2. Réorganisation en cas de lésion cochléaire localisée

Des données d’imagerie fonctionnelle très récentes sont venues renforcer l’idée d’une réorganisation tonotopique de A1 chez l’humain en cas de lésion cochléaire localisée, sous la forme d’une sur-représentation des régions cochléaires situées en bordure de la lésion (Dietrich et coll., 2001). Les auteurs de cette dernière étude ont réalisé des mesures de MEG au niveau de A1 (cortex supratemporal) en appliquant à l’oreille controlatérale des sons purs de différentes fréquences (durée = 500 ms, temps de montée et de descente = 10 ms, nombre de répétitions = 128, ISI = 4 sec), à une intensité de 60 dB SL (60 dB au-dessus du seuil de perception de la fréquence testée). Le paramètre étudié était l’amplitude du champ magnétique évoqué dans le cortex supratemporal, plus exactement de sa composante précoce N1m (latence = 100 ms après le stimulus), à partir de la mesure du moment dipolaire correspondant (reflet de l’activité neuronale sous-jacente, mesurée en MEG de façon tangentielle à la surface du scalp).

Un groupe contrôle de 12 sujets normo-entendants était testé à 4 fréquences (500, 1000, 2000, ou 4000 Hz). Huit patients souffrant d’une surdité sur les fréquences aiguës (6 surdités brusques unilatérales, 2 surdités bilatérales par traumatisme sonore) étaient testés à 3 fréquences : celle définie comme étant égale à Fc et 2 fréquences plus basses (comprises entre 750 et 2000 Hz). Chez les 2 sujets souffrant d’une surdité bilatérale sur les fréquences aiguës, les mesures étaient faites dans l’hémisphère controlatéral à l’oreille dont l’audiogramme montrait la pente de perte auditive la plus importante (comprise entre 30 et 65 dB /octave).

Dans la population contrôle, il n’a pas été retrouvé de différence significative entre les moments dipolaires obtenus pour les 4 fréquences 500, 1000, 2000 et 4000 Hz, et ce quelque soit l’hémisphère testé. La figure 6 permet de comparer l’amplitude des champs magnétiques évoqués dans A1 (cortex supratemporal) à Fc (7 kHz) et à une fréquence plus basse chez un patient ayant souffert d’un traumatisme acoustique. L’amplitude de la composante N1m est plus importante à Fc. Au total, chez 7 des 8 patients testés, le moment dipolaire mesuré pour Fc était significativement augmenté par rapport à celui des 2 fréquences plus basses. Ce résultat renforce l’hypothèse selon laquelle les neurones des régions de A1 déafférentées par un traumatisme sonore ou une surdité brusque se mettent à répondre aux fréquences adjacentes à celles de la région cochléaire lésée. Pour autant, cette étude de MEG, qui reste assez imprécise quant à la méthodologie employée pour déterminer Fc, n’a permis de tester qu’un nombre très limité de fréquences. Il n’est pas certain que les résultats obtenus soient reproductibles en considérant une autre fréquence proche de celle retenue comme étant Fc et pouvant également correspondre à la bordure de la région cochléaire lésée.

Figure 6
Figure 6