E - Approche des marques verbales du nombre

L'approche graphique du verbe paraît plus complexe, avec la multiplicité des catégories que l'on trouve selon l'aspect, les temps, les modes, le nombre, les personnes et les genres.

‘«En fait, les formes verbales sont homophones dans 80% des cas employés, ce qui implique que toutes les flexions verbales qui ne concernent pas seulement les oppositions de nombre, mais aussi les oppositions de mode, temps et personne, sont incluses dans ces 80%» (R. Honvault, 1995, p. 62).’

Pour cette linguiste (ibid.), la marque verbale du nombre est le "n" mais le fait qu'il soit toujours associé à "e" et à "t" a donné à cet ensemble une cohésion visuelle. Dans le rapport des unités de l'écrit aux unités de la langue, le "n" serait linguistiquement le morphogramme de nombre verbal même si visuellement, pour le sujet, ce serait souvent l'association "nt" ou "ent" qui remplirait ce rôle.

M. Fayol, S. Pacton et C. Totereau (1998) soulignent que l'accord en nombre des noms et verbes est en français moins problématique que l'accord en genre. La difficulté proviendrait pour les apprentis-scripteurs comme pour les adultes de ce que les marques -s et -nt sont le plus souvent silencieuses. Seuls le déterminant et parfois l'auxiliaire se trouvent marqués à l'oral.

Les règles d'accord en genre et en nombre font partie des entités de la langue qui n'ont été essentiellement étudiées qu'en tant que phénomènes linguistiques.

Sur le plan psychologique, ces règles d'accord sont perçues comme faisant partie "d'habitudes verbales" (terme employé par P. Oléron, 1963).

Apparemment, l'application de ces règles d'accord, en langage parlé, ne pose réellement aucune différence majeure. En fait, il juge ces activités fort complexes, mais tellement "automatisées" qu'elles ne font surgir aucun problème.

Pourtant, sur le plan pédagogique, l'acquisition des règles d'accord, en langage écrit, est maîtrisée tardivement, chez le jeune enfant, et cela bien qu'il ait perçu très tôt l'existence de lois régissant le genre et/ou le nombre des items de la langue (A. Karmiloff-Smith, 1979).

Nous citerons dans la suite de ce chapitre les récentes études françaises qui traitent de l'acquisition d'unités orthographiques s'échappant à la seule prédictibilité phonologique. Cette préoccupation manifeste une orientation récente, la plupart des recherches antérieures ayant mis l'accent sur le rôle de la graphie. Le système orthographique du français offre justement un terrain particulièrement propice à cette observation des aspects de l'orthographe que l'apprenant ne peut déduire d'une reconstruction de ses connaissances phonologiques préalables.