Chapitre 8 : les procedes d’exploration haptique.

Nous allons à présent, étudier les procédés d’exploration haptique. Nous avons vu jusqu'à maintenant, l’influence de l’entraînement sur les performances (amplitudes d’erreurs, nombre de bonnes réponses et les types d’erreurs). Nous avons également observé les effets de la position de la cible et de l’écart entre les distracteurs, mais nous ne nous sommes pas encore penchés sur le mode d’exploration des sujets. C’est ce que nous nous proposons d’étudier maintenant. Pour cela, nous nous référons aux procédés d’exploration haptiques définis par Klatzky et Lederman (1987) mais aussi par Appelle, Gravetter et Davidson (1980). Cependant, avant de nous pencher sur ces procédés d’exploration, nous allons observer le nombre de fois où les figures d’un même item ont été touchées et également le nombre de fois où le modèle a été exploré toujours au cours d’un même item. Ces analyses nous permettront de comprendre comment les sujets comparent les figures les unes aux autres. Nous étudierons également le nombre de doigts utilisés par les sujets lors des explorations.

Parmi tous les procédés décrits par Klatzky et Lederman (1987), nous avons retenu l’enveloppement et le suivi de contour. Le soulèvement, la pression et le mouvement latéral qui permettent l’extraction des propriétés de poids, de texture et de dureté, ne sont pas des procédés pertinents pour l’exploration de figures en relief. En effet, les sujets ne pouvaient pas soulever les planches et de toute manière cela ne leur aurait pas apporté d’informations. De même, toutes les figures étaient constituées de la même matière et la dureté n’était donc pas un critère discriminant. Il en est de même pour la texture. D’autre part, nos figures étaient relativement petites et l’épaisseur du relief ne permettait pas une prise en main. De ce fait nous avons associé au procédé d’exploration d’enveloppement une valeur de paramètre de mouvement dynamique, ce qui n’est pas le cas dans la description de Klatzky et Lederman. Cependant, il faut rappeler que ces procédés ont été décrits pour des objets en trois dimensions. Par conséquent, les sujets pouvaient modeler leur main sur l’objet pour en extraire la forme globale, ce qui n’est pas possible avec un dessin. Pour en évaluer la forme globale, il faut effectuer un balayage de la figure. Toutefois, ce balayage n’a pas pour objectif de tester la matière et il diffère donc du mouvement latéral. C’est pourquoi, nous avons gardé l’appellation d’enveloppement même si cela induit un mouvement. Le suivi de contour qui permet l’extraction de la forme précise est bien évidemment le second procédé que nous avons retenu. Toutefois, ces deux procédés ne nous permettaient pas de coder l’ensemble des mouvements exploratoires. Notre tâche nécessitait une perception de la distance puisque les longueurs et les largeurs variaient entre les figures. Nous avons donc eu recours au procédé métrique décrit par Appelle et al. (1980). Ce procédé se décline sous deux formes. Dans le premier cas, le sujet déplace un doigt sur la longueur qu’il veut mesurer tout en comptant mentalement la distance qui sépare le point de départ du point d’arrivée. Dans le second cas, le mouvement est statique. Soit le sujet pose son doigt à plat sur la figure et rechercher les limites de la figure sur sa peau, soit il pose un doigt sur chaque extrémité et évaluer la distance qui sépare ses doigts. Ces deux déclinaisons sont particulièrement intéressantes pour notre tâche. Toutefois, il nous est vite apparu qu’une troisième déclinaison devait être associée aux deux premières. En effet, nos figures variaient simultanément sur la longueur et sur la largeur pour maintenir une aire constante. Or, certains sujets ont cherché à associer la perception de la longueur à la perception de la largeur. Ainsi, ils ont combiné les deux premières déclinaisons du procédé métrique en étant statique sur un axe et dynamique sur l’autre. Nous avons distingué cette association simultanée, d’une association alternée des deux déclinaisons. En effet, nous considérons que l’association simultanée de deux procédés est une démarche dynamique résultant d’un apprentissage, alors que l’alternance de deux procédés est une application des outils à leur disposition. Nous envisageons la première solution comme une évolution de la seconde.