6.2 Mise en place d’un projet de soins, et complexité des niveaux d’articulation institutionnelle

Nous pouvons dire que la mise en place de notre projet de soins, sous la forme de dispositifs de groupes médiatisés, a constitué le R.D.V. de cette rencontre. Articulé et différencié du projet de vie, ce projet a eu des effets sur la représentation du soin au dément, sur l’approche familiale (qui m’a personnellement conduit à m’engager dans une formation de thérapeute familial), et sur le sens des pratiques cliniques.

Les différents emboîtements « lieu de vie/lieu de soins » sont à penser en lien avec les souffrances « en attente » des personnes démentes. Ce travail d’analyse institutionnelle n’est pas l’objet de mon travail actuel, d’autant plus qu’il n’est pas de ma compétence du fait de mon implication en tant qu’acteur institutionnel. Cependant, nous pouvons pointer quelques éléments de notre réflexion dans l’institution, sources également de la demande de supervision, des prises en soin individuelles ou en groupe.

Les difficultés de prise en soin ont généré des souffrances et des interrogations avec pour conséquence des dysfonctionnements institutionnels : le dispositif institutionnel de vie et de soins peut-il évoluer ou non ? Les différents acteurs institutionnels veulent-ils conserver une position antérieure ou veulent-ils changer de modèle ? Si la longévité des patients déments dans le lieu de vie montre une qualité de l’hébergement, nous constatons en même temps le « turn-over » se ralentit. Parallèlement, l’évolution de la maladie nous fait ressentir un risque d’épuisement par perte d’intérêt qui concerne notre investissement de patients perdant le lien en perdant leur histoire.

L’un des changements possibles est la question de l’enrichissement des compétences du travail d’une équipe pour répondre aux difficultés d’accompagnement de chaque patient. Cela nécessite d’interroger les différents modèles théoriques, qu’il soit médical ou psychiatrique en particulier du point de vue de notre expérience clinique et des questions tirées de la pratique. Le modèle psychopathologique peut aider à continuer le travail de réflexion, car il est peut être plus pertinent pour interroger les niveaux de complexité et les différentes représentations du soin dans l’institution. La psychopathologie, définit ainsi, s’intéresse et travaille avec les représentations du patient et celle du soignant dans l’interrelation.

Ce dispositif de groupe a également permis la mise en place d’un travail de groupe constitué des différents animateurs de ces groupes, dans des fonctions soignantes différenciées et centrées sur la personne souffrante et sur la relation. Ce dispositif a permis la prise en soins de 40 à 45 personnes chaque semaine sur une institution de 80 personnes, réparties dans 9 groupes entre 1991 et 1997. L’expérience des groupes à médiation a constitué un matériau d’étude des capacités relationnelles sous l’éclairage psychodynamique.