OBJECTIF 3 : ABORDER LES CONSEQUENCES PLASTIQUES DE LA REHABILITATION AUDITIVE PAR L’ IMPLANT COCHLEAIRE

Le nombre croissant d’enfants sourds recevant un implant cochléaire rend aujourd’hui difficile, pour qui s’intéresse aux effets de l’acclimatation, de ne pas aborder un tant soit peu les conséquences de la réhabilitation auditive de l’enfant par l’implant cochléaire. L’enfant sourd profond implanté offre un très vaste champ d’exploration de la plasticité fonctionnelle des voies auditives. Dans son cas, l’implant active électriquement un système auditif par définition plastique puisque potentiellement vierge de toutes stimulations sensorielles. Nous avons abordé la question de la plasticité fonctionnelle de réhabilitation chez l’enfant implanté en étudiant les corrélations pouvant exister entre les niveaux de perception psychophysiques auditifs et les réponses électrophysiologiques obtenues avec les dernières générations d’implant cochléaire. Le potentiel d’action électrique composite du nerf auditif (PAEC) est une mesure in situ de la réponse des fibres nerveuses cochléaires à la stimulation par un système électronique implanté dans la cochlée du sujet sourd. Chez tous les patients implantés cochléaires, le système implanté est composé de plusieurs électrodes de stimulation dont la distribution fréquentielle suit la tonotopie cochléaire (restitution des fréquences les plus aiguës à la base et des fréquences les plus graves à l’apex de la cochlée). La mesure du PAEC consiste à délivrer à une des électrodes un stimulus électrique et à recueillir sur une électrode adjacente la réponse des fibres nerveuses. Elle dépend de la capacité des cellules du ganglion spiral à synchroniser une réponse neurale qui sera transmise par les fibres afférentes aux centres auditifs, lorsque le niveau du stimulus est suffisant. Grâce au système d’enregistrement par télémétrie dont sont équipés les derniers implants cochléaires (implant Nucleus CI24), la mesure du PAEC est directe et ne nécessite aucune sédation. Chacune des électrodes intra-cochléaires peut être testée et le seuil de réponse correspondant rapidement mesuré (Brown et coll., 1998; Abbas et coll., 1999). L’hypothèse d’une corrélation entre le seuil d’obtention du PAEC et les niveaux psychophysiques déterminés pour chaque électrode – seuil de perception (niveau T) d’une part et niveau de confort (niveau C) d’autre part – a été récemment explorée. Il a été montré que le seuil du PAEC pouvait être utilisé pour prédire les niveaux psychophysiques sur plusieurs électrodes à condition de mesurer les niveaux T et C au moins sur une électrode (Brown et coll., 2000; Hughes et coll., 2000; Franck & Norton, 2001). Nous nous sommes particulièrement intéressés à l’évolution dans le temps des corrélations entre le seuil du PAEC et les niveaux psychophysiques. L’idée sous-jacente était qu’une amélioration de ces corrélations dans le temps pourrait refléter des processus plastiques relatifs à la perception auditive.