L’hypothèse des émotions primaires vs sociales

Ross, Homan, et Buck (1994 ; voir aussi Prodan, Orbelo, Testa, & Ross, 2001) ont proposé l’existence de deux classes d’émotions étant différentiellement latéralisées. Les émotions primaires (p.ex., peur, dégoût) seraient innées, universelles et modulées par l’hémisphère droit. En revanche, les émotions sociales (p.ex., culpabilité, honte) seraient apprises, non universelles et modulées par l’hémisphère gauche. De plus, l’hémisphère gauche assurerait le contrôle volontaire des émotions. Ces auteurs ont émis cette proposition sur la base d’études cliniques utilisant le test de Wada (Ross et al., 1994). Durant les injections dans l’hémisphère droit, il était demandé aux patients de se rappeler verbalement un événement durant lequel une expérience émotionnelle primaire avait été ressentie. Cet événement avait été identifié comme tel avant que le test de Wada ne soit administré. La plupart des patients étaient déficitaires dans le rappel de la dimension émotionnelle primaire, mais pas factuelle, de cet événement. Précisément, cette inactivation provoquait un rappel centré sur une expérience émotionnelle sociale plutôt que primaire, conduisant même certains patients à nier avoir fait l’expérience d’une émotion primaire durant cet événement. Ces auteurs étendent leur hypothèse au système mnésique en proposant que les expériences émotionnelles sociales liées aux événements vécus soient stockées dans l’hémisphère gauche, alors que les expériences émotionnelles primaires liées aux événements vécus soient stockées dans l’hémisphère droit.

Cette hypothèse peut être rapprochée de celle émise par Gainotti pour deux raisons. Tout d’abord, elle propose une alternative aux hypothèses classiques de latéralisation (hypothèse de l’hémisphère droit, et hypothèse de valence). Ensuite, elle propose un rôle différentiel des hémisphères selon le niveau de l’émotion en attribuant à l’hémisphère gauche un rôle dans le contrôle émotionnel.