprendre la difficulté que les sujets éprouvent lorsqu’il s’agit de passer d’une tâche à une autre très proche mais dont la résolution oblige le sujet à changer de stratégie. Nos sujets seront placés dans ce type de situation lorsqu’ils seront face à une tâche identique à celle qu’ils ont rencontrée lors des précédentes séances, mais avec des stimuli différents (passage des rectangles aux hexagones). Ils devront alors s’adapter à la nouvelle situation malgré la ressemblance des tâches. Trois types d’acquisition sont à distinguer :
    • la catégorisation du problème : le sujet doit s’apercevoir que la situation à résoudre appartient à une classe générale (elle intervient dans l’élaboration de réseaux sémantiques et l’acquisition d’une expertise)
    • la construction de connaissances spécifiques à la situation pour :
      • modifier l’état de la situation
        • éliminer les inférences erronées qui gênent la résolution
        • construire les pré-requis des actions pour que ces derniers puissent se réaliser.
  • créer des buts et sous-buts
    • créer des buts négatifs (ne pas se trouver dans tel état)
    • créer des sous-buts (procéder par étapes)
    • ordonner les sous-buts
  • changer de point de vue : définir un nouvel espace lorsque le sujet se trouve dans une impasse.
  • la construction de connaissances générales
  • L’apprentissage discriminatif (Richard J.F, 1998 ; Hatwell, 1986) a pour but de trouver la règle de classification. Cette règle peut-être soit unidimensionnelle, un seul attribut est alors à trouver (la couleur par exemple) ; soit multidimensionnelle, dans ce cas, la règle de classification est constituée de plusieurs attributs (couleur et forme par exemple). Dans cet apprentissage, le sujet doit trouver la règle de classification avec pour seules informations un renforcement en terme de oui ou non : aucune autre information n’est fournie. Cette technique a souvent été utilisée pour l’étude des transferts intermodaux vision-toucher (Hatwell, 1986). Les protocoles proposaient alors des attributs très discriminables : le but était de comprendre comment la règle de renforcement était induite et transférée. Nous reprendrons en partie cette technique pour étudier la perception différentielle de stimuli, par conséquent ces derniers seront peu discriminables. Nous reviendrons sur ce point lors de notre phase expérimentale. Le but ne sera pas alors d’étudier le transfert de la règle, mais la manière dont les sujets s’adaptent à la tâche et mettront en place des procédures efficientes.